De belles sonorités africaines entre Afropop et Reggae ont enflammé, mardi soir, 15 aout, la scène du théâtre antique de Carthage dans l’une des soirées mémorables de cette saison qui était donnée par un duo d’artistes du Nigeria et de la Côte d’Ivoire.
Une large communauté de l’Afrique noire était présente lors de cette soirée présentée dans le cadre de la 57ème édition du Festival international de Carthage qui s’est poursuivi jusqu’à une heure tardive de 22h jusqu’à 1h du matin. A l’issue du spectacle, un hommage a été rendu aux deux artistes par la ministre des Affaires Culturelles, Hayet Ketat Guermazi, et du ministre des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, Nabil Ammar.
Les questions d’actualité allant du politique à l’humanitaire et les changements climatiques ont dominé ce spectacle qui se tient dans une conjoncture assez délicate sur le Continent marquée par l’instabilité politique dans certaines zones et les drames migratoires. Après la performance rythmée de la Nigériane Yemi Alade, en première partie, l’Ivoirien Tiken Jah Fakoly a donné une performance qui était l’une des plus agréables de la saison.
Yemi Alade, Mama Africa
La Nigériane Yemi Alade, celle que l’on surnomme Mama Africa en allusion à son amour pour ses racines, est la voix montante de l’Afropo dont les concerts enflamment les scènes les plus prestigieuses scènes en Europe et aux Etats-Unis et sur le Continent Africain.
Dans ses nombreux concerts à travers le globe, elle a donné des performances pour des audiences plus exclusives comme les Nations unies, le Global Citizen Fund et la famille royale britannique. Et à Carthage elle a hissé le drapeau Tunisien en chantant Africa.
Cette artiste complète est auteure compositrice et interprète. A son actif cinq albums dont King of Queens (2014), Mama Africa (2016), Black Magic (2017) et Woman of Steel (2019) et Empress (2020) tous parus chez le label indépendant Effyzie Music.
Dans ses chansons, elle a exploré avec sa troupe et les danseuses qui l’accompagnaient différentes thématique autour de la pauvreté, la femme et l’Amour. Parmi ses singles Fimisile (2009), Johnny (2013), Kissing (2014), Na Gode (2015) et Ferrari (2016) et bien d’autres dans la même année et les années suivants.
Après une carrière entamée assez jeune à l’âge de 16 ans, l’artiste a cumulé les succès. Nommée aux MOBO Awards (2014) et aux BET Awards (2015), elle est lauréate de la Meilleure interprète féminine aux MTV Africa Music Awards deux années de suite, en 2015 et en 2016.
Selon le site de l’artiste, après Carthage, Yemi Alade se produira le 1er septembre à Göteborg en Suède, et le 30 septembre à Brooklyn dans l’Etat de New York aux Etats Unis d’Amériques. Une autre date est également annoncée pour 2024 avec un concert le 19 mai à Amsterdam aux Pays-Bas.
Tiken Jah Fakoly: « Africa is the future »
Armé d’un glaive, celui de la raison et du savoir, accompagné de sa troupe de musiciens, en costumes militaires armés de leurs instruments, et deux choristes femmes, l’Ivoirien Tiken Jah Fakoly mène le combat pour éveiller les consciences et rêve d’une Afrique plus inclusive, solidaire et libre. De son large répertoire, il a chanté Africain Revolution, Dernier Appel, Le monde à chaud, Braquage de pouvoir et tant de titres. Ses paroles sont autour des questions du réchauffement climatique, migratoire et de la politique occidentale en Afrique qui continue de dominer le paysage dans les anciennes colonies.
« Le public était chaud ce soir », a déclaré Tiken Jah Fakory à l’agence TAP à l’issue du spectacle. En plus de la danse, pour lui ce qui compte le plus chez le public est de bien « écouter les messages », ce qui est au cœur de la vocation de la musique reggae qu’il pratique depuis un quart de siècle.
Ce genre engagé paru dans les années 60 continue de défendre les causes humaines et aborder audacieusement les questions politiques de l’époque. Sa musique s’inscrit dans le même registre et se présente comme « un message de paix et d’ouverture, de justice, d’égalité », dit-il.
Ses déclarations et ses positions politiques lui ont parfois attiré des soucis, mais cet infatigable continue son combat qu’il mène à travers l’art pour une Afrique unie, solidaire et guérie de ses maux : l’instabilité, la misère, les drames de la migration et ses richesses dont toutes les puissances s’arrachent.
L’artiste dénonce « la manière dont le monde est partagé aujourd’hui ». En référence à son tube « Africa will be free», il affirme une phrase dont il n’a cessé de répéter sur scène : « Je pense que l’Afrique sera libre mais ne pourra pas l’être sans les africains ».
L’artiste aux positions rebelles ne mâche pas ses mots : « Personne ne se présentera pour mener le combat à notre place. Il faut que nous même on lève la voix pour dire non aux grandes puissances qui sont en train de piller nos richesses et celle des générations futures. »
Il lève la voix pour dénoncer un ordre mondial injuste envers les plus démunis en Afrique malgré ses richesses naturelles et appelle tous les Africains, dans toute leur diversité ethnique et culturelle, à s’unir pour fixer les conditions de l’exploitation de ces richesses dont tout le monde s’arrache.
Sur scène, une affiche sur écran géant où était inscrit : « Africa is the future » (L’Afrique c’est le futur). L’artiste aspire à un avenir meilleur pour l’Afrique dans un lendemain où « la traversée de la méditerranée sera plutôt vers le Sud ».
Tiken Jah Fakoly avait du mal à quitter la scène et après chaque chanson il revient pour dire tout ce qu’il avait sur le cœur et que beaucoup de spectateurs s’y identifiaient. Sa prestation a pris fin vers à 1h.00 laissant le souvenir d’une soirée africaine pas comme les autres et que seul l’avenir nous dira le sort d’un Continent que ses enfants cherchent à quitter mais qui est en réalité au cœur de toutes les convoitises occidentales.
L’artiste a toujours dénoncé les problèmes de pauvreté et de sécheresse, les famines, les guerres et les migrations qui rongent le Continent et pèsent sur des milliers de populations démunies. Son engagement en faveur de la paix et la lutte contre l’injustice n’a pas pris une ride et continue d’inspirer beaucoup de gens dans toute l’Afrique.
Avec TAP