Aux yeux de Kaïs Saïed, la véritable relance du secteur du phosphate, pour qu’il retrouve son rang d’antan de leader sur le marché mondial, pourrait renflouer une grande partie des caisses de l’État. Et surtout représenter une alternative aux emprunts auprès des institutions internationales.
Mieux vaut tard que jamais. Le président de la République, Kaïs Saied, s’est enfin penché sur les maux du secteur du phosphate et ses dérivés. A savoir l’un des importants vecteurs de l’économie tunisienne. Puisque ses recettes ne représentaient en 2010 pas moins que 10 % des revenus des exportations globales du pays.
D’ailleurs, on peut penser que lui avoir consacré une réunion du Conseil de sécurité nationale, une première depuis sa prise en charge de la magistrature suprême en 2019, démontre la prise de conscience présidentielle, même tardive, que ce secteur vital fait partie intégrante de la sécurité nationale.
Dégringolade
N’est-il pas triste de rappeler à cet égard que la Tunisie était le quatrième producteur mondial de phosphate. Sa production atteignant en effet environ 8,6 millions de tonnes en 2010. Et ce, avant de dégringoler en une seule décennie du 5ème au 12ème rang mondial. Loin derrière les Etats-Unis, la Chine, le Maroc la Jordanie et la Fédération de Russie. Alors, est-il envisageable que notre pays figure de nouveau au Top 5 des pays producteurs?
Une solution alternative
Affirmatif. Car, selon les experts, une fois rétabli sur des bases solides et ayant retrouvé sa position sur le marché mondial du phosphate et de ses dérivés ; il atteindrait un rythme de croisière de production annuelle de 6,5 millions de tonnes. D’ailleurs, les prévisions pour 2024 tablent sur 8 millions de tonnes et 12 millions en 2025.
Ce sont là des objectifs réalisables, à condition que toutes les unités fonctionnent à plein régime. Et à condition également de résoudre les problèmes liés au transport du phosphate. Ainsi, les revenus engendrés par ce précieux minerai donneraient une bouffée d’oxygène aux finances publiques. Et ce, en permettant à la Tunisie de se passer des emprunts auprès des institutions internationales.
D’autant plus que le chef de l’Etat, il y a environ trois semaines, a claqué avec éclat la porte au nez du Fonds monétaire international (FMI). Lequel conditionne l’octroi d’un prêt de 1,9 milliard de dollars à la Tunisie à des réformes économiques. Avec notamment la levée des subventions sur les carburants, la restructuration de certaines entreprises étatiques boiteuses et la réduction de la masse salariale. Un « diktat » rejeté par Carthage car susceptible « d’appauvrissement » du peuple et de « menace sur la paix sociale ».
De l’or sous nos pieds
A cet égard, la réunion du Haut conseil de sécurité nationale, mercredi 26 avril 2023 à Carthage, se consacrait à la relance de la production de phosphate à même de le ramener aux niveaux qui étaient les siens, au transport du phosphate par voie ferrée ; ainsi qu’à la corruption ayant entaché l’achat de wagons ne pouvant être utilisés sur les voies existantes.
Le président de la République a tenu à rappeler à juste titre qu’à l’image d’une Tunisie qui souffre de soif alors que l’eau coule sous ses ponts, le phosphate dont regorge notre sous-sol n’est pas exploité à bon escient. « Notre or est sous terre alors que le pays est confronté à une situation financière difficile. Cette situation ne peut pas perdurer, il faut y mettre un terme. Et ce, d’autant plus que le phosphate tunisien est l’un des meilleurs au monde », s’est-il écrié.
Et de marteler : « Les revenus engendrés par le phosphate peuvent renflouer une grande partie des caisses de l’État de quoi assurer le redressement de notre économie afin que nous ne soyons pas obligés d’emprunter de l’étranger ».
« Il est possible d’extraire dix millions de tonnes de phosphate par an ; surtout que plusieurs mines restent inexploitées ». Ainsi, concluait le chef de l’Etat.
Des objectifs irréalisables? Faut-il rappeler à cet égard et à titre de comparaison avec le Maroc, que le groupe OCP, anciennement Office chérifien des phosphates aux 18 000 collaborateurs et aux 350 clients à travers le monde et qui figure dans le Top 5 mondial des producteurs d’engrais phosphatés, avait réalisé en 2022 un chiffre d’affaires record de plus de 10 milliards d’euros.
Soit environ 33,4 milliards de dinars par an. Sachant que le budget de la Tunisie pour l’année 2023 s’élève à 53,9 milliards de dinars. Alors, à vos calculettes!