L’économiste et ancien membre du conseil de la Banque centrale de Tunisie (BCT) Fethi Nouri considère que la déprogrammation de l’examen de la demande de la Tunisie lors de la réunion du conseil du fonds monétaire international (FMI) est une gifle pour le pays. Il explique que c’est la première fois que cela se réalise. C’est le plus grand camouflet reçu par la Tunisie, estime-t-il.
« On dirait qu’on nous a jeté le dossier à la figure, soutient Fethi Nouri. Ceux qui refusent l’accord avec le FMI doivent comprendre qu’on en a besoin pour que l’État assure les dépenses », dit-il dans le même contexte. Il rappelle qu’on ne sait pas encore comment préparer le budget 2023. Revenant sur la situation actuelle, l’intervenant sur les ondes de Shems FM, rappelle que l’économie tunisienne ne génère pas de croissance. De plus, l’endettement intérieur a atteint ses limites. On « ne peut donc pas continuer dans le même sillage ».
Revenant sur la concomitance entre la présence du président de la République tunisien Kaïs Saïed aux États-Unis et la décision du FMI, l’économiste affirme dans le même contexte, qu’il n’existe aucune relation. Car, affirme-t-il, « je ne crois pas que le FMI fasse de la politique ». L’intervenant rappelle qu’on ne connait pas les détails de l’engagement du gouvernement tunisien dont seules les grandes lignes ont été dévoilées.
« La délégation gouvernementale qui est allée négocier avec le FMI maitrise tous les détails. Sachant que les négociations avec le FMI ont duré 18 mois ». « Cette période est longue pour des négociations. Notamment en raison de l’instabilité de la situation politique. Mais aussi parce que toutes les parties participent à la prise de décision », affirme-t-il. « La déprogrammation de l’examen du dossier est une honte pour la Tunisie », regrette-t-il.
Fethi Nouri considère que plusieurs parties ont contribué à l’échec des négociations. Principalement, tous ceux qui ont refusé au su et au vu de tout le monde l’accord en question, y compris l’UGTT. Il pointe du doigt « des mains invisibles qui se cachent dernières la déprogrammation de l’examen du dossier de la Tunisie ». De ce fait, il est certain que le FMI n’a pas pris cette décision arbitrairement ». Et d’insister sur le fait « qu’il existe des forces qui veulent faire avorter la révolution ».
Pour une diplomatie économique
Fethi Nouri appelle le président de la République à valoriser ses actions diplomatique et sa récente visite officielle. En effet, il estime que le président de la République pourrait effectuer des déplacements avec des hommes d’affaires dans des pays qui pourraient aider la Tunisie, dans le cadre d’une diplomatie économique.
« Dire que nous n’avons pas besoin du FMI est un ancien discours idéologique. Surtout que la mondialisation a été imposée à tous les pays du monde », lance-t-il. D’ailleurs, le FMI n’impose rien pour lui. « Nous n’allons pas attendre le FMI pour réformer le régime de subventions et les entreprises publiques. 2023 doit être l’année de la réforme de tous les systèmes production. C’en est assez de toucher au pouvoir d’achat des Tunisiens », souligne-t-il.
Il plaide pour la participation notamment de l’UGTT et d’experts. « Le président ne peut pas continuer à gérer le pays par des décrets, car l’économie ne se décrète pas », insiste-t-il.
Enfin, il pointe du doigt un problème de communication. Tout en affirmant que les raisons de la déprogrammation de l’examen de la demande de la Tunisie ne sont pas connues, il avance quelques hypothèses : le conflit UGTT/Gouvernement; le discours de Kais Saïed; la non publication de la loi de finances 2023. Alors, Fethi Nouri conclut que cette déprogrammation ne signifie en aucun cas un retour à la case départ et ne touche pas à la crédibilité de la Tunisie. Et d’estimer qu’il s’agit de détails techniques qui nécessitent de revoir le dossier présenté par la Tunisie.