La scène est terrifiante. Des Syriens, hommes, femmes et enfants, assis sur un trottoir. Ils ont la chance d’avoir échappé à la mort massive qui émergeait des entrailles de la Terre, en ce lundi fatidique du 6 février 2023. Mais ils ont aussi le malheur d’avoir tout perdu en un rien de temps. La caméra de télévision les montre assis, l’air hébété. Qui va les nourrir? Comment vont-ils se protéger des morsures du froid? Où vont-ils passe la nuit? Nul n’a la moindre idée.
En Syrie, selon les services de l’ONU, ils sont cinq millions dans ce cas. Cinq millions d’êtres humains ont besoin d’abris, de nourriture, de soins, de médicaments. Le reste de la population syrienne est à peine mieux lotie. La Syrie ressemble à cette mère agonisante où s’agglutinent autour d’elle des enfants ne sachant trop que faire.
Les douleurs qui continuent d’être infligées au peuple syrien sont insoutenables. Aux destructions de douze ans de guerre se sont ajoutés les dégâts terrifiants du violent séisme.
Les ruines du drame causé par l’Homme se sont mélangées avec les ruines du drame causé par la Nature.
De sorte que nul aujourd’hui ne puisse les différencier. Avant le 6 février, l’Etat syrien avait toutes les difficultés du monde de faire face aux conséquences de la guerre. Aujourd’hui, il se trouve dans l’incapacité absolue de gérer les conséquences de deux désastres et appelle tous les pays, amis et ennemis, à l’aide.
Pourtant, avant les déchainements haineux destructeurs des grandes puissances, la Syrie, sans être un paradis, assurait plus que le minimum à ses habitants en termes de revenus, d’éducation, de santé et de sécurité. La Syrie non seulement nourrissait, éduquait et soignait ses habitants, mais exportait ses surplus de produits agricoles, pharmaceutiques, énergétiques et autres.
Aujourd’hui, et cela dure depuis des années, le nord-ouest de la Syrie, où se trouvent les terres les plus fertiles et les plus grands gisements de pétrole et de gaz, est occupé par les forces américaines. Le blé est accaparé par les oppositions hétéroclites syriennes. Et l’énergie est exploitée par les sociétés pétrolières multinationales, les unes et les autres étant protégées par l’armée américaine.
Mais les Etats-Unis ne se contentent pas de priver la Syrie d’une bonne partie de son territoire, vitale pour la nourriture et les besoins énergétiques du peuple syrien. Ils imposent aussi des sanctions paralysantes qui privent le pays de toute possibilité d’importation, d’exportation et de toute transaction financière avec le système bancaire international.
Les sanctions sont si strictes, si impitoyables que même un simple citoyen syrien vivant à l’étranger ne peut envoyer une somme d’argent, aussi minime soit-elle, à sa famille ou à ses amis pour les aider à survivre.
Ces sanctions, soit dit en passant, n’ont pas été décidées par le Conseil de sécurité de l’ONU ou un quelconque organisme international approprié. Mais par le sénat américain qui s’arroge le droit de légiférer non seulement pour l’Amérique; mais aussi pour tout autre pays qui n’est pas en odeur de sainteté à Washington.
Ce n’est pas parce qu’ils ont reçu un mandat international de sanctionner des pays comme l’Irak, la Syrie, la Libye ou le Venezuela. Mais parce qu’il ont les moyens militaires et la puissance politique d’imposer des sanctions et de forcer les autres pays à les respecter. Qu’appelle-t-on cela sinon la loi de la jungle?
Pas d’empathie des USA qui veulent juste échapper aux accusations
Quatre jours après le séisme destructeur, Washington a décidé de suspendre les sanctions pour une durée de six mois. Certainement pas par empathie envers le peuple syrien, mais pour échapper aux accusations de « grande puissance inhumaine et immorale » lancées des quatre coins du monde contre les Etats-Unis.
En Grande Bretagne, le ridicule ne tue pas mais continue de couvrir des dirigeants qui, vis-à-vis des Etats-Unis, appliquent obséquieusement la devise « plus royaliste que le roi ». Près d’une semaine après le séisme dévastateur, 10 Downing Street annonce le plus sérieusement du monde que « le gouvernement britannique, avant de lever les sanctions sur la Syrie, est en train de voir si elles entravent réellement les secours humanitaires » !!!
Il y a un fabuleux élan de solidarité qui s’est manifesté envers les millions de victimes du séisme. De nombreux pays arabes et amis de la Syrie ont volé au secours du peuple syrien sans attendre les décisions de Washington ou de Londres. Mais, comme dans toute catastrophe naturelle d’envergure, les besoins sont incomparablement plus grands que les efforts d’aide internationale, aussi généreux soient-ils.
Pourvu que ces élans de solidarité internationale se poursuivent. La Syrie mettra sans doute des années pour surmonter les dégâts causés par les catastrophes d’origine humaine et d’origine naturelle. Car, l’empathie et la solidarité sont plus fortes que l’indifférence et l’agressivité anglosaxonnes. Car la détermination et la persévérance humaines ont toujours su maitriser la fureur de la Nature.