Dans une déclaration accordée à L’Economiste Maghrébin, Khaled Dabbabi, enseignant-chercheur en droit public et sciences politiques, est revenu sur le limogeage de la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, et la désignation de son successeur, Ahmed Hachani.
Khaled Dabbabi estime que ce changement de chef de gouvernement nécessite une lecture juridique et politique à la fois. La décision s’inscrit dans le cadre juridico-constitutionnel de la Constitution de 2022.
Il rappelle le passage d’un régime semi-parlementaire à un régime présidentialiste. « Le pouvoir exécutif et le gouvernement, dans ce cadre, sont déconnectés du Parlement ; le gouvernement et le chef du gouvernement relèvent du président de la République. Ils sont responsables politiquement devant le président de la République et non devant le Parlement », explique le chercheur.
Même si la Constitution parle de « chef du gouvernement », dans les faits, « c’est un Premier ministre ». « Il est le premier collaborateur du président de la République et il est confiné dans son rôle de coordinateur ».
La question de la majorité parlementaire est superflue dans la Constitution de 2022, étant donné que le chef du gouvernement et le gouvernement n’ont pas besoin d’un vote de confiance.
La question de la majorité parlementaire est superflue dans la Constitution de 2022, étant donné que le chef du gouvernement et le gouvernement n’ont pas besoin d’un vote de confiance. « La seule confiance requise est celle du président de la République. Ainsi, le passage par le Parlement n’est pas requis pour le nouveau chef du gouvernement », poursuit-il dans le même sillage.
En ce qui concerne le volet politique, l’intervenant explique que « la nouvelle désignation est une tentative d’absorber le mécontentement et la colère populaires face à cette crise épineuse dont souffre le peuple ».
Si la politique présidentielle porte pleinement ses fruits, le discours véhiculé sera celui selon lequel c’est la sagesse et la clairvoyance du président de la République.
« Cette lecture classique s’inscrit parfaitement dans la logique tracée par le système qui transforme le gouvernement en un bouc émissaire et un gilet pare-balles à la fois. Un gilet pare-balles pour protéger le président de la République, et un bouc émissaire en cas de déclenchement d’une crise politique. Dans ce cas, le gouvernement est sacrifié et, par ricochet, le chef du gouvernement. Si la politique présidentielle fonctionne à merveille et porte pleinement ses fruits, on va véhiculer un discours voulant que cela soit dû à la sagesse et à la clairvoyance du président de la République. Par contre, si les choses vont moins bien au point d’arriver à une crise épineuse, le discours qui sera véhiculé est l’incompétence du gouvernement et non le choix du président de la République. Ce discours veut dire que le problème réside dans une mauvaise application du plan du président de la République. Il ne date pas d’hier, car il est adopté par les partisans du président de la République », conclut-il.