Le 20 mars, c’est un jour qui ne ressemble à aucun autre. En ce lundi, nous célébrons 67 ans d’indépendance de la Tunisie. La Tunisie a vécu plus de 75 ans de protectorat français suite au traité du Bardo du 12 mai 1881.
Au delà de l’histoire de la Tunisie, et de l’ère de Bourguiba que nous avons acquis, la question essentielle d’aujourd’hui, que représente le 20 Mars pour les Tunisiens? Quelle analyse peut-on faire?
Sami Jallouli Juriste senior, politologue et consultant en image politique livre son point de vue dans une déclaration à leconomistemaghrebin.com: « Depuis quelques années, la fête de l’indépendance n’a plus la même saveur. Nous n’organisons presque plus de rassemblements, de défilés, de concerts et de feux d’artifice… On ne voit plus la fête dans les rues comme avant. Pourquoi la Fête de l’Indépendance Nationale a-t-elle été ignorée ? Il est clair que cela est dû à des raisons purement politiques. »
Et de poursuivre: « Certains estiment que cette fête ne fait pas consensus en raison de leur désaccord sur les mécanismes qui ont été adoptés pour obtenir l’indépendance nationale. D’autres, voient que la souveraineté est incomplète et remettent en question la Déclaration de l’indépendance elle-même, alors pourquoi devrions-nous célébrer ? »
Sami Jallouli: « Il faut redonner au 20 mars son éclat festif »
Avant d’ajouter: « Depuis des années – on peut même dire depuis 2011 – nous constatons que la polémique et le débat reviennent à chaque anniversaire de l’indépendance et ne cessent de gagner du terrain. Les citoyens cherchent des explications, des clarifications, et ils ont droit à des réponses convaincantes, complètes et définitives. Aujourd’hui, le pouvoir doit lever toute ambiguïté et répondre aux questions légitimes que se posent les gens. Il doit informer les gens de ce qui se passe et clarifier les choses. Les gens ont besoin de croire en la profondeur de l’indépendance pour qu’elle soit célébrée de manière honorable. Il faut redonner au 20 mars son éclat festif. Notre pays a besoin de joie, d’espoir et d’un avenir meilleur. »
Elyes Kasri: « inaugurer une nouvelle ère porteuse d’espoir et de prospérité »
De son côté, Elyes Kasri, analyste politique et ancien ambassadeur, dresse un état des lieux du soixante septième anniversaire de l’indépendance de la Tunisie qui survient dans une atmosphère empreinte d’incertitudes croissantes sur la souveraineté et l’avenir de la Tunisie.
Il précise via son post: « Au lieu d’inaugurer une nouvelle ère porteuse d’espoir et de prospérité, la révolution de la liberté de la dignité s’est avérée un véritable antonyme et s’est limitée à l’aspect physique de la révolution à savoir la rotation complète d’un corps mobile autour de son axe pour nous ramener à une atmosphère qui rappelle tragiquement la période précoloniale de faiblesse de l’Etat, d’effondrement des finances publiques, de fiscalité impopulaire et de concurrence des puissances étrangères notamment à travers la commission financière internationale (1869) pour prendre le contrôle de la Tunisie et la soumettre à la domination étrangère (1881). »
20 Mars un jour pas comme les autres
En plus, Elyes Kasri rappelle de son parcours professionnel en tant qu’ambassadeur tunisien au Japon qui, en diffusant une séquence sur la célébration, le 20 mars 2013 par l’ambassade de Tunisie à Tokyo qu’il dirigeait, de la fête de l’indépendance tunisienne dans la ville japonaise d’Ishinomaki, dévastée par le tsunami du 11 mars 2011, par un festival culturel et gastronomique qui avait suscité un profond respect chez les autorités et citoyens japonais. Alors que le journal télévisé (Watanya 1) avait omis de mentionner la fête de l’indépendance pour la qualifier de célébration de la journée de l’habit traditionnel. Ce qui l’a conduit à quitter définitivement Tokyo dix jours plus tard.
Toutefois, il mentionne que « Certains politiciens et hauts responsables prétendument tunisiens se sont évertués depuis 2011 à remettre en question l’indépendance nationale sous divers prétextes aussi fallacieux les uns que les autres.
Avoir honte de célébrer l’indépendance nationale pourrait être un indice du rejet de cette indépendance et une nostalgie de la domination étrangère. »
Et comme disait un vieux proverbe qui recommande de faire attention à ses vœux car ils pourraient être exaucés.
Qui est responsable du désarroi de nos jeunes d’aujourd’hui et de demain?
Par ailleurs, Khadija Moalla, juriste et expert international met l’accent sur l’importance des jeunes pour voir si nos trois générations ont été capables de faire passer cet amour pour la patrie dans le lait maternel ?La réponse était comme suit: « Les jeunes m’ont alors retourné la question : que veut dire patrie ? Que nous a donné cette patrie où nous ne trouvons pas de travail, où tout est cher, où nous n’avons pas de perspectives ni de projets de vie. Nous voyons nos amis, qui sont partis à l’étranger vivre mieux que nous, alors que nous qui avons fait le choix de rester, nous n’arrivons pas à joindre les deux bouts. »
En outre, elle ajoute: « Leur cri de détresse m’a assez secouée je l’avoue, non pas que j’ignore la réalité des pénuries, de la cherté de la vie, ni de l’inflation galopante… mais que cela les pousse à douter de leur appartenance à notre patrie, m’a profondément attristée. »
De ce fait, la seule question qui lui est venue à l’esprit : Qui est responsable ? Qui a tout fait pour nous faire oublier le 20 Mars, nos patriotes, nos martyrs… Qui est responsable du désarroi de nos jeunes d’aujourd’hui et de demain?
En conclusion, et malgré les difficultés passées et actuelles, nos acquis restent quand même nombreux. Et cela revient à nous citoyens de les préserver et de les renforcer.