Après douze ans de « printemps tunisien », devenu certainement un cas d’école pour les futurs chercheurs en histoire ou en sociologie politique, les faits sont là. Et ils prouvent que la Tunisie a gravement régressée sur tous les plans. En effectuant un bond en arrière qu’elle mettra plus d’une décennie à dépasser pour réatteindre les niveaux qu’elle avait en 2010, à l’époque de Ben Ali. Notamment sur le plan économique où pendant vingt ans elle faisait une moyenne de plus de 5 % de croissance; et sur le plan social où le revenu moyen du tunisien atteignait plus de 4000 dollars par an et par citoyen.
Il y avait un parlement à deux chambres, des institutions stables et au service du pays Et surtout un gouvernement de compétence qui non seulement en quelques années avait réussi à sortir du PAS, plan d’ajustement structurel; mais aussi à mettre tout le pays au travail en sauvegardant la paix sociale grâce à un pacte entre l’Etat et les partenaires sociaux. La Tunisie était sur le point de devenir un dragon, du moins africain, n’aurait-été le fameux coup d’Etat contre Ben Ali, maquillé en « révolution » en ce 14 Janvier 2011.
Ben Ali l’incarnation du mal?
Les nouveaux maîtres du pays après le putsch savaient que Ben Ali, retenu à l’étranger avait encore une certaine popularité. Mais que les destouriens, constituaient encore plus un danger pour eux et qu’il fallait « extirper ». A l’instar de ce qui a été fait pour le parti Bath iraquien par les Américains, par la dissolution de leur parti historique (le plus vieux de la région, puisque crée en 1920). Et par une inquisition politique féroce, en envoyant une partie des cadres de l’Etat et du RCD en prison. Tout en décrétant le bannissement des destouriens qui comptaient encore quelques centaines de milliers et leur mise à l’écart de toutes activités politiques. Et ceci par une entité créée de toute pièce, appelée pompeusement Comité de défense de la révolution. Lequel rassemblait un ramassis de pseudo-révolutionnaires, composé de tous ceux qui vouaient une haine féroce à l’Etat post-indépendance. Des « listes de la honte » ont été établies (plus de 70 000 cadres).
On préparait à l’évidence la prise du pouvoir par les islamistes, par les urnes. Sachant très bien, qu’empêcher la seule force politique qui pouvait les battre, dans des élections démocratiques et transparentes, était le seul moyen de leur permettre de prendre le contrôle du pays. Chose faite lors du scandaleux scrutin d’une supposée constituante. Où l’écrasante partie de la classe politique d’alors fût empêchée par un décret scélérat de se présenter. Drôle de démocratie! Malgré tout ça, ils étaient obligés de trafiquer les élections d’une prétendue constituante, qui a permis de faire passer la constituante de Feltman, le même qui rédigea la constitution irakienne.
Pour faire avaler la couleuvre au peuple, il fallait diaboliser à outrance Ben Ali et les hommes d’Etat, militaires, hauts cadres de l’État, ministres, Pdg, directeurs généraux, directeurs. Ceux qui ont essayé d’échapper à la prison furent tout simplement licenciés ou limogés. Tous étaient coupables d’avoir servi l’Etat sous Ben Ali et bien avant sous Bourguiba. On a tout simplement décapité l’Etat tunisien.
Laissons aux historiens la délicate mission de faire le bilan objectif de l’ère Ben Ali. Mais les résultats et les chiffres ne trichent pas! Ce sont mêmes les sponsors et leurs médias, du « printemps arabe et particulièrement tunisien » qui l’affirment. En effet, ils relèvent que « la Tunisie avant 2011 était meilleure que l’actuelle Tunisie », dixit Emanuel Macron.
Qu’il y ait eu une révolution ou un coup d’État, c’est du pareil au même. Le pays est en faillite, qu’on lui prête de l’argent ou pas et une révolte générale pointe du nez. Les signes avant coureurs sont là. Contrairement à ce que nous tentent de faire avaler les médias et les hommes politiques américains, ce n’est pas Kaïes Saïed qui est le principal responsable de ce désastre. Mais c’est toute la classe politique, issue et enfantée par leur modèle « démocratique » qui a provoqué cette descente aux enfers.
