Ce courant de pensée qui est apparu à la fin du Moyen Age en Italie, se développe depuis lors, en Europe. Il tire ses méthodes et sa philosophie de l’étude des textes antiques.
Les humanistes placent l’homme et les valeurs humaines au centre de leurs réflexions. Leur meilleur avocat aurait été le philosophe socialiste américain, Corliss Lamont (1902-1995) qui le définit comme une ‘‘philosophie naturelle qui rejette tout recours au surnaturel et se base principalement sur la science et la raison, la démocratie et la compassion’’.
Les humanistes veulent tout savoir, tout connaître. Ils portent un intérêt pour les auteurs anciens. Pour eux, la connaissance des auteurs de l’Antiquité est indispensable et c’est pourquoi ils montrent un intérêt renouvelé pour les œuvres de la littérature grecque et latine. Ils portent un regard neuf et critique sur les auteurs connus comme Aristote, mais redécouvrent aussi des auteurs oubliés comme Cicéron, Lucrèce, Sénèque et tous les auteurs grecs. L’humanisme moderne est donc le produit du développement cumulatif et de l’adaptation d’un courant de pensée particulier de la renaissance à nos jours.
D’autre part, l’économiste Robert H. Frank propose une explication de l’altruisme humaniste, présumé ‘‘irrationnel’’, celui qui va bien dans les sociétés saines (où les profiteurs restent une minorité[2]). Il affirme que la pratique des valeurs altruistes procure des avantages (de survie et de reproduction) qui dépassent le coût des efforts encourus. Il y a certes un avantage à construire une réputation d’intégrité, de générosité, de respect de la parole donnée.
Frank démontre, en outre, que de tels avantages sont maximisés par l’intériorisation complète de ces valeurs. Ainsi, la personne qui est devenue « inconsciente » de sa générosité, de son empathie et d’autres traits reconnus généralement comme des vertus, n’a pas à se préoccuper de sa réputation. Il est exact que cette explication vaut aussi bien pour les croyants que pour les athées ; mais elle contredit Dostoïevski qui affirme que pour vivre une bonne vie, en société, mieux vaut ne pas s’imaginer que tout est permis.
En cela les humanistes athées ne sont pas fondamentalement différents du reste de l’humanité. Le siècle des Lumières reprend et développe l’héritage de l’humanisme.
Il le soumet au rationalisme d’un Descartes, d’un Leibniz, d’un Spinoza ou d’un Newton. Il s’organise autour d’une doctrine philosophique générale que la Révolution de 1789 va à la fois reprendre et schématiser.
Dans son livre, Humanisme moderne, nouvelle orientation pour un avenir meilleur (Arabesque, 2022), Fawzia Hachaichi Trimeche présente la définition de Jacques Derrida de l’humanisme moderne. Il inscrit le concept du ‘‘vivre ensemble, dans la dignité’’. Mme Trimeche fait valoir ‘‘la jonction entre les deux concepts, le vivre ensemble et l’hospitalité, pour jouer un rôle de ciment à une nouvelle humanité, fondée sur le partage et l’amitié, conditions nécessaires, pour une paix internationale perpétuelle’’ (p.9).
L’auteur estime que c’est au XVIIIe siècle que l’humanisme acquiert la modernité. Le renouveau culturel qu’il vit désormais, sera ‘‘fondé sur de nouvelles valeurs, comme la liberté, la tolérance, l’ouverture, le dialogue et le respect de l’autre’’ (p.13).
Tout en rappelant l’influence des auteurs grecs (Socrate, Platon et Aristote), l’auteur étudie la pensée socio-philosophique, en accordant la priorité à l’école allemande. Ainsi, l’analyse de la pensée de Goethe et de Kant, lui permet d’examiner la nouvelle définition de la pensée moderne et d’annoncer l’ère des Lumières (p.29 et suivante).
Par la suite, l’auteur analyse la relation entre l’individu et la société, la problématique des conflits et le rôle de la religion, comme forme du vécu social. Elle fait valoir la portée de la culture asiatique, du mouvement culturel musulman et le contexte culturel de la société tunisienne, tout en citant les penseurs tunisiens contemporains.
Dans son analyse, Fawzia Hachaichi Trimeche montre que l’homme devient une fin en soi, dans l’humanisme moderne et fait valoir les conditions du vivre-ensemble.