« Depuis 2011, les Tunisiens ne cessent de voir leurs vœux exaucés comme si c’était un interminable Noël ou une nuit du destin sans fin. Entre les espoirs réalisés et les défis persistants, on ne calcule pas les conséquences d’après ». Elyes Kasri, analyste politique et ancien ambassadeur, livre une analyse de tout un bilan entre l’avant et l’après 2011, via un post FB.
« Ceux qui ont préféré vivre avec du pain et de l’eau, pourvu que Ben Ali disparaisse, se sont débarrassés de Ben Ali et se sont retrouvés à faire la queue pour acheter une misérable baguette qui fond comme de la glace en pleine canicule et vivent au gré des coupures d’eau, préméditées ou dues à une infrastructure vieillotte et mal entretenue. Ceux qui ont été déçus par Ennahdha et sa démocratie ont été débarrassés des deux dans l’attente d’un nouveau régime qui semble, en dehors des sondages occasionnels, faire l’objet d’une désaffection populaire lors des consultations ou élections organisées pour en dresser les contours », analyse Elyes Kasri
Le dernier souhait en voie d’être exaucé ?
Et de poursuivre : « Le dernier souhait en voie d’être exaucé semble être celui de libérer la Palestine dans la mesure où les tenants de l’identité arabo-musulmane de la Tunisie risquent d’être submergés par l’afflux de migrants africains débordant des frontières avec l’Algérie et la Libye, et surtout ceux rapatriés en Tunisie par les pays européens, avec à leur tête la bienveillante Italie qui semble mener la quatrième guerre punique pour faire disparaître, pour de bon, Carthage, selon les vœux de Caton (vers 150 av. J.-C) qui ne cessait de haranguer le sénat romain avec son fameux cri de guerre « Carthago delenda est » (Carthage doit être détruite). Ces Subsahariens risquent de prendre les tenants de l’arabité et de l’antisionisme au mot et leur demander d’évacuer cette terre africaine afin de réaliser leur destin en Palestine ou dans le désert d’Arabie d’où ils sont venus en conquérants ».
Et de conclure : « Ce serait la dernière phase de la décolonisation de l’Afrique et une occasion historique pour ceux qui piaffent d’impatience de libérer la Palestine de mener le véritable combat contre le sionisme israélien au lieu des joutes oratoires et de la surenchère arabiste de campus universitaire et de salons. Dans une de ses célèbres fables, l’écrivain grec Esope (fin du VIIème et début du VIème siècle av. J.-C.) avait recommandé de faire attention à ses souhaits car ils pourraient être exaucés. En Tunisie, on ne cesse de caresser une multitude de souhaits sans prendre le temps d’en calculer les conséquences. »
En Tunisie, il semble y avoir une multitude de souhaits formulés sans une réflexion approfondie sur leurs implications et une synthèse des différents enjeux.