L’année 2023 a commencé avec la perspective d’une forte mobilisation sociale en France en raison de l’insistance du président Emmanuel Macron à vouloir faire approuver, d’ici le mois de juillet, une réforme des retraites visant à relever l’âge minimum de départ à la retraite de 62 ans actuellement à 64 ans ou 65 ans.
Les détails du projet de loi seront présentés la semaine prochaine, le 10. Mais cette réforme impopulaire, rejetée par les deux tiers de la population, selon le dernier sondage Ifop du 2 janvier pour Politis, mais aussi par l’ensemble des syndicats ouvriers du pays, montre une usure importante du Macronisme face à l’opinion publique et signale des mois de protestations à venir.
Des groupes de gilets jaunes sont retournés dans la rue ce samedi pour protester contre le projet, l’augmentation des coûts de l’énergie et des carburants et l’inflation, ainsi que l’absence de vote parlementaire sur l’approbation du budget 2023. Mais personne ne sait si le mouvement va se renforcer comme il l’a fait en 2018, lorsqu’il a émergé, motivé à l’époque par la hausse des prix du carburant.
Il existe également des pages Facebook avec des appels à des marches à Paris et dans d’autres villes françaises. Une autre manifestation, de l’opposition de gauche et des organisations étudiantes, est déjà prévue le 21 janvier.
Selon les analystes, le rejet massif de la réforme de la Sécurité sociale par les Français a de multiples raisons : les conditions de vie sont plus difficiles avec le retour de l’inflation, les salaires stagnent, la guerre en Ukraine pèse sur le moral des citoyens et les Français constatent au quotidien une dégradation des services publics.
Le gouvernement tente de convaincre en faisant appel aux femmes
Les autorités affirment également que la réforme est indispensable pour rendre justice aux femmes, qui ne verraient plus le temps pris en congé utilisé pour s’occuper des enfants déduit de leur temps de contribution. Mais selon les experts, la plus grande injustice, que la réforme ne corrige pas, est que les retraites versées aux femmes sont inférieures de 40 % à celles des hommes, en raison d’inégalités salariales chroniques tout au long de leur carrière.
Autre facteur de résistance, il existe déjà une réforme récente, entrée en vigueur en 2020, augmentant progressivement la durée de cotisation pour qu’une personne ait droit à une retraite à taux plein. Le calendrier d’application de cette réforme, approuvé sous la présidence du socialiste François Hollande, en 2014, oblige déjà ceux qui sont actuellement sur le marché à travailler jusqu’à 65-67 ans s’ils veulent obtenir le bénéfice de la retraite à taux plein. En 2035, 43 ans de durée minimale de cotisation seront exigés.
Vif débat dans les médias
Lors des négociations, menées par la Première ministre Élisabeth Borne, les centrales syndicales ont tenté de garantir la continuité des avantages pour ceux qui ont commencé à travailler tôt, avant l’âge de 20 ans, et pour 15 catégories qui bénéficient de régimes spéciaux de retraite. Le projet de Macron supprime les régimes spéciaux, mais promet de prendre en compte les carrières longues et de maintenir des avantages pour certains critères de dangerosité. Les enseignants et les travailleurs du secteur nucléaire perdraient des avantages.
En ce moment, il y a un débat intense dans les médias et la société sur la nécessité ou non de mener à bien cette réforme. De nombreux spécialistes disent qu’il suffirait d’augmenter légèrement la cotisation sociale pour tous, quelque chose autour de 4 € par mois, pour que le risque de déficit et de déséquilibre des comptes soit résolu.
Mais E. Macron mise sur la victoire par l’usure, estimant que les ouvriers, avec la vie chère, ne pourront pas renoncer à plusieurs jours de salaire pour faire grève. Pour le président, ce qui est en jeu, c’est son image de réformateur. Et c’est l’atout politique qu’il veut laisser en héritage au bout de deux mandats.