Le séisme dévastateur qu’a connu le Maroc mérite une analyse approfondie. Elyes Kasri, analyste politique et ancien ambassadeur, en dresse un état des lieux, via sa page fb.
Elyes Kasri estime qu’il serait judicieux de se garder de juger trop hâtivement la décision prise par le gouvernement marocain de restreindre le nombre d’équipes de secouristes étrangers, à la suite du tremblement de terre qui a fait près de 2 900 morts à environ 72 kilomètres au sud-ouest de Marrakech. Alors que certains s’empressent d’y voir un excès d’orgueil et une indifférence aux souffrances des populations sinistrées, il juge plus judicieux d’imputer la retenue des autorités marocaines à un calcul serein et rationnel des enjeux et des priorités.
Et de poursuivre : « En effet, loin de céder à l’émotion et à la panique, le gouvernement marocain semble avoir mis dans la balance les intérêts à long terme du Maroc et le contrôle de sa communication extérieure qui auraient pu être chahutés par une pléthore d’équipes de secouristes originaires de pays et d’organisations plus ou moins bien intentionnés. Et ce, alors que le Maroc s’apprête à abriter à Marrakech les assises annuelles du groupe de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International (9-15 octobre 2023). Avec tout ce que cela représente pour l’image du pays sur la scène internationale, le développement et les opportunités et moyens de reconstruction pour le Maroc et son peuple. »
Ainsi, d’après des sources marocaines : « Plus de 14 000 participants de haut niveau sont attendus (à Marrakech) dont les Ministres de l’Economie et des Finances et les Gouverneurs de Banques centrales des 189 pays membres; ainsi que les représentants de la société civile, du secteur privé, des médias internationaux et du monde académique. »
Avant d’ajouter : « Après la confirmation, le lundi 18 septembre, par les organisateurs à Washington de la tenue à Marrakech à la date prévue de l’assemblée annuelle du groupe de la Banque Mondiale et du FMI “en adaptant le contenu aux circonstances”, l’organisation, le suivi et l’impact de cette réunion dépasseront plus que probablement ceux de la TICAD et du Sommet de la Francophonie tenus en Tunisie en 2022. Et ils auront un impact plus substantiel et plus tangible sur le pays hôte que les résultats que la Tunisie attend toujours; à part les couacs diplomatiques dont elle subit encore les contrecoups. Diriger c’est prévoir. Mais, avec les aléas de la nature qui semblent de moins en moins prévisibles, il s’agit de garder la tête sur les épaules et de ne pas perdre de vue les objectifs stratégiques à long terme. Ce n’est pas le fait du hasard si, depuis une vingtaine d’années, le Maroc n’arrête pas d’enchaîner les succès et de se hisser parmi les géants économiques du continent africain. »
Enfin, il conclut : « Les autres gouvernements arabes et africains et notamment en Tunisie feraient bien de s’inspirer du modèle marocain. Et ce, en dépit de la mauvaise propagande que lui font quelques esprits chagrins et une poignée de gouvernements en mal de légitimité et de distraction d’une opinion publique intérieure déçue et frustrée. En tout état de cause, le peuple marocain semble apprécier hautement l’élan sincère du peuple tunisien et sa solidarité fraternelle et indéfectible, en dépit des aléas éphémères de la politique. »