Confronté à la pire crise de l’histoire du pays, le gouvernement de Najla Bouden qui a tout misé sur le « Programme national des réformes » pour parvenir à finaliser l’accord avec le FMI, risque de voir ses plans chamboulés pour au moins trois raisons, estime l’universitaire et économiste, Aram Belhadj.
«Premièrement, parce que l’accord avec le FMI, si accord il y aura, n’est pas pour bientôt alors qu’il n’y a pas d’alternatives à cet accord dans les circonstances actuelles, contrairement à ce qu’on essaye de faire croire. L’alternative ne peut exister que sur le moyen terme et le gouvernement en est bien conscient, d’autant plus que les besoins du pays en termes de financement budgétaire s’élèvent à plus de 25 milliards de dinars. Un gap que même les ressources provenant du tourisme, des transferts des tunisiens résidents à l’étranger et des exportations de l’huile d’olive ne peuvent couvrir » a expliqué Aram Belhadj.
«Deuxièmement, parce que même l’accord technique signé avec le FMI en octobre 2022, va devoir être totalement révisé, étant donné que les hypothèses et les équilibres retenus ont totalement changé depuis. Pire, le FMI pourrait exiger un nouveau programme et imposer le passage par le Club de Paris, si le gouvernement décide de maintenir les négociations» a-t-il encore souligné.
Le club de Paris est un groupe informel de créanciers publics dont le rôle est de trouver des solutions coordonnées et durables aux difficultés de paiement de pays endettés. «Troisièmement, parce que tous les efforts déployés par le gouvernement dans le cadre de son programme de réformes structurelles risquent d’être sapés, étant donné que les réformes en question (réforme du système de compensation, des entreprises et établissements publics, réforme fiscale…) ne pourraient pas être mises en œuvre, même partiellement, face à la grande divergence de visions avec le Président de la République » s’inquiète-t-il.
Rappel des faits
En effet, le Chef de l’Etat, Kais Saïed, en déplacement le 6 avril 2023, à Monastir, a dit rejeter tout « diktat » de l’étranger. Dans un discours prononcé, au Mausolée Habib Bourguiba, à l’occasion de la commémoration du 23e anniversaire du décès du leader Habib Bourguiba, il a souligné que « la Tunisie est un Etat indépendant souverain et ne peut recevoir des instructions de l’étranger ». Le pays dispose de plusieurs ressources pour faire face aux défis économiques et sociaux actuels, a-t-il déclaré, affirmant que le pays n’acceptera, en aucun cas, des diktats de l’étranger.
Rappelons que la Tunisie est parvenue à conclure un accord préliminaire avec le FMI depuis le 15 octobre 2022, en vue d’obtenir un prêt de 1,9 milliard de dollars, remboursable sur une période de 48 mois. Mais, le pays attend toujours l’approbation de cet accord par le Conseil d’administration du fonds.
La déprogrammation du dossier de la Tunisie de l’ordre du jour de son conseil d’administration réuni en janvier 2023 et sa non programmation depuis, a relancé les spéculations et les polémiques sur la capacité du pays à mener à bien ce dossier.
Avec TAP