La Semaine africaine du climat et le Sommet africain sur le climat ont débuté hier à Nairobi, au Kenya. Le rapport « État du climat en Afrique 2022 » de l’Organisation météorologique mondiale – OMM– indique que le changement climatique nuit à la sécurité alimentaire, aux écosystèmes et aux économies de l’Afrique. De même qu’il exacerbe les déplacements et les migrations de population et augmente la menace de conflit en raison de la diminution des ressources.
Le rapport montre que le taux d’augmentation de la température en Afrique s’est accéléré au cours des dernières décennies et que les catastrophes liées aux conditions météorologiques et climatiques sont devenues plus graves. Le taux de réchauffement moyen en Afrique est de +0,3 °C par décennie pour la période 1991-2022, légèrement supérieur à la moyenne mondiale; contre +0,2 °C par décennie pour la période 1961-1990.
Ainsi, l’Afrique du Nord connait le réchauffement le plus rapide, avec des chaleurs extrêmes provoquant des incendies de forêt en Algérie et en Tunisie en 2022. La Corne de l’Afrique a connu sa pire sécheresse depuis 40 ans, l’Éthiopie, le Kenya et la Somalie étant particulièrement touchés. Pendant ce temps, de nombreuses régions du Sahel ont connu de graves inondations pendant la saison de la mousson, le Nigeria, le Niger, le Tchad et la moitié sud du Soudan étant les plus durement touchés.
Selon le rapport, plus de 110 millions de personnes sur le continent africain sont directement touchées par les catastrophes météorologiques, climatiques et liées à l’eau en 2022, entraînant des pertes économiques de plus de 8,5 milliards de dollars. La base de données internationale sur les catastrophes montre également que sur les 5 000 décès signalés suite à ces catastrophes, 48 % étaient liés à la sécheresse et 43 % aux inondations. Mais le nombre réel de morts est probablement beaucoup plus élevé en raison de la sous-déclaration.
Nécessité d’assurer une couverture complète de l’alerte précoce
Le secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale, Taalas, a déclaré que l’Afrique représente moins de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre; mais qu’elle est le continent le moins capable de faire face aux impacts négatifs du changement climatique. « Les vagues de chaleur, les fortes pluies, les inondations, les cyclones tropicaux et les sécheresses prolongées ont un impact dévastateur sur les communautés et les économies, et de plus en plus de personnes sont en danger », a-t-il souligné.
Il a ajouté : « L’Afrique présente d’énormes lacunes en matière d’observations météorologiques et de services d’alerte gravement mal desservis. Nous sommes déterminés à combler ces lacunes et à garantir que chacun ait accès aux alertes vitales. »
La croissance de la productivité agricole ralentit
Le rapport, préparé conjointement avec la Commission de l’Union africaine et le Centre africain pour les politiques climatiques de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), souligne également que l’agriculture est l’épine dorsale des moyens de subsistance et de l’économie nationale de l’Afrique, soutenant plus de 55 % de la population mondiale et sa force de travail. Mais depuis 1961, la croissance de la productivité agricole en Afrique a chuté de 34 % en raison des effets du changement climatique. Cette baisse est la plus élevée par rapport au reste du monde.
Le rapport prévoit que les pays africains feront plus que tripler leurs importations annuelles de produits alimentaires d’ici 2025, passant de 35 milliards de dollars à 110 milliards de dollars.
Les pertes et les dommages se poursuivent
Toujours selon les prévisions, les pertes et dommages causés par le changement climatique en Afrique se situeront entre 290 et 440 milliards de dollars américains sur la période 2020-2030.
Mais le rapport souligne que l’ampleur des pertes et des dommages, ainsi que les coûts qui en résulteront, dépendront de nombreux facteurs, notamment du niveau ciblé des mesures d’atténuation mondiales et du niveau des investissements locaux pour l’adaptation.
Selon les calculs, si l’augmentation de la température mondiale atteint 4 °C d’ici 2080 et que la capacité d’adaptation régionale est forte, la perte annuelle de « dommages résiduels » pour l’Afrique à cette date sera encore équivalente à 3 % de son agrégat économique estimé.
Le financement de l’adaptation climatique est urgent
Le rapport souligne également que plus de 50 pays africains ont soumis leurs propres contributions déterminées au niveau national (CDN) et que l’agriculture et la sécurité alimentaire, l’eau, la réduction des risques de catastrophe et l’assainissement deviendront leurs principales priorités dans l’adaptation au changement climatique. Les dépenses qu’ils consacrent à l’adaptation au climat ne représentent qu’une goutte d’eau dans l’océan de ce dont ils a besoin.
Les données montrent qu’entre 2020 et 2030, les pays africains auront besoin de 2 800 milliards de dollars de financement pour mettre en œuvre leurs contributions déterminées au niveau national. À cette fin, la Banque africaine de développement (BAD) a doublé son financement climatique pour le porter à 25 milliards de dollars d’ici 2025, dont 67 % seront consacrés à l’adaptation climatique.
Les investissements énergétiques doivent croître rapidement
Lors du Sommet africain sur le climat, la Banque africaine de développement et l’Agence Internationale de l’Energie publieront conjointement le 6 septembre le dernier rapport sur le financement des énergies propres en Afrique. Et ce, en fournissant des conseils sur la manière d’attirer les investissements, d’améliorer la disponibilité globale des capitaux et de réduire les coûts de financement pour des projets d’énergie propre.
Des solutions innovantes
Bien qu’elle abrite un cinquième de la population mondiale, la région n’attire actuellement que 3 % des investissements énergétiques mondiaux. Selon l’Agence Internationale de l’Energie, les investissements énergétiques en Afrique doivent être doublés d’ici 2030. Afin que les pays africains puissent bénéficier d’un approvisionnement énergétique universel, développer leur propre économie et en même temps remplir leurs engagements climatiques.