Sur la scène de l’amphithéâtre romain de Carthage, un avant-goût a été donné, mardi soir, 11 juillet, pour le très attendu « Mahfel » de Fadhel Jaziri qui fera, vendredi soir, 14 juillet, l’ouverture de la 57ème édition du Festival International de Carthage (FIC).
Après un point de presse au média center du festival, Fadhel Jaziri a invité les médias à assister aux répétitions qui se déroulent la nuit. L’équipe technique était sur place depuis la fin de l’après-midi pour mettre en place les dernières touches de la scène en prévision du spectacle.
A la tombée de la nuit, c’est le début des répétitions dans une scénographie adaptée au chant et à la danse et dominée par des décors en rouge. Une note de fraîcheur avait déjà commencé à envelopper les lieux en cette période estivale qui connait généralement des pics de chaleur la journée.
«Mahfel » ou la simulation d’une fête de mariage bédouine:
Fadhel Jaziri est entouré du chanteur d’opéra Haythem Hadhiri à la direction de la chorale, de son fils le rocker et guitariste Ali Jaziri à la direction musicale et du percussionniste Nasreddine Chebli (alias Nasrou) en plus de la grande collaboration de son compagnon de route Samir Ressaissi qu’il qualifie de « notre mémoire ». A l’affiche, des artistes comme Nour Chiba, Zohra lajnef, Mohamed Elaidi, Oussama Nabli, Mohamed Ali Chbil, Emna Jaziri et Yahia Jaziri, Nidhal Yahaoui et bien d’autres.
Cet artiste pluridisciplinaire qui surfe aisément entre théâtre, cinéma et mise en scène, promet une méga fête bédouine moderne de près de deux heures qui rassemble plus de 120 membres entre musiciens, chanteurs et choristes. Tel que son nom l’indique « Mahfel » est la simulation d’une fête de mariage bédouine. A travers ce spectacle, Jaziri revisite cette fois-ci le patrimoine bédouin par une recherche de sonorités authentiques au fin fond du Sud du pays.
« Notre périple qui a durée près de cinq jours a commencé par Kairouan en passant par Sfax. Il nous a ensuite mené jusqu’à Tataouine, aux confins du Sud», a déclaré Jaziri. Ce voyage a ainsi permis « de faire la rencontre des chanteurs populaires locaux de ces zones du Sud » a expliqué cet artiste, initialement dramaturge, qui demeure habité par la volonté de ressusciter l’héritage sonore berbère qui se perpétue grâce à la multiplication des partenariats.
En retour et suite à ce voyage, les artistes du Sud ont fait le voyage vers Tunis où ils ont eu l’occasion d’enregistrer leurs chansons dans nos studios », a encore dit Jaziri. Cependant certains n’étaient pas vraiment encouragés à faire le déplacement, vu leurs engagements professionnels dans des fêtes de mariage en cette saison estivale. De là était venu venue l’idée d’entamer « une collaboration entre le Centre des arts de Djerba (ndlr : espace culturel privé de Fadhel Jaziri qui a ouvert ses portes en novembre 2022) et le théâtre de l’Opéra de Tunis ».
L’idée de ce spectacle a progressivement mûri avec l’orientation de réaliser un spectacle qui diffère de ce qui a été fait dans les années 80 et les productions qui ont suivies dont on cite Nouba, Hadhra, Noujoum, Ezzaza et Hadhra. Ce choix émane de la longue expérience de Jaziri, engagé dans un travail d’expérimentation ce qui est un atout ayant fait sa notoriété dans des œuvres emblématiques largement appréciés par son public.
MAHFEL est un mélange de tout, il y a une trace des ses œuvres précédentes tout en y injectant quelques modifications qui coïncident avec les besoin de cette création et l’évolution des goûts sonores notamment de la jeune génération.
Jaziri assure que la chose la plus importante dans cette création est l’introduction de la chorale de l’opéra sous la direction de Haythem Lahdhiri. Avec « Mahfel », il signe un nouveau spectacle qui s’inscrit dans la même orientation de ses anciennes productions.
Mahfel sera réalisé en collaboration avec des artistes de la nouvelle génération évoluant dans divers registres musicaux et l’introduction de nouvelles sonorités, entre les sonorités de son fils Ali Jaziri ou encore le background lyrique et d’opéra du baryton Haythem Hadhiri avec lequel il collabore depuis près de 14 ans.
Des chorégraphies modernes et des sonorités multiples dominées par la Gasba résonnaient au milieu de la nuit devant des gradins vides qui ne tarderont pas à être envahis par les fans d’un genre musical et un projet dont seul Fadhel Jaziri détient les secrets de longévité.
Ce secret qu’il a délicatement divulgué entre les lignes, avait été entamé il y a plus de quatre décennies dans des productions entre théâtre cinéma et musique (« Ghassalet Ennouader », « Thalathoun », « Noujoum », « Nouba » et « El Hadhra »).
Cependant, la réalisation de ce méga spectacle n’était pas évidente. Fadhel Jaziri a évoqué des « contraintes de temps et autres d’ordre financiers pour un projet assez coûteux qui ne pouvait voir le jour sans l’appui précieux du théâtre de l’Opéra de Tunis et le soutien financier du festival international de Carthage ».
Le genre Bedoui sera revisité dans Mahfel:
Le violoniste Samir Ressaissi a dévoilé les grandes lignes du programme artistique pour cette méga fête de MAHFEL. « Outre les chansons du patrimoine, de nouvelles chansons sur des textes de Ahmed Barguithui seront interprétées. Des améliorations ont été également apportées par Fadhel Jazii à d’autres textes à travers une nouvelle réécriture».
L’artiste a annoncé que les compositions sont le fruit de toute l’équipe artistique impliquée dans cette œuvre. « Après les genre soufi, populaire et instrumental, Mahfel s’inscrit dans un registre sonore bédouin avec un arrangement moderne ».
Les instruments à vent de la musique tunisienne bédouine, comme le nay, la gasba ou la zokra seront présentés dans une nouvelle vision portant la signature d’artistes aux univers assez distincts. Ils se rencontrent dans un projet musical unificateur orienté vers l’universel mais qui demeure ancré dans son cadre local authentique.
Haythem Hadhiri promet de nouvelles mélodies réécrites et mise sur la qualité vocale et la polyvalence du Chœur de l’opéra de Tunis et la chorale nationale. « Leurs compétences vocales relativement développée, admet –il, devra cependant offrir une nouvelle couleur à cette création qui est une sorte de laboratoire dédié au chant populaire bédouin et qui est toujours prêt à se développer davantage. »
Dans Mahfel, Haythem Hadhiri dessine les contours d’une symphonie tunisienne aux couleurs uniques et aux allures d’un opéra pour une immersion dans l’univers des fêtes bédouines du Sud sous les youyous des femmes qui commençaient déjà à se faire entendre lors des répétitions nocturnes.
Après le festival international de musique symphonique d’El Jem qui a ouvert la saison des festivals d’été suivi du festival international de Hammamet, les festivaliers de la Capitale s’apprêtent à prendre la direction du mythique amphithéâtre romain de Carthage.
La 57ème édition du Festival international de Carthage se déroulera du 14 juillet-19 août 2023 et offrira un bouquet de sonorités pour des goûts assez variés.
Avec TAP