Après la parution de la déclaration finale du sommet du G20 qui s’est tenu les 9 et 10 septembre en Inde, la plupart des commentateurs de la presse mondiale n’ont pas manqué de relever « l’échec » des pays occidentaux, Etats-Unis en tête, d’imposer leurs vues comme à l’accoutumée. Un autre indice important dans le rétrécissement du rôle occidental dans la nouvelle configuration stratégique mondiale.
Tout d’abord, concernant le sujet brûlant de l’Ukraine, malgré les fortes pressions exercées par Washington et ses alliés sur le Premier ministre indien, Narendra Modi, le président ukrainien Volodymyr Zelensky n’a pas été invité à New Delhi. Même la possibilité de s’adresser au sommet par vidéoconférence lui a été refusée.
Ensuite, contrairement à la déclaration finale du sommet précédent de Djakarta, celle de New Delhi ne condamne pas la Russie et le terme « agression », si cher à l’Occident, est banni. Un détail important : les ministres des Affaires étrangères de Chine et de Russie (qui représentaient les présidents Xi Jinping et Vladimir Poutine absents) ont joué un rôle déterminant dans la rédaction de la déclaration finale. Le président américain et ses alliés européens n’ont pu qu’accepter les termes de la déclaration finale, qualifiée par les médias occidentaux d’« étonnamment consensuelle ».
Par ailleurs, le sommet de New Delhi a intégré officiellement l’Union africaine (UA), un signal fort pour l’Afrique et une victoire diplomatique pour le « Sud global ». Selon le président kényan, William Ruto, « l’entrée de l’Union africaine au G20 va offrir une voix et une visibilité à l’Afrique qui a la croissance la plus rapide, et lui permettra de faire valoir ses intérêts et ses points de vue au sein de l’instance ».
Il est à rappeler ici que l’Union africaine compte 55 membres dont le PIB cumulé ne dépasse gère les 3 trillions de dollars, soit… 75% du PIB de l’Allemagne. C’est dire le fossé vertigineux qui sépare encore les pays riches du Nord et les pays pauvres du Sud.
Cela dit, si l’on ne peut qu’applaudir l’intégration de l’Union africaine au sein de ce grand forum économique mondial, on ne peut pas ne pas poser la question : pourquoi pas la Ligue arabe aussi ? Après tout, cette institution représente 22 pays, s’étendant sur une aire géographique immense (13,5 millions de kilomètres carrés) entre le Golfe et l’Atlantique ; une population de près d’un demi-milliard d’âmes ; des richesses minières et pétrolières immenses, etc. Peut-être dans l’un des prochains sommets du G20, cette question s’imposera-t-elle comme l’un des points de l’ordre du jour…
Sur un autre plan, on ne peut que déplorer le fait que le G20 perpétue la pratique immonde des deux poids et deux mesures quand il s’agit de traiter les crises, les drames et les injustices qui infectent le monde.
Dans la déclaration finale, le sommet dénonce « l’emploi de la force visant à obtenir des gains territoriaux ». Cette phrase fait référence seulement et exclusivement à l’Ukraine. Pourtant, cela fait plus d’un demi-siècle que le peuple palestinien voit ses terres confisquées par la force ; ses enfants tués à bout portant par des soldats armés jusqu’aux dents ; des dizaines de milliers d’hommes et de femmes détenus dans les prisons israéliennes ; ses maisons détruites à coups de bulldozers ; ses villes bombardées chaque fois qu’Israël déclenche une guerre, le tout dans l’impunité totale.
Sans doute, de nombreux responsables de plusieurs pays au sein du G20 sont conscients de cette injustice et de cette méprisable pratique des deux poids et deux mesures. Mais ils ne peuvent rien faire contre l’obstination pathologique de Washington de faire de la remise en question de l’impunité d’Israël un tabou à ne pas toucher et une ligne rouge à ne pas franchir.