Pour comprendre les enjeux géopolitiques, il faut penser globalement et agir localement.
Lors de la huitième édition du Tunis Forum organisé par l’IACE en partenariat avec FFN qui avait pour thème « La Tunisie et la Nouvelle Géopolitique », a été mis en exergue que la géopolitique de la Tunisie dépasse largement sa géographie. Cette réalité est souvent occultée par notre propre perception nationale.
Dans sa présentation, Dr Rafaa Tabib, géopolitologue et professeur-conférencier à l’École Supérieure de Guerre à Tunis, souligne que les côtes tunisiennes se trouvent face à un nœud où transite un tiers du commerce maritime mondial. Cela implique également que les échanges d’informations se font à proximité immédiate du littoral.
Cependant, on peut se demander quelle est la position de la Tunisie dans le classement des forces géopolitiques en constante évolution. À cette question, Slim Ben Rjeb, membre du bureau exécutif de la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (CONECT), a souligné que malgré la réussite de sa transition démocratique, le positionnement de la Tunisie demeure faible.
Par conséquent, comme le confirmera Rafaa Tabib, notre pays cherche sa place et mais aussi à s’adapter aux changements en cours dans le nouvel ordre mondial qui se cherche. Et pour y parvenir, elle devra s’adapter aux évolutions et contribuer activement aux discussions et aux initiatives pour promouvoir ses intérêts. Cela implique entre autres de prendre en compte les nouvelles réalités géopolitiques, mais aussi les nouveaux acteurs émergents des défis mondiaux tels que les crises économiques, les conflits régionaux, les questions de développement durable et les enjeux liés à la gouvernance mondiale.
Evoquant la guerre en Ukraine ayant marqué un point de non-retour dans l’évolution du monde depuis le 24 février 2022, il estime que les équilibres de pouvoir et les configurations de force tracent désormais de nouvelles réalités géopolitiques.
Or, il convient de rappeler que le système établi par les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale, renforcé par la chute du mur de Berlin et les conflits au Moyen-Orient, s’est profondément fissuré. Ce qui fait qu’un nouvel ordre mondial, avec une nouvelle architecture des relations internationales, doit être construit.
Mais comment s’articulera ce nouvel ordre mondial? Dans sa présentation, M. Tabib précise qu’il est essentiel de prendre conscience que l’Occident n’est plus le centre du monde et qu’il faut s’habituer à voir des puissances qui ne partagent pas les valeurs occidentales. La seule alternative à la guerre et à l’effritement du monde est donc une coexistence pacifique entre différents blocs.
Par ailleurs, observe-t-il, il est important d’aborder les différents sujets tels que le nouvel ordre mondial, ainsi que les défis liés à la menace terroriste en Libye et en Mauritanie.
Prenons le cas de la Libye, l’identification de la menace terroriste pose problème. Car il n’existe pas de définition unifiée du péril. Ce qui laisse chaque groupe élaborer ses propres politiques de lutte contre le djihadisme.
Qu’en est-il de l’Europe?
L’Europe, y compris la France, n’a pas toujours pleinement pris conscience des transformations sociales qui ont conduit aux révoltes du printemps arabe il y a une décennie. Il est crucial de ne pas répéter cette erreur face à la crise sanitaire et à ses répercussions économiques.
Au-delà des enjeux géopolitiques, l’Europe doit également agir. Alors, Rafaa Tabib se prononce en faveur du soutien du Maghreb; et ce, en réactivant le partenariat euro-méditerranéen.
Les pays du Maghreb, notamment la Tunisie, ont un besoin crucial de soutien financier, ajoute-t-il. En effet, les économies de la région sont confrontées à d’importants défis et la stabilité de ces pays est mise à rude épreuve. Ainsi, le Maghreb, dans sa nouvelle configuration, représente un enjeu stratégique vital pour l’Europe. Même s’il ne peut plus être considéré comme un simple pré carré européen.
En résumé, les trois pays du Maghreb suscitent un intérêt croissant de la part d’acteurs régionaux et mondiaux. Tandis que l’influence de l’Europe, notamment de la France, diminue progressivement, conclut-il.