Des économies « frappées par la tempête et à la dérive, mais toujours à flot », alerte JP Morgan dans son dernier rapport portant sur 13 pays en difficulté. Elle rappelle que la Tunisie fait partie, aujourd’hui, du cercle des pays menacés de défaut et que les chances d’accéder aux marchés financiers sont quasi inexistantes.
Sans se faire trop d’illusion sur la signature d’un accord avec le FMI, le rapport souligne son importance pour débloquer des fonds concessionnels. Certes, le FMI est indispensable pour le bouclage de l’exercice budgétaire, mais cette condition est loin d’être suffisante pour contourner la menace de défaut. En effet, le déblocage du financement extérieur n’a pas empêché de sombrer dans le cercle vicieux de l’endettement, comme en témoigne l’historique des accords conclus avec le FMI.
Aujourd’hui, les difficultés budgétaires du pays aggravent la situation économique et alimentent les vulnérabilités sociales. Avec un ralentissement durable de la croissance durant ces dernières années, les autorités doivent changer de boussole et miser sur l’amélioration de la croissance potentielle, que l’on appelle aussi la croissance à long terme ; qui résulte d’une estimation de l’utilisation optimale des facteurs de production (capital, travail) en l’absence de tensions sur les marchés (travail, biens et services), ce qui suppose une inflation maîtrisée.
Cet objectif exige un certain nombre de réformes : renforcer la loi sur la concurrence en donnant plus de pouvoir au Conseil de la concurrence ; assouplir le Code de change et le Code du travail afin de stimuler l’investissement et de booster les opérations commerciales et financières des acteurs économiques ; encourager l’innovation et la recherche scientifique ; dissiper les nuages de l’incertitude pour restaurer la confiance et freiner la fuite des compétences…
Dans un contexte politique qui demeure hostile à tout accord avec le FMI et qui brille par le blocage des réformes, la croissance potentielle ne pourra que tendre vers zéro. Le choix de rechercher, à tout prix, un financement externe non conditionné par des réformes structurelles ne fera que repousser le rendez-vous avec le défaut de paiement.
Par Noura Harboub-Labidi
Cet article a été publié au Mag de l’Economiste Maghrébin n° 878 du 27 septembre au 11 octobre 2023