Jusqu’où, jusqu’à quand ces chocs à répétition ? Le pays n’est pas pleinement rétabli des soubresauts du Covid et de la guerre russo-ukrainienne que le voilà de nouveau secoué par un violent séisme, aux relents terroristes de triste mémoire.
Le ventre qui a fécondé ces nouveaux monstres est encore fécond. Ils ont osé frapper là où cela fait mal, sur les lieux mêmes – et comme en 2002 – de la plus ancienne synagogue africaine à Djerba. Le pays, aux prises avec d’immenses difficultés économiques et financières, n’avait pas besoin d’une telle opération, alors qu’il a la tête sous l’eau.
L’intention des industriels de la mort est sans équivoque : plonger le pays dans le chaos en lui coupant les vivres. En clair, assécher la manne touristique, souffler sur les braises de la contestation sociale et provoquer au final une grave crise politique. Peine perdue. Ni la population ni nos partenaires et alliés étrangers, pris pour cible pour exacerber les tensions, ne se sont laissé prendre au piège de la barbarie. Pas de prime pour les terroristes. Les forces vives de la nation, qui réprouvent et dénoncent la violence, ont fait bloc avec pour seul mot d’ordre : l’union sacrée. Dans l’adversité, seul compte l’intérêt suprême de la nation.
Ils ont osé frapper là où cela fait mal, sur les lieux mêmes de la plus ancienne synagogue africaine à Djerba
L’opération meurtrière de Djerba qui se voulait déstabilisatrice a fait ressortir notre force de résilience et notre attachement aux valeurs républicaines. Reste à prouver notre capacité d’enrayer les dégâts et les dommages collatéraux, voulus et recherchés par ce genre « d’opération ». Le choix du lieu et du moment est lourd de symbole et de signification. L’onde de choc résonne aux quatre coins de la planète et a un fort retentissement international, où se mêlent à la fois des considérations sécuritaires et géopolitiques. C’est tout le pays, à travers une image abîmée, qui est pris pour cible aux fins de le déstabiliser, de répandre le sentiment d’insécurité, de compromettre l’activité touristique qui revient à la vie, de faire fuir les investisseurs étrangers, de dissuader créanciers et bailleurs de fonds qui, il faut bien le dire, n’ont jamais paru aussi hésitants. Les difficultés économiques et financières aggravées par l’absence de visibilité politique sont passées par là.
« L’opération » de Djerba ne sera pas sans nuisance sur les flux des investissements et des capitaux. Il n’est pas sûr qu’elle provoquera un réel désastre, mais on aurait tort de ne pas appréhender ses répercussions et son impact sur l’attractivité du site national. Il faut être attentif aux moindres signes de changement. D’où la nécessité de vigilance et de réactivité, même s’il n’y a pas plus d’insécurité ici qu’ailleurs, fût-ce dans les démocraties mûres et abouties. La violence et l’insécurité n’ont pas de frontières. Le pays est sûr, la sécurité y est assurée. Les touristes et les investisseurs étrangers ne sont pas moins bien considérés que chez nos compétiteurs, dont on n’arrête pas de faire l’éloge.
Il n’empêche ! Le problème est qu’il ne suffit pas de s’en convaincre soi-même. Il faut porter haut et fort le message, le dire et le faire savoir avec maîtrise et subtilité, sans excès ni exagération, à travers un discours rénové, vrai et juste, démonstration à l’appui. Et en finir, au passage, avec cette effroyable idée incrustée dans notre conscience collective. Qui fait que nous voulons que les étrangers viennent investir chez nous, mais nous n’admettons pas qu’ils s’enrichissent. On ferait mieux de nous employer à améliorer en permanence le climat des affaires pour que les profits réalisés la veille par ces mêmes étrangers soient réinjectés dans le circuit d’investissement le lendemain. C’est la loi du genre.
Par Hédi Mechri