Les chauffeurs de taxis du gouvernorat de Sfax continuent leur contestation. Et ils ont décidé, à travers leur syndicat, d’organiser une grève le 03 et 04 octobre prochains. Idem pour ceux de Kébili qui ont contesté hier à propos du même sujet. A savoir l’obtention d’une autorisation exceptionnelle pour continuer à utiliser le gaz liquéfié subventionné comme carburant.
Récemment, les autorités ont pris la décision d’exiger l’élimination des installations de gaz disposées illégalement dans ces véhicules, sans modification de la carte grise. Sinon, ces taxis ne pourront pas passer leurs visites techniques.
Un peu d’histoire contemporaine
Cette habitude d’utiliser le gaz, au lieu du gasoil ou de l’essence, remonte à de longues années, depuis l’ère de Ben Ali. Les chauffeurs de taxis y ont trouvé un bon refuge pour affronter la hausse des prix des autres carburants alors qu’ils étaient si bas par rapport à aujourd’hui.
C’était effectivement le début de la fin des années glorieuses d’un métier. Auparavant, le nombre de voitures dans l’ensemble du pays était limité, la concurrence inexistante et la recette d’un chauffeur de taxi lui suffisait pour vivre dignement.
Aujourd’hui, la concurrence provient de partout : le covoiturage, les grands taxis du transport collectif, des sociétés qui utilisent des applications et mêmes des sociétés citoyennes qui commencent à s’intéresser au secteur du transport. A cela, s’ajoute la facture si chère des carburants ainsi que les taxes professionnelles. La marge des belles années n’existe plus et les chauffeurs de taxis souffrent pour dégager une recette satisfaisante. L’augmentation des tarifs n’est pas la bonne solution. Ils sont déjà élevés et le citoyen moyen évite désormais de prendre la voiture jaune sauf en cas de nécessité.
Une facture salée pour l’Etat
A l’origine, c’est dans la ville de Sfax que cette pratique a vu le jour. Grâce au faible coût d’énergie, les taxis fonctionnent depuis une longue période comme les grands taxis de transport collectifs de Tunis. Il y a juste un nombre de place limité à quatre personnes.
La récente décision de mettre fin à cette anarchie aurait dû être prise auparavant. Une bouteille de gaz est vendue au public à 8,800 TND alors qu’elle coûte réellement 42 TND (sur la base d’un prix du baril de Brent à 89 dollars). La subvention par citoyen est de 33,200 TND. Si nous tenons compte que Sfax compte au moins 3 000 taxis qui circulent quotidiennement, et que chaque véhicule consomme une seule bouteille, c’est que le coût est 99 600 TND. Sur l’année, cela coûte 35,457 MTND au budget.
C’est même injuste vis-à-vis des autres professionnels dans les autres gouvernorats de la Tunisie et qui respectent la loi. Puisqu’ils sont soumis à la même réglementation fiscale, il faut donc qu’ils opèrent dans les mêmes conditions d’exploitation.
Solution intermédiaire
A notre avis, ce bras de fer ne servira à rien et ce sera le pauvre citoyen, habitué à supporter un faible coût de transport, qui paiera les pots cassés.
L’idéal serait de trouver une solution intermédiaire. Avec comme objectif final de respecter la loi dans un délai raisonnable ne dépassant pas une année au maximum. Les taxis qui veulent continuer à fonctionner au gaz n’ont qu’à mettre en place l’installation nécessaire et changer leur carte grise.
L’Etat pourrait donner un coup de pouce, sous la forme d’un bonus fiscal ou d’une exonération exceptionnelle. Et puisque le parc est plus que vieillissant, ceux qui comptent renouveler leur matériel roulant pourraient avoir un pack incitatif. Pour un secteur émetteur de gaz à effet de serre, c’est une opportunité de joindre l’utile à l’agréable.
Ce qui est sûr, c’est que les autres secteurs qui exploitent de telles niches ne passeront plus inaperçus. Cela posera un vrai problème de marge et les prix finiront par augmenter. C’est l’autre revers de la médaille. Le système tunisien est basé, depuis les années 1970, sur la maîtrise du coût de la vie. Aujourd’hui, ce n’est plus possible car l’Etat ne peut plus supporter la facture. Corriger les erreurs de décennies de dysfonctionnement prendra du temps et coûtera cher.