Le secteur médical tunisien ne peut pas déroger aux évolutions technologiques dans le monde. Un monde où la médecine, grâce à l’appui de plusieurs technologies de pointe, sera encore plus précise, préventive, personnalisée, réactive, participative et numérique. Chiffre à l’appui : le marché de la santé impliquant la technologie explose. En effet, évalué à 144 milliards de dollars en 2018, il a dépassé les 200 milliards de dollars en 2020. C’est ce qu’on peut lire dans la note conceptuelle du séminaire MEDTECH INNOV qui se tient actuellement, les 27 et 28 octobre 2022 à Tunis.
Sonder l’état de lieux et les perspectives du secteur du Medtech en Tunisie, ainsi que préparer un livre blanc comportant les recommandations aux décideurs sont les ambitions et les objectifs de l’événement qui a réuni plus de 200 personnes. Que retenir de sa deuxième journée? Les industries des dispositifs médicaux en Tunisie ont du potentiel et peuvent encore évoluer dans une perspective positive et vivre un essor. Et ce, à condition de favoriser la recherche scientifique, lever les obstacles réglementaires et booster les formations adéquates.
Cependant, il faut pallier à un certain nombre de manquements pour s’aligner aux normes internationales. De ce fait, il faut regarder la moitié pleine du verre; tout en essayant de remplir sa seconde moitié. Le déploiement des technologies médicales en Tunisie pourrait connaitre son essor à condition donc de remplir quelques conditions. C’est ce qui ressort des interventions et des déclarations que nous avons recueillies lors de l’événement.
C’est sur les manquements réglementaires et juridiques que le Dr. Chokri Jeribi, Président of National CROs Chambre chez Chambre Nationale des CROs de Tunisie (CNC) et président du comité scientifique de l’événement a axé ses propos, dans une déclaration à L’économiste Maghrébin. Il a ainsi énuméré les points positifs et les points à perfectionner dans le secteur en Tunisie. L’intervenant nous fait part de son hésitation entre dire que la Tunisie a pris du retard dans ce domaine ou qu’elle est sur la bonne voie.
Quand la réglementation fait défaut
Notre interlocuteur affirme, dans le même contexte, que l’essentiel est « l’existence d’un potentiel énorme ». « Aujourd’hui nous ne pouvons pas passer outre les technologies médicales dans l’amélioration des prises en charge des patients ». Il s’est félicité de l’augmentation du nombre des start-up qui travaillent sur les technologies médicales. Cependant, tous ces points positifs ne peuvent, en aucun cas, omettre la moitié vide du verre. Ainsi, le président du comité scientifique de l’événement pointe des manquements au niveau de l’organisation et de la réglementation. A cet égard, il affirmé que le secteur médical doit être très verrouillé et très réglementé; avec une évaluation des performances et une protection accrue des patients.
De la nécessité de fournir une formation de qualité
Autre point important, à savoir celui du volet formation. Il est important qu’on dispose de formateurs qui maitrisent parfaitement le domaine. La recherche médicale est encore un volet important, notamment parce que « notre pays dispose d’une réglementation superbe et à la pointe en terme de recherche médicale. En revanche, il y a un retard également au niveau de la recherche médicale sur les dispositifs médicaux. Et devant ce vide, on ne peut jamais être impliqué ». Et de rappeler que la technologie médicale associe les professionnels de la santé à ceux de l’ingénieur et de technologie.
La santé publique doit s’y mettre aussi
Répondant à notre question sur la capacité de la santé publique à s’impliquer dans le domaine, M. Jeribi a affirmé qu’il s’agit d’un véritable défi pour la santé publique. Le département ministériel, pour lui, doit mettre le MedTech parmi ses priorités, même si il a du retard. D’où l’importance de la nécessité de monter dans le train de l’innovation. « Nous en sommes capables et je demeure optimiste rien que de voir qu’on a été des locomotive dans le domaine de la pharmacie et dans celui de la santé. Il y a un problème de moyen mais on peut y remédier par une bonne gouvernance », conclut-il.
Mettre le patient au cœur du MedTech
Pour Mariem Khrouf, directrice de la direction de recherche médicale au ministère de la Santé, le MedTech en Tunisie est une filière en développement. « Le ministère de la Santé, avec la politique nationale de la santé adoptée le 7 avril 2021 et qui a mis le patient au cœur de la problématique, œuvre pour avoir les meilleures technologies. Ceci va progresser selon l’évolution de la médecine et des besoins ».
Elle fait savoir que le ministère travaille actuellement sur la loi de la recherche biomédicale qui va couvrir les dispositifs médicaux et tous les essais cliniques en relation avec tout ce qui est dispositifs médicaux. Actuellement, le cadre réglementaire porte sur le médicament et « on voudrait élargir le cadre réglementaire en question vers d’autres dispositifs et produits ». D’ailleurs, la loi sur la recherche biomédicale va inclure ce volet-là et « je pense qu’elle simplifiera tout le processus ». Elle a fait savoir que le département ministériel est en train de préparer le cadre réglementaire de l’autorisation des dispositifs médicaux.
La pandémie a dévoilé toute la vérité
La pandémie planétaire de Covid-19 a montré que le MedTech est un domaine en plein essor, d’après Wafa B’chir, PhD, Co-Founder & Senior Partner et organisatrice du séminaire. Dans le cas tunisien, le pays a fait face à une situation de pénurie de concentrateurs d’oxygène. « Et nous nous sommes rendus compte de l’importance d’être autonomes et d’avoir notre propre production locale », dit-t-elle. Tout en rappelant l’existence de plusieurs productions en Tunisie, elle indique qu’il s’agit de produits consommables (masques, surblouses, etc.) « Quelques uns commencent à se positionner sur le matériel complexe qui demande une réglementation très poussée, du temps et de l’argent. Cependant, elle pointe du doigt l’inexistence d’un laboratoire accrédité.