Intervenant dans la soirée du jeudi 3 novembre sur Attessia, Mme Sihem Boughdiri Nemsia, ministre de l’Économie, des Finances et de l’Investissement est revenue longuement sur les grandes réformes présentées au FMI. Et notamment le système de compensation, le système fiscal et les entreprises publiques. Extraits.
Enfin, un ministre de premier plan sort de son silence pour lever une partie du voile sur les fameux accords en cours de signature avec l’institution de Bretton Woods. Lesquels, faute de clarté et de transparence, agitent l’opinion publique; eu égard à leur énorme impact sur la quotidien des Tunisiens.
Botter en touche
Ainsi, dans une interview accordée dans la soirée du jeudi 3 novembre à la chaîne privée Attassia, animée par le journaliste Néji Zaïri et la présentatrice de l’émission Rendez-vous 9, Malek Baccari, Sihem Boughdiri Nemsia, ministre de l’Économie, des Finances et de l’Investissement au sein du gouvernement Najla Bouden, a durant 1h 45 mn répondu avec brio à une salve de questions. Avec une certaine franchise, parfois en maniant la langue de bois, mais toujours en bottant en touche.
Une carrière impressionnante
Il faut reconnaitre que l’interviewée connait son sujet sur le bout des ongles. Diplômée du cycle supérieur de l’ENA, titulaire d’une maitrise en sciences économiques et du diplôme de l’École nationale des Impôts de Clermont-Ferrand, elle traîne une carrière de 28 ans au sein du ministère des Finances. La ministre fait également partie des membres de la commission des négociations avec le FMI composée du ministre de l’Economie et de la Planification, Samir Saïed et du gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Marouen Abassi.
Aucune contrainte du FMI
A l’entame de son intervention, Sihem Boughdiri Nemsia rappelle qu’eu égard à la situation catastrophique de l’économie nationale et des finances publiques, le gouvernement Bouden n’avait pas d’autre choix que de recourir aux bailleurs de fonds pour solliciter un prêt. Et ce, au titre du mécanisme élargi de crédit (MEDC) d’une durée de 48 mois et pour un montant d’environ 1,9 milliard de dollars (NDLR).
En frappant à la porte du FMI, ajoute la ministre, le gouvernement a présenté à ses interlocuteurs une batterie de mesures touchant aussi bien la réforme du système de compensation, la réduction de la masse salariale que la mise à jour du système fiscal et le sauvetage des entreprises publiques.
Nuance, mais de taille. Ces réformes, a-t-elle souligné avec force, ne sont nullement imposées par nos bailleurs de fonds, mais inspirées par notre vision de l’intérêt national.
A la question de savoir pourquoi le contenu des accords avec le FMI n’a pas été révélé à ce jour, la ministre de l’Économie soutient que les experts tunisiens travaillent d’arrache-pied avec leurs collègues du FMI; et ce, afin « d’affiner » le texte final. En attendant d’être entériné par le conseil d’administration du FMI, qui devrait examiner la demande de la Tunisie en décembre prochain.
Pas de levée du système de compensation, mais…
Revenant sur le dossier ultra sensible de la réforme du système de compensation, la ministre a nuancé qu’il ne s’agit nullement de levée de compensation. Mais plutôt d’un recours à un « mécanisme de ciblage » permettant à certaines classes sociales d’en bénéficier.
« Selon des critères scientifiques bien établis, ce programme de subventions directes sera progressif et s’étalera sur quatre ans ». Ainsi, « il touchera 70 % des familles tunisiennes à faibles revenus; mais également la classe moyenne. Soit plus de 8 millions de personnes. De plus, le gouvernement finalise la mise en place d’une plateforme pour permettre aux Tunisiens de s’enregistrer et de bénéficier des aides directes », a-t-elle fait savoir.
Abordant la réforme du système fiscal, la ministre a réitéré la volonté du gouvernement à instaurer l’équité entre les citoyens, en imposant répartition rigoureuse de l’impôt. Et ce, « en retirant le plus possible de secteurs du régime forfaitaire ».
Pas de cession d’entreprises publiques
Revenant sur l’épineux dossier de la cession des entreprises publiques- une ligne rouge tracée par la centrale syndicale- et s’alignant sur la position officielle du gouvernement présentée par son porte-parole Nasreddine Nsibi, qui démentait les informations selon lesquelles le gouvernement avait décidé la cession d’entreprises publiques dans le cadre de son programme présenté au FMI; Mme Boughdiri Nemsia est catégorique : L’Etat ne cédera pas ses parts.
D’ailleurs, a-t-elle poursuivi, la cession des entreprises publiques ne figure nullement dans l’accord préliminaire avec le FMI. « Il s’agit de réformer et restructurer ces entreprises stratégiques, afin d’assurer leur pérennité. Pour les établissements publics œuvrant dans des secteurs concurrentiels, à l’instar de la RNTA, il est question d’ouverture de leurs capitaux au privé ». Mais, s’est-elle rattrapée, « rien ne sera fait sans consultations préalables avec nos partenaires sociaux ».