Le secteur agricole est un pilier majeur de l’économie de la Tunisie, assurant non seulement la sécurité alimentaire mais aussi la création d’emplois et la gestion des ressources naturelles. Cependant, l’agriculture pluviale, qui constitue 92% de l’agriculture tunisienne, est vulnérable aux aléas climatiques et à la dégradation des sols. Malgré des efforts, la Tunisie demeure déficitaire en matière de production alimentaire, dépendant encore des importations. Cette situation est particulièrement préoccupante dans un pays souffrant de sécheresse depuis plus de deux décennies.
En marge d’un atelier de gestion des connaissances en 2023, nous avons interrogé deux experts pour discuter des opportunités et des perspectives de durabilité dans le contexte post-Programme de mise en valeur des terres et de développement agricole durable (ProSol).
L’un des experts, Slaheddine Ghedhaoui, directeur à la direction générale de l’aménagement et de la conservation des terres agricoles au ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, a commencé par dresser l’état actuel de la dégradation des sols en Tunisie. Il a souligné les limites des ressources en termes de superficie et de quantité de terres arables, ainsi que la rareté de l’eau.
L’étude économique de la dégradation des sols a montré que les investissements dans la gestion durable des terres peuvent générer un retour sur investissement significatif. En investissant un dinar, on peut obtenir un bénéfice de 10 dinars d’ici 2050. Ces investissements sont essentiels pour minimiser l’envasement des barrages, augmenter la productivité agricole et contribuer à la sécurité alimentaire du pays.
Par ailleurs, l’expert a souligné l’urgence de lutter contre la dégradation des sols en Tunisie, en combinant des efforts nationaux et internationaux pour financer les actions nécessaires. Cette étude fournit en l’occurrence des arguments solides pour mobiliser des ressources en faveur de la gestion durable des terres et de la préservation des ressources naturelles.
Toutefois, la Tunisie dispose de ressources limitées en termes de superficie de terres cultivables (environ 5 millions d’hectares) et d’eau mobilisable (environ 4,7 milliards de mètres cubes). La sécheresse des dernières années a mis en évidence la rareté de l’eau. Ce qui renforce l’importance de trouver des solutions pour garantir la sécurité alimentaire et la stabilité sociale.
Il est souligné que des investissements dans la gestion durable des terres, la protection des sols et la mobilisation de l’eau sont nécessaires pour minimiser les effets de la dégradation des sols et de l’érosion. Ces investissements sont justifiés par les avantages économiques qu’ils apportent, notamment en termes de coûts évités et de gains de productivité. L’agriculture intelligente, qui repose sur des données précises, est présentée comme une approche clé pour maximiser les rendements agricoles tout en minimisant les ressources utilisées.
Quid du stress hydrique ?
La Tunisie fait face à un stress hydrique depuis plus de 20 ans, et les nouveaux défis liés aux changements climatiques et au développement socioéconomique rendent la situation encore plus critique.
Ainsi l’intérêt est de mettre en place des stratégies pour mobiliser l’eau verte, c’est-à-dire l’eau qui peut être directement utilisée par les plantes sans stockage. L’objectif est d’améliorer la gestion de l’eau pour augmenter la productivité agricole et réduire le déficit alimentaire.
Rappelons encore une fois que l’agriculture joue un rôle essentiel dans l’économie du pays, employant environ 17 à 20% de la population active et contribuant de 8 à 10% du PIB, en fonction des conditions climatiques.
Pour faire face au stress hydrique, Tom Eickhoff responsable du projet de la Protection et réhabilitation des sols dégradés en Tunisie (Prosol) à la GIZ a mentionné l’importance de l’agriculture intelligente ou climato-intelligente, qui repose sur l’utilisation de données précises pour améliorer la gestion des terres, la fertilisation raisonnée et l’irrigation. Ces approches visent à maximiser les rendements agricoles tout en minimisant les impacts environnementaux.
En conclusion, il y a urgence à agir pour lutter contre la dégradation des sols. De ce fait, les données économiques peuvent aider à mobiliser des financements nationaux et internationaux pour soutenir des initiatives visant à améliorer la durabilité de l’agriculture et à garantir la sécurité alimentaire du pays.