On se perd en conjectures à l’endroit de la grève des 25 et 26 janvier 2023 décidée par la Fédération des transports de l’UGTT. Les négociations qui se tiennent à un moment où les relations entre le gouvernement et l’UGTT sont loin d’être au beau fixe.
Le ministère du transport et la Fédération du transport de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) savent que cette grève est d’une grande ampleur et qu’elle comporte nombre d’enjeux et de défis. Dans le cas où elle pourrait avoir lieu, elle pourrait paralyser pour un temps une bonne partie des activités économiques dans le pays. Il y a, ici, évidemment des intérêts à ne pas négliger.
Résoudre la crise ?
Autant dire que chacune des parties en présence ne veut pas paraître vouloir être perçue comme ayant été celui qui n’a rien fait pour qu’elle n’ait pas lieu. Et devra tout faire pour bien négocier ce rendez-vous à commencer par adopter une attitude qui, et malgré les discours jusqu’à condescendants, laisse toujours une place à la résolution de la crise.
Le problème est cependant que ces négociations se déroulent alors que le climat qui prévaut entre l’UGTT et le gouvernement n’est pas des plus cordiaux. Tout le monde sait, à ce juste propos, que les faits et gestes des deux parties ont créé, selon les uns et les autres, une tension du reste largement perceptible.
La décision de la grève est-elle en relation avec le FMI
Autre élément à prendre en considération : l’objet de la grève. Il ne s’agit pas, en toute apparence, de revendications salariales. Mais de revendication quant à ce qu’on peut appeler la pérennité du secteur du transport. Un secteur qui traverse, aux yeux de l’UGTT, une vraie crise et qui doit être sauvé.
On comprend dès lors que des questions de fond comme ce que veut faire le gouvernent des transports, dont leur privatisation, ne pourrait qu’être évoquée. Ce qui veut dire que la principale centrale va amener le gouvernement sur le terrain sur lequel elle veut porter une partie du débat ; ceux des choix gouvernementaux. En partie en relation avec les engagements à l’égard du Fonds Monétaire International (FMI).
« Adolescence politique »
Certains observateurs prétendent même que ce climat rappelle celui qui prévalait la veille du jeudi noir du 26 janvier 1978. Et font remarquer que le choix d’organiser une grève un 26 janvier et un jeudi est peut-être une preuve que l’heure est grave.
Quoi qu’il en soit, la principale centrale syndicale du pays réagit assez fortement à l’égard d’un gouvernement jugé incompétent et irresponsable (Noureddine Taboubi n’a-t-il pas parlé d’ « adolescence politique » ?) qui ne veut pas jouer le jeu de la transparence en refusant d’associer les partenaires sociaux à ses choix et de cacher ses programmes.
« Il enfreint le droit syndical »
Pis encore, selon l’UGTT, le gouvernement semble vouloir manœuvrer. Pour se rendre compte de cela, il suffit de jeter un œil à la dernière édition de l’hebdomadaire « Achaab », organe de la principale centrale syndicale du pays.
Ainsi, la première page du n° 1730 d’ « Achaab » du 19 janvier 2023 comporte un titre d’un article consacré aux réunions syndicales tenues dans six régions et qui en dit long sur les griefs adressés au gouvernement Bouden : « Il a enfreint le droit syndical par la circulaire n° 21 et a tergiversé à l’endroit de l’application des accords du 6 février et du 15 septembre ».
« Une fuite en avant »
Et l’article en question, publié en page 5 du même numéro, reproche (le mot est sans doute faible) à Najla Bouden d’avoir reçu le dirigeant de l’Union des Travailleurs de Tunisie (UTT), le 11 janvier 2023, sans le nommer, mais en le qualifiant d’ « homme du passé ». Et estimant que la cheffe du gouvernement a souhaité par cette audience porter atteinte à l’ « image de l’UGTT ».
En tout cas pour les négociations sur la grève des 25 et 26 janvier 2023, l’UGTT accuse le gouvernement d’ « une fuite en avant » et dit qu’il « entrave le droit syndical » et a déjà, à ce niveau, demandé aux employés du secteur du transport de refuser les avis de réquisition.