La Tunisie s’apprête à vivre une situation rendue plus difficile en ce jeudi 14 décembre 2022 avec l’actualisation officielle de l’ordre du jour des réunions du Conseil exécutif du Fonds monétaire international (FMI) prévue pour le 19 du mois courant.
En effet, au moment où tout laissait prévoir une validation finale de l’accord du FMI avec la Tunisie portant sur l’octroi d’un crédit de 1,9 milliard de dollars, soit l’équivalent de 6 milliards de nos dinars avec un déblocage dès la fin de ce dernier mois de l’année 2022, la mauvaise nouvelle est tombée tel un couperet.
Et en l’absence de toute déclaration officielle précisant les raisons de cette suppression de ce point dans le sens on l’on ne sait pas s’il s’agit d’un simple report ou, carrément, d’une annulation pure et simple de toute décision sur le dossier tunisien, nous nous trouvons acculés dans une position d’attente avec émission d’hypothèses.
En guise de réaction, les Tunisiens ont eu droit à une sorte de fuite émanant d’un responsable anonyme confiée à une agence de presse étrangère, en l’occurrence, Reuters disant que la Tunisie et le FMI on convenu de reporter ledit examen après des retouches pour l’après fête de fin d’année, donc pour le début du mois de janvier 2023.
Les répercussions seraient désastreuses
Si l’on sait que le chef de l’Etat se trouve aux Etats-Unis d’Amérique pour assister au Sommet Amérique-Afrique, tout le monde s’interroge où sont passés les Nejla Bouden, Cheffe du Gouvernement, Sihem Boughdiri Nemsia, ministre des Finances, Marouane El Abassi, Gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie et autre Samir Saïed, ministre du Plan et de l’Economie ?…
Dans tout ce cafouillage, les analystes et chroniqueurs de certains plateaux radiotélévisés se sont illustrés par leurs propos qu’ils ont voulu présenter comme étant des données vérifiées auprès de « leurs » sources dignes de fois.
Le seul analyste, catégorique sur la question, a été Ezzeddine Saidane, expert économique et financier chevronné et bien introduit dans les hautes sphères des finances internationales : Il a dit, sans ambages, que la réunion du FMI avec la Tunisie a été purement et simplement annulée. Il l’a répété et insisté là-dessus.
Bien entendu, nous espérons que, pour une fois, il s’est trompé car, comme il le dit, les répercussions seraient désastreuses pour notre pays dans le sens où la Tunisie se retrouverait, alors, dans une impasse dont personne ne peut prédire comment elle peut s’en sortir. Certains sont allés jusqu’à évoquer l’hypothèse de l’état de faillite – que Dieu nous en préserve !
Mais, voyons, un peu, les probables raisons de ce développement que, mis à part justement Ezzeddine Saidane, personne n’avait prévu !
Les causes seraient multiples
Tout d’abord, l’absence de toute communication de la part des autorités tunisiennes quant à la manière concrète de se faire accompagner pour le financement des budgets de 2022 et 2023 et la manière de mener à bon port les réformes promises et convenues avec le FMI concernant la levée des subventions et la privatisation de certaines entreprises publiques. Et d’un !…
Il y a un double discours, voire carrément opposé, entre le Gouvernement et le Président de la République. Comment expliquer le fait que le Gouvernement parle d’engagements vis-à-vis du Fonds monétaire international concernant les projets de réformes alors que Kaïs Saïed crie, haut et fort, qu’il ne sera point touché aux subventions et aux entreprises publiques.
Qui croire ? La Kasbah qui a négocié à Washington et a donné accord ou bien Carthage dont le Locataire qui doit apposer sa signature sur le document final avec le FMI ? Le message envoyé, ainsi, par l’Exécutif tunisien est trop négatif. Et de deux !
Et bien entendu, il y a la position de l’UGTT qui a fait monter l’escalade en réitérant ses positions immuables sur certains points qu’elle qualifie de lignes rouges dont notamment et justement les entreprises publiques et les subventions. Cette évolution nettement contradictoire avec les affirmations du Gouvernement est venue donner le coup de grâce à la Kasbah et à Carthage.
« Il y a un double discours, voire carrément opposé, entre le Gouvernement et le Président de la République »
Il faut dire que la Centrale syndicale n’a pas du tout apprécié, ces derniers temps, ce qu’elle qualifie « d’allégations voire de mensonges » de la part du Gouvernement et menace d’aller crescendo dans ses mouvements sociaux. Et de trois !
Et cerise sur le gâteau … les observateurs ne comprennent pas du tout l’absence du Président de la République de la scène nationale puisqu’il est allé participer à deux événements internationaux dont on attend l’impact : il s’agit de sa présence à Ryadh pour le Sommet arabo-chinois, une participation agrémentée par une « omra » !
Le second événement consiste en sa participation au Sommet Amérique-Afrique, agrémentée d’une visite culturelle à la Bibliothèque du Congrès où il a fait étalage, comme à l’accoutumée, de ses connaissances en matière d’histoire et de constitutions.
Il y a eu, également, cette séance d’entretiens avec le Secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken et qui a été une sorte de « dialogue de sourds ». D’un côté, le patron du Département fédéral parlait de décisions prises par le chef de l’Etat menaçant le processus démocratique et de la nécessité de retourner à l’approche participative et inclusive …
Note d’optimisme
De l’autre, le Président de la République « s’entêtait à défendre son projet et ses mesures exceptionnelles sans oublier la poursuite des attaques contre ses adversaires nationaux qu’il accuse de « mener des complots contre la patrie et de corruption », un comportement considéré comme étant contraire à toute déontologie puisqu’il est connu qu’un haut responsable, encore moins un chef d’Etat, ne dénigre pas ses compatriotes à l’étranger.
Et hormis toutes ces considérations conjoncturelles, les observateurs estiment que le maintien de la tenue des élections législatives est malvenu, en ces moments dans le sens où la Tunisie se trouve sur une pente glissante et incontrôlable, alors que ces élections sont marquées, de l’avis général, par une ambiance froide.
« Le Président de la République « s’entêtait à défendre son projet et ses mesures exceptionnelles sans oublier la poursuite des attaques contre ses adversaires nationaux »
Et dire que le chef de l’Etat n’a manifesté aucun intérêt au dossier tunisien devant le FMI, mais a affiché, par contre, une activité débordante avec des tournées et des bains de foule dont personne n’en voit l’utilité et le pourquoi…
Si l’on sait que le Parlement européen a décidé de ne pas procéder à l’observation du processus électoral, comme il l’a toujours fait, on a une idée supplémentaire sur la crédibilité desdites élections…
En tout état de cause et en attendant des informations crédibles et des déclarations de la part des responsables autorisés, nous préférons garder une note d’optimisme en vue de révélations autrement positives. Il y va de la sécurité et de la stabilité du pays…