CIL et BH Leasing viennent de lancer des appels à candidatures pour des administrateurs indépendants et d’autres représentant les actionnaires minoritaires. Un processus loin d’être simple depuis la révision du cadre réglementaire en la matière l’année dernière.
L’indépendance des conseils est devenue une question prioritaire pour les investisseurs. C’est un proxy de bonne gouvernance car les administrateurs indépendants sont censés améliorer la qualité de la prise de la décision. Pour que cela puisse être atteint, il faut recruter de vrais indépendants.
Historiquement loin des normes internationales, la Tunisie a connu une nette amélioration grâce à la révision du cadre de la gouvernance des établissements de crédit avec la promulgation de la circulaire 2021-05 par la BCT. Ce texte de 71 articles a particulièrement touché le fonctionnement des conseils d’administration et de surveillance.
Les critères de sélection des administrateurs
Pour être considéré comme indépendant, un candidat intéressé doit être une personne :
– Ne détenant pas lui-même, son conjoint, ses ascendants et descendants de premier degré, une participation directe ou indirecte dans le capital de l’établissement ;
– N’ayant pas occupé la fonction de dirigeant ou n’ayant pas été un membre dans l’organe d’administration de cet établissement au moins au cours des cinq dernières années précédant sa désignation en qualité de membre indépendant dans l’établissement;
– N’étant pas membre de l’organe d’administration ou de l’organe de direction d’une entité ayant des liens avec l’établissement au moins au cours des cinq dernières années précédant sa désignation dans l’établissement;
– N’ayant pas fait partie des salariés de l’établissement au moins au cours des trois dernières années précédant sa désignation en qualité de membre indépendant dans l’établissement;
– N’agissant pas pour le compte d’un client, d’un fournisseur ou d’un prestataire de service significatif de l’établissement;
– N’ayant pas des contrats de prestations conclus directement par lui-même ou par personne interposée avec l’établissement ou avec l’une des sociétés ayant des liens avec l’établissement;
– N’occupant pas une responsabilité partisane à l’échelle centrale, régionale ou locale.
Par ailleurs, avoir des liens avec l’établissement concerne :
– Tout actionnaire dont la participation excède, directement ou indirectement, 5 % du capital de la banque ou de l’établissement;
– Tout conjoint, ascendant et descendant d’une personne physique dont la participation excède, directement ou indirectement, 5 % du capital de la banque ou de l’établissement;
– Toute entreprise dans laquelle la banque ou l’établissement détient une participation au capital dont la proportion est telle qu’elle conduit à la contrôler ou à influer de manière déterminante sur son activité;
– Le président du conseil d’administration d’une banque ou d’un établissement financier, le directeur général, les membres du conseil d’administration, les directeurs généraux adjoints, les membres du conseil de surveillance, les membres du directoire, les membres du comité de contrôle de conformité des normes bancaires islamiques et les commissaires aux comptes ainsi que les conjoints des personnes susvisées, leurs ascendants et descendants;
– Toute entreprise dont l’une des personnes visées ci-dessus est propriétaire ou associée ou mandataire délégué ou dans laquelle elle est directeur ou membre de son conseil d’administration ou de son directoire ou de son conseil de surveillance.
La vérification du respect de l’ensemble de ces critères est effectuée annuellement par le comité de nomination et de rémunération de l’établissement.
Bien gouverner c’est protéger le secteur financier
Regardant l’ensemble des critères, nous pouvons confirmer que la BCT a traité en profondeur la question de l’indépendance des membres des organes de direction des établissements de crédit. Nous sommes désormais en ligne avec les exigences de la bonne gouvernance appliquées par les plus grandes banques internationales.
Nous pensons qu’il ne manquait qu’une limitation concernant le nombre de mandats. En fait, certains administrateurs pourraient respecter minutieusement la grille des critères, mais ils peuvent également être très occupés par un nombre élevé de mandats dans plusieurs sociétés de différents secteurs. Un administrateur doit consacrer suffisamment de temps pour accomplir convenablement sa mission dans l’établissement de crédit qui est généralement plus lourde comparativement aux autres activités économiques.
Le nouveau cadre de gouvernance cherche également à fixer le niveau de prise de risque par les établissements financiers. Les dirigeants sont étroitement contrôlés par le comité des risques. Les missions de cet organe ont été bien définies par la circulaire, en particulier celles de la conception et la mise à jour de la politique de gestion des risques, la fixation des limites d’exposition et des plafonds opérationnels, l’approbation des systèmes de mesure et de surveillance des risques et le contrôle du respect de la politique d’appétence pour le risque. Les administrateurs indépendants siègent généralement dans ce comité clé.
La bonne application de tous ces principes permettra aux banques d’éviter les dérives. Pour le cas de la Tunisie, c’est primordial. Rares sont les actionnaires des banques qui ont les moyens pour recapitaliser immédiatement en cas de dépression. Pour protéger le secteur, et derrière toute l’économie, l’approche doit être basée sur la gestion des risques pour éviter les mauvaises surprises.