« Les transferts sociaux et les subventions restent un point de discorde. Ils divisent le gouvernement, les organisations patronales et syndicales, ainsi que les différents organismes de la société civile ». C’est ce qui ressort d’une étude élaborée par Solidar Tunisie et la fondation allemande Heinrich Böll Stiftung, dévoilée vendredi à Tunis.
Cette étude a été présentée lors d’un atelier organisé sur le thème « Quel socle commun pour un modèle de développement résilient ? ». Elle vise à définir des orientations socioéconomiques stratégiques sur lesquelles s’accordent les différents acteurs aussi bien institutionnels qu’extra-institutionnels.
« L’objectif étant de mettre en place un modèle de développement garantissant une dynamique de croissance économique et sociale qui répond aux besoins de la résilience et de la durabilité », a indiqué, à cette occasion, Lobna Jeribi, présidente de Solidar Tunisie.
Selon elle, l’étude a permis d’identifier 30 axes qui ont été formulés par le ministère de l’Economie et de la Planification, l’UGTT, l’Utica et d’autres organismes de la société civile. « Ces axes serviront de base pour la mise en place d’un modèle de développement résilient », a-t-elle encore précisé.
L’UGTT est en faveur du renforcement du PPP
Commentant les résultats de cette étude, Abderrahmane Lahga, expert au département des études à l’UGTT, a indiqué que la centrale syndicale n’est pas opposée à la réforme des subventions et des transferts sociaux. Il a souligné qu’elle a proposé au gouvernement de réviser le montant réel des dépenses liées aux subventions.
« Ces subventions destinées aussi bien aux familles nécessiteuses qu’aux entreprises coûtent aujourd’hui à l’Etat 7 milliards de dinars. Or, nous ne sommes pas sûrs qu’il s’agisse là du montant réel », a-t-il déclaré.
Il a, dans ce sens, appelé à prendre en considération le coût des programmes de transferts sociaux dans l’évaluation du montant des subventions. Il a aussi précisé qu’il faut prévoir un milliard de dinars pour transférer 7 milliards de dinars de subventions.
Dans le même contexte, l’expert syndicaliste a recommandé de réformer le programme national d’aide aux familles nécessiteuses (PNAFN). Et ce, dans la mesure où, selon lui, les personnes les plus pauvres issues des régions reculées du pays ne sont pas répertoriées dans ce programme. D’après lui, les erreurs d’exclusion recensées dans ce programme sont de l’ordre de 40 à 50%.
S’agissant du volet lié au partenariat public-privé (PPP) qui constitue l’un des trente axes formulés dans le cadre de l’étude, l’expert a souligné que la centrale est en faveur du renforcement du PPP mais cela doit exclure les secteurs de la santé et de l’éducation. Car ils constituent des services publics.
Changer les règles du jeu économique
Concernant l’axe relatif aux règles de la concurrence, Lahga a souligné l’impératif de « changer les règles du jeu économique » dans le pays. Et ce, de manière à favoriser une meilleure ouverture économique et à rompre avec l’économie de rente. « Il est important de garantir des opportunités égales entre les hommes d’affaires », a-t-il insisté.
Le président de la Fédération nationale des entrepreneurs de bâtiment et des travaux publics à l’Utica, Jamel Ksibi, s’accorde avec l’expert de l’Ugtt. Il a souligné que la Tunisie reste une économie de rente par excellence qui compromet le principe de compétitivité.
Jamel Ksibi a également appelé à rompre avec « la rente administrative ». Celle-ci freine, selon lui, la digitalisation et l’investissement, outre la « rente syndicale ». Il a par ailleurs souligné que le service public est appelé aujourd’hui à servir les intérêts des citoyens plutôt que ceux des syndicats et des lobbies.
De son côté, la vice-présidente de la Conect, Hosn El Woujoud Ben Mustapha, a évoqué le rôle de la société civile dans la mise en place d’une politique économique de changement dans la conception des réformes socioéconomiques, l’un des axes qui divise les acteurs institutionnels et extra-institutionnels dans le cadre de cette étude.
Elle a, à cet égard, indiqué que « la société civile doit mettre la pression davantage sur le gouvernement. Et ce, afin d’accélérer les réformes nécessaires qui ne peuvent plus attendre ».
Avec TAP