Si l’on veut tirer la principale conclusion, il est évident de donner raison à Ben Ali, comme on a donné raison à Bourguiba! On ne peut pas glorifier Bourguiba et diaboliser Ben Ali qui n’était que son digne successeur. Il faut commencer par là en réhabilitant Ben Ali comme le second Président de la République Tunisienne. De même qu’annuler tous les verdicts prononcés par les tribunaux que les pays occidentaux eux-mêmes ont considérés comme partiaux. Ainsi que ceux qui ont frappé les hommes politiques ayant travaillé sous ses ordres et ouvrir un débat sur comment réunifier la Nation.
Car il n’y aura pas de conciliation possible sans passer par cette étape. Le pays en a eu la preuve. Bien sûr, il ne s’agit nullement de restaurer l’ancien régime; ni à travers son système politique, ni à travers une récupération de ses hommes. Ces hommes n’étaient efficaces que dans le cadre d’un système qui est définitivement mort. Seuls les opportunistes peuvent prétendre le contraire. Par contre ces compétences peuvent servir à nouveau dans un système à créer. Et c’est possible car l’actuel est mourant.
Ben Ali n’était ni un diable, ni un ange, c’était juste un homme d’Etat qui avait ses réussites et ses ratages; notamment en matière de démocratie et des droits de l’Homme. Comme Bourguiba. En tout cas, l’écrasante majorité du peuple le croit. C’est pour cela qu’aucun sondage de son vivant et après sa destitution, sur sa popularité n’a été publié. Pourtant, ils ont eu lieu et au fur et à mesure que la grande tromperie de « la révolution » est mise à nu, sa popularité allait en grandissant. Bien sûr comme ex-président et non pas comme possible candidat à la Présidence. Maintenant il est entre les mains de la justice divine. La justice des hommes, quant à elle, peut déjà décider du rapatriement de sa dépouille. Il y va de l’honneur d’un pays.
Ce que BCE n’a pas fait, KS peut le faire
Tout d’abord KS a osé faire le coup de force du 25 juillet 2021 et nous débarrasser définitivement des islamistes au pouvoir et de leur système. Ensuite KS n’avait aussi aucun contentieux ni même antécédent avec le pouvoir de l’époque et encore moins avec ses ministres. Il donnait des conférences chez les cellules destouriennes.
Contrairement à BCE, qui tout en ayant servi Ben Ali, il lui vouait une haine sans limite. En plus BCE se servait de l’affaire Ben Ali à des fins politiques et mercantiles. L’on sait ce qu’il a fait concernant les hommes d’affaires à qui il avait promis de faire voter une loi d’amnistie.
KS n’a pas ces problèmes et comprendra tôt ou tard que sans ces hommes d’affaires, et leur adhésion, jamais il ne pourra relever les défis économiques qui se posent au pays. Enfin une nouvelle carte à jouer pour desserrer l’étau politique qui se resserre autour de lui chaque jour que Dieu fait. Cela ne l’empêchera nullement de sévir contre les vrais corrompus qui ont sauvé leurs têtes depuis le début en soudoyant qui vous savez! Cela demande seulement beaucoup de courage politique et un ou deux décrets. La popularité d’un tel acte est garantie et cela rapporte gros!
Bien sûr tous les opportunistes et ceux qui se sont enrichis de cette « révolution » vont s’opposer à une telle initiative et vont la combattre farouchement. Parce qu’elle va mettre fin à leurs intérêts politiques. Mais la résorption des conflits politiques passés exige de tourner la page du passé proche pour reconstruire une unité nationale à jamais perdue. De toute façon cette unité se fera un jour au détriment de ses détracteurs. Les partis politiques qui ne peuvent qu’y êtres hostiles, sont déjà hors coup. Le système bâti sur la constitution de 2014 est déjà mort et sans lui l’islam politique compte pour du beurre. La carte Bourguiba a servi BCE, à qui va servir la carte Ben Ali?