C’est le Centre international des études du sport (CIES) qui vient de nous l’indiquer : la Ligue 1 professionnelle tunisienne de football est celle qui a connu le plus de changements d’entraîneurs avec un pourcentage de 100 %. Impossible n’est pas tunisien ! Analyse.
L’information est passée inaperçue. Elle vaut pourtant le détour. Tant elle est symptomatique du vécu du football tunisien. Et même de nombre de secteurs du pays.
La voici : le Centre international des études du sport (CIES) vient de nous indiquer que la Ligue 1 professionnelle tunisienne de football est celle qui a connu le plus de changements d’entraîneurs avec un pourcentage de 100 %.
Installé à Neuchâtel (Suisse), le CIES est une institution partenaire de la Fédération internationale de football (FIFA) spécialisée dans la recherche, la formation et le consulting dans les sports. Certains diraient que Monsieur de La Palisse n’aurait pas dit autre chose. Tant cela s’observe, pour ainsi dire, à l’œil nu.
Pourquoi la Tunisie bat-t-elle ce «record» mondial? Tous ceux qui suivent de près notre football se rendent, d’abord, compte que cela s’explique par le fait que les dirigeants sportifs pratiquent la politique de l’autruche. Ainsi, au lieu de s’attaquer aux problèmes de fond (mauvais état des installations sportives, irrespect des engagements envers des techniciens, faiblesses des moyens financiers, défaillances des structures de formation, irrégularité du management…), on se contente de faire ce qui paraît le plus facile : « dégager » celui que l’on estime être le responsable des mauvais résultats du club. Un entraîneur qui n’est au fait qu’un maillon de la chaîne.
Pressons le pas
Cela d’autant plus que s’attaquer aux problèmes de fond exige, comme cela se pratique chez nos concurrents internationaux, y compris parmi nos voisins, du temps et des efforts. De ce côté des choses, force est de constater que la plupart des dirigeants de nos clubs savent qu’ils sont sur une chaise éjectable. Comprenez qu’ils peuvent sauter à toute heure sous la pression du mécontentement des supporters. Souvent à la suite même d’un seul résultat négatif.
C’est l’historien Hédi Timmoumi qui nous le dit : le Tunisien souhaite obtenir les meilleurs résultats en fournissant le moins d’efforts possibles. Un des traits caractéristiques de la « personnalité de base » du Tunisien, assure-t-il. Cela se vérifie aussi au niveau de la gestion des clubs. Pourquoi faire des évaluations à force de SWOT (Forces, Faiblesses, Opportunités et Menaces) ou d’autres outils d’analyse stratégiques ?
Pressons le pas et allons à ce qui peut satisfaire notamment la galerie et faire taire les contradicteurs et autres médisants.
Un domaine d’avant-garde
Evidemment, certains peuvent s’en étonner ou même en rire. Reste que le football de papa a bien vécu. Il faut consulter la riche littérature du CIES ou encore de la FIFA pour s’en rendre compte. Le football est aujourd’hui un domaine d’avant-garde qui booste tant d’autres : médecine, industrie, management…
Sauf que cette pratique, qui consiste quasiment à changer d’entraîneurs comme on changerait de chemise, n’est pas rentable. Connaissant cet axiome, les techniciens vont tout faire pour éviter ou retarder leur départ. En usant quelquefois de moyens pas toujours orthodoxes.
Ensuite, cela ne peut pas faire naître une bonne pépinière de techniciens : pour s’aguerrir, tout un chacun a besoin d’une stabilité.
Le vécu de notre football nous montre souvent comment ces changements d’entraîneurs sont conduits sans la moindre logique. Et donc non rentables. Combien effectivement de clubs ont réengagé d’anciens coaches seulement quelques mois ou années après qu’ils ont été remerciés. Remerciés quelquefois dans la douleur. Ils ne reçoivent pas tout leur dû et sont critiqués vivement par dirigeants et supporters.