Les données et les rapports que publie le ministère des Finances sont des mines d’informations. Ils sont d’une grande utilité et contribuent à mieux structurer les analyses et améliorer la qualité des prévisions. Cette fois, les nouvelles données portent sur le financement public des associations et des mutuelles des agents.
Ce type de statistiques sur les associations et les mutuelles des fonctionnaires, auparavant inaccessibles, montre à quel point l’administration gravit rapidement les échelons de la transparence. C’est l’argent du contribuable et il a le plein droit de savoir où il est dépensé. En même temps, ces révélations inédites vont donner naissance à des débats interminables qui mettraient les bénéficiaires sur le banc des accusés.
Les chiffres
Les données ont porté sur six années, de 2018 à 2023. Sur cette période, l’Etat a financés les associations et les mutuelles des agents à hauteur de 661,199 MDT. C’est un montant conséquent, surtout avec les conditions économiques actuelles.
Par ministère de tutelle, celui des Affaires sociales occupe la première place avec 265,182 MDT. C’est logique, si nous tenons compte que l’Union tunisienne de solidarité sociale, une organisation bien connue et qui jouit d’un capital confiance important, figure parmi la liste des bénéficiaires. Elle a reçu, sur les six années, 91,890 MDT.
En seconde position, nous trouvons le Ministère de la Famille, de la Femme, de l’Enfance et des Personnes âgées dont les associations et mutuelles sous son giron ont encaissé une enveloppe de 111,522 MDT. Encore, l’Union tunisienne de solidarité sociale est présente, obtenant 84,713 MDT sur la période. Cette organisation a bénéficié d’un soutien public total de 176,603 MDT. A titre de rappel, elle a des ressources humaines de près de 2 000 agents, une flotte de gros camions et de voitures pour pouvoir intervenir et des entrepôts de stockage à Tunis, Siliana et Gafsa.
Les organisations sous la houlette du Ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, clôturent le podium, recevant 64,850 MDT sur six ans.
En ce qui concerne les mutuelles des agents, selon nos calculs, elles ont perçu 167,611 MDT sur toute la période, tous ministères confondus.
Une question de perception
Par ailleurs, l’action gouvernementale est réglementée par deux textes : le décret n° 2013-5183 du 18 novembre 2013 fixant les critères, les procédures et les conditions d’octroi du financement public pour les associations; ainsi que la circulaire n° 37 du 29 décembre 2017, réglementant les conditions et procédures d’octroi du financement public pour les mutuelles des agents au titre d’aides sociales. Juridiquement, tout est clair.
Maintenant, le débat devrait porter sur l’utilité de ces dépenses, notamment celles aux mutuelles. Elles peuvent être perçues comme un complément déguisé de rémunérations dans un pays où la masse salariale confisque plus de 22 000 MDT.
En partie, ce n’est pas faux. Néanmoins, il faut tenir compte du rôle social qu’elles assurent. Selon les chiffres du Réseau Tunisien Des Amicales, il y a près de 110 000 bénéficiaires. Ce qui nous donne une moyenne annuelle de 254 dinars par membre. En montant, ce n’est pas élevé. Il ne couvre même pas une nuitée dans un hôtel en LPD durant l’été. Cela renforce le sentiment de sécurité et améliore le rendement des fonctionnaires, pourtant critiqué.
A notre avis, la perception générale en Tunisie n’irait pas dans ce sens. On ne retiendrait qu’un seul point : ce que coûtent ces agents aux contribuables. On sortira ces chiffres lors des négociations sociales, surtout si des grèves sont décrétées.
Le Ministère des Finances a ainsi marqué trois points en un seul coup : se montrer transparent, valoriser l’effort public et mettre intelligemment la pression sur les syndicats. Ceux qui pensent que ce gouvernement est politiquement passif doivent refaire leurs calculs.