Le mystère reste entier sur l’attaque perpétrée samedi 3 juin à la frontière entre Israël et l’Egypte qui a fait trois morts et un blessé israéliens. Le soldat égyptien, auteur présumé de l’attaque, a été retrouvé mort dans le désert du Néguev, à quelques kilomètres du poste-frontière d’el Ouja d’où il était parti.
Ce poste frontalier israélo-égyptien est connu pour être un point de passage des trafiquants de drogue et d’armes, clandestinement ou avec la complicité de responsables militaires corrompus des deux côtés de la frontière. Il y a quelques semaines, la presse israélienne a fait état de la condamnation d’un officier israélien pour complicité dans le trafic de drogue au poste frontalier entre Israël et l’Egypte.
L’enquête sur l’incident du 3 juin a été confiée à une « Commission militaire mixte » égypto-israélienne. Mais d’ores et déjà, les versions données par les deux pays sont diamétralement opposées. Pour les Israéliens, il s’agit d’un « acte terroriste ». Ils en donnent pour preuve « une kalachnikov, un couteau et le coran » trouvés près du cadavre du soldat égyptien.
Pour les Egyptiens, le soldat était « à la poursuite de trafiquants de drogue ». La suite est confuse concernant les circonstances qui ont abouti à la confrontation avec les militaires israéliens. Confusion aussi sur la mort des trois soldats israéliens dont « deux étaient censés être dans la tour de contrôle et dont les corps étaient découverts loin de leur poste de travail situé en hauteur qui leur donnait l’avantage en cas d’échange de tirs ». Sans parler du mystère de la lenteur des secours : il a fallu quatre heures à l’armée israélienne pour arriver sur les lieux…
L’incident violent du 3 juin inquiète d’autant plus les Israéliens qu’il intervient après des décennies de calme à la frontière israélo-égyptienne. D’autant plus inquiétant qu’il se présente comme un signe supplémentaire de la vulnérabilité de l’armée israélienne et de son incapacité à protéger la sécurité des frontières et la vie de ses soldats. D’autant plus inquiétant enfin qu’il éclate juste quelques jours après un confrontation avec le ‘’Jihad islamique’’ palestinien dont les missiles, bien qu’artisanaux et peu sophistiqués, ont terrorisé les citoyens de plusieurs villes israéliennes, y compris Tel-Aviv, et les ont obligés à se terrer dans les abris.
Le gouvernement le plus extrémiste dans l’histoire d’Israël est dans le pétrin. Il se révèle de plus en plus comme le plus incompétent et de moins en moins capable d’assurer la sécurité des citoyens. Pourtant la principale promesse électorale sur la base de laquelle il a été élu.
Mais cette inquiétude née des incidents frontaliers ou de la confrontation avec la résistance palestinienne n’est rien par rapport au cauchemar que vivent actuellement Netanyahu et ses collaborateurs ultrareligieux et racistes au regard de la nouvelle réalité géostratégique qui se met en place dans la région.
Pendant des décennies, la sécurité israélienne était assurée principalement par la discorde semée par Washington et Tel-Aviv dans la région en vue d’entretenir l’hostilité, la division et les guerres dans le Grand-Moyen-Orient. L’axe principal autour duquel tourne ce changement majeur qui donne le tournis à Israël est l’accord de réconciliation irano-saoudien signé à Pékin le 10 mars dernier.
Le choc pour la classe politique israélienne est d’autant plus violent qu’elle a longtemps caressé l’espoir de voir une ambassade israélienne à Ryadh et saoudienne à Tel-Aviv. Non seulement ce rêve israélien s’est évanoui, mais la classe politique israélienne s’est rendu compte qu’elle poursuivait un mirage. Elle assiste maintenant, amère et impuissante, à la réouverture de l’ambassade iranienne à Ryadh et saoudienne à Téhéran.
La principale arme israélo-américaine qui consistait à convaincre les Arabes que leur danger mortel vient d’Iran et que leur salut est dans l’alliance avec Israël s’avéra aussi efficace qu’un pétard mouillé. Maintenant, Benyamin Netanyahu d’un côté et Joseph Biden de l’autre ruminent leur échec stratégique majeur. Ils ne sont plus en mesure d’utiliser l’arme redoutable de la discorde au Moyen-Orient qui a fait les beaux jours de la politique israélo-américaine. Les nuits sont encore longues pour le cauchemar israélien.