Il y a interdiction de servir le pain dans des sachets en plastique. Cependant, des sacs en plastique sont vendus devant les boulangeries. Par ailleurs, les boulangeries offrent des sacs en papier contre monnaie sonnante et trébuchante. Le Tunisien a très vite jugé !
La scène est familière en Tunisie. Devant la plupart des boulangeries, des marchands ambulants, quelquefois des marchandes, sont installés tous les jours que Dieu fait pour vendre des sacs en plastique. Vous l’avez compris, ils vendent leur marchandise au client venu acheter du pain.
Pourtant les pouvoirs publics ont interdit formellement aux boulangeries de servir leur pain dans des sacs en plastique. Et ce, suite à une décision du ministère de l’Environnement d’« interdire l’utilisation de sacs en plastique à usage unique dans les boulangeries, afin de réduire les déchets plastiques et de protéger l’environnement ».
Une belle trouvaille
En fait, une belle trouvaille dont nous avons appris à apprécier le génie. « La prohibition renforce toujours ce qu’elle interdit », nous dit l’écrivain américain Frank Herbert, qui ferait bien de venir en Tunisie pour apprécier comment les Tunisiens arrivent à détourner les décisions.
La décision d’interdire les sacs de plastique a été saluée comme une mesure de protection de l’environnement. A commencer au niveau international : le Fonds mondial pour la nature (WWF Tunisie) a déclaré que « cette décision exige que toutes les boulangeries en Tunisie arrêtent d’utiliser des sacs en plastique à usage unique et fournissent à leurs clients des options alternatives, à l’instar des sacs réutilisables ou des sacs en papier ».
Protéger la « diversité biologique »
Ce qui a été fait dans certaines boulangeries. Cependant, contre monnaie sonnante et trébuchante. Le sac en papier pour emballer le pain est proposé contre 200 millimes en moyenne. Un prix supérieur à celui de la baguette qui est de 190 millimes.
Cette pratique nous rappelle, cela dit, une toute autre que les Tunisiens ont peut-être oublié : l’interdiction, en 2017, des sacs plastiques dans les supermarchés. Une mesure également prise pour un noble objectif : protéger la « diversité biologique » du pays et de mettre fin à la « pollution visuelle ».
Le consommateur devra, somme toute, les payer
Certes, mais il y a un hic. Comme c’est le cas aujourd’hui : des sacs en plastique payants ont fait leur apparition dans les supermarchés. Certes que l’on peut utiliser plus d’une fois. Le consommateur devra, somme toute, les payer.
Et comme impossible n’est pas tunisien, les sacs en plastique, y compris ceux de couleur noire, continuent à être utilisés un peu partout. Notamment dans les épiceries de la Tunisie. Du nord au sud. Ils sont aussi disponibles dans les boutiques de marchands de Gilettes et de fruits secs. Et évidemment sans que rien ne les interdisent.
Bénéficier du doute
Le Tunisien n’est pas dupe et se rend compte très vite qu’il y a là quelque chose qui ne tourne pas rond ! De toute façon, cela se voit à l’œil nu. Et de toute façon, il a l’habitude d’être trompé. Les décideurs peuvent toujours bénéficier du doute.
Reste que l’accumulation de cas ne peut que lui faire adopter un avis tranché. Ce qui est loin d’être bon pour nous tous. Une opération, comme celle de l’interdiction des sacs en plastique n’aura servi, aux yeux de certains du moins, qu’à faire gagner quelques sous aux boulangers et autres fabricants de sacs de « rechange ».
On ne s’étonnera pas, de ce fait, des quelques réactions agressives que l’on voit ici et là. Des réactions nées d’un certain ressentiment.