Quelques jours après l’offensive du Hamas, le gouvernement israélien a mis à exécution sa menace d’imposer un blocus total à la bande de Gaza. Le scénario d’une catastrophe humanitaire que subit une population de 2,3 millions, privée désormais d’eau et d’électricité, se précise.
« Pas d’électricité, pas d’eau, pas de gaz », telle était la réponse du ministre de la Défense israélien, Yoav Gallant, à l’invasion du Hamas qui a fait 1200 morts en Israël selon le dernier bilan. Dans la foulée, il a également annoncé lundi dernier un « siège total » de la bande de Gaza, un territoire densément peuplé et rongé par la pauvreté dont 70 % des habitants de moins de 30 ans est au chômage. De surcroit, sous blocus israélien depuis 2007.
Gaza dans le noir
Conséquences immédiates des mesures punitives imposées par l’Etat hébreux à 2,3 millions de Gazaouis vivant sur une bande de terre de 41 km de long pour une largeur de 6 à 12 kilomètres et qui subissent de plein fouet les foudres de l’occupant israélien : l’électricité est totalement coupée à Gaza. La seule centrale électrique de l’enclave s’est arrêtée faute de carburant venant d’Israël pour l’alimenter. Sachant que l’enclave palestinienne dispose d’une seule centrale électrique opérationnelle fonctionnant au fioul, carburant provenant également d’Israël. Plus de réfrigérateurs qui fonctionnent, pas de recharge pour les téléphones, plus de téléviseurs. Le noir total.
Ironie du sort. L’enclave palestinienne aurait pu être autonome en énergie car d’importants gisements de gaz ont été découverts il y a une vingtaine d’années le long de la bande de Gaza. Mais les accords d’exploitation en pourparlers avec l’Egypte sont bloqués par l’Etat hébreu, qui lui-même exporte son gaz via l’Egypte.
Les hôpitaux saturés
Mais ces « désagréments » quotidiens- les habitants de Gaza subissent déjà des coupures de courant quotidiennes depuis des années et ne bénéficient que d’une dizaine d’heures d’électricité par jour- ne sont rien en comparaison avec la situation qui prévaut dans les hôpitaux de Gaza. Lesquels, faute de carburant, doivent désormais recourir à des générateurs d’urgence, très onéreux et introuvables sur le marché. Comble de malheur, tous les hôpitaux de Gaza, sans exception, sont débordés à cause de milliers de blessés liés aux bombardements israéliens massifs et indiscriminés.
« Maintenant le plus grand hôpital de Gaza, l’hôpital Al Shifa, ne fonctionne plus qu’avec des générateurs, avec du carburant. Et le carburant devient également un problème alarmant. Etant donné que toutes les frontières avec Gaza et les points de passage avec Israël sont fermés depuis quatre jours ». Ainsi témoigne le porte-parole du Comité International de la Croix-Rouge dans la bande de Gaza.
Or, la situation pourrait être plus alarmante encore dans le cas d’une prévisible offensive terrestre israélienne dans Gaza. « Des combats de rue intenses dans une zone avec une forte densité de population, c’est la perspective d’une mortalité importante. Beaucoup, beaucoup de civils vont mourir. Notre espoir, c’est que notre équipe survive et que nous puissions développer nos opérations humanitaires, médicales qui sont notre cœur de métier », prévient le porte-parole des Médecins sans frontières.
Pénurie d’eau
Autre problème majeur : la pénurie d’eau. En effet, la bande de Gaza souffre continuellement d’un mauvais accès à l’eau potable, avec environ 90 % de la nappe impropre à la consommation, selon les chiffres de l’ONU. La seule source d’eau douce est une réserve souterraine en bord de mer, un aquifère côtier, particulièrement sensible aux infiltrations d’eau de mer et à la pollution. L’eau qui en est issue est ainsi quasi continuellement saumâtre et polluée.
« L’eau était déjà un problème et beaucoup de personnes attrapent des maladies comme la dysenterie ou le choléra car elles boivent de l’eau de mauvaise qualité », affirme une source médicale palestinienne. Tout en ajoutant que « maintenant, sans électricité pour faire fonctionner les centrales et sans l’accès à l’eau israélienne, cela va encore empirer. La population aura bientôt très soif; sans compter que les bombardements israéliens viennent encore aggraver la situation, venant détruire de nombreuses installations et conduites d’eau ».
Et ce n’est pas tout. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a averti que « les réserves de la plupart des commerces de Gaza seront épuisées d’ici à deux semaines ». L’agence onusienne juge « impératif » d’obtenir rapidement des fonds pour assurer l’aide alimentaire à 800 000 Palestiniens.
Cynisme
Dernier espoir pour les Gazaouis assiégés : les Nations unies tentent de trouver le moyen d’acheminer de l’aide humanitaire à Gaza, via l’Egypte, Israël ayant fermé ses postes-frontières avec l’enclave palestinienne. Il ne reste qu’un poste potentiellement, celui de Rafah vers l’Egypte. Mais, comble de cynisme, il a été bombardé à plusieurs reprises par l’armée israélienne depuis lundi dernier.
Un voyage au bout de l’horreur.