La fin de la guerre froide devait signer la « fin de l’histoire » (selon la célèbre formule de F. Fukuyama). La chute du mur de Berlin et l’effondrement du bloc communiste ont permis l’accélération de la mondialisation économique. Or aujourd’hui, celle-ci est de plus en plus contestée. La crise financière (de 2008) et la pandémie de Covid-19 ont ralenti la croissance du commerce mondial. Un phénomène symbolisé par le ralentissement du « boom chinois » et par la volonté américaine de relocalisation des productions. Toutefois, derrière les signes d’une « fin de la mondialisation », nous assistons en réalité à un nouvel âge de la mondialisation.
Mondialisation : du phénomène historique au concept
Si l’histoire a connu différents mouvements de mondialisation (ou de décloisonnement des marchés et des sociétés), le dernier en date est né à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Une ouverture et des échanges impulsés par l’hégémonie (économique) américaine et des accords commerciaux multilatéraux. A partir de la fin des années 1970, les politiques nationales de privatisation, de déréglementation et de libéralisation des échanges (commerciaux et financiers) internationaux ont permis aux firmes multinationales de mener une stratégie de délocalisation massive de leur production dans les pays en développement.
Au début des années 1990, la notion de « mondialisation » vise le développement de l’interdépendance des économies nationales, l’intensification des échanges et flux de capitaux et les interconnexions transnationales dans les différents domaines politique, culturel, technologique, environnemental et humain.
Une crise de la mondialisation
Dès les années 1990, la mondialisation économique et financière a été contestée par un mouvement social de par le monde, qui vise ses conséquences sociales et écologiques. Néanmoins, c’est surtout une série de crises de nature financière (celle de 2008), sanitaire (pandémie de Covid-19) et géopolitique (guerre en Ukraine et rivalité systémique sino-américaine) qui ont sapé la dynamique de la mondialisation, de plus en plus perçue comme une source de risque et de vulnérabilité, qui nourrit un discours protectionniste. Principaux promoteurs de la mondialisation, les Etats-Unis prennent des mesures protectionnistes et autres plans de subventions massives, dans le cadre d’une guerre commerciale contre la Chine.
Une nouvelle version de la mondialisation ?
La croissance du commerce mondial demeure malgré tout le principal moteur de l’économie mondiale. La mondialisation économique demeure, mais sous de nouvelles formes. Elle inclut de plus en plus la promotion d’un modèle alternatif au système de libre-échange, qui favorise : la production à destination des marchés locaux (ce qui suppose un processus de relocalisation), ainsi que la prise de conscience de l’importance (de la protection) des biens communs (du transport maritime à l’Internet) et de la responsabilité sociale et écologique des entreprises/actionnaires (G. Villemey). En cela, l’idée de « démondialisation » n’est pas synonyme de fin de la mondialisation, mais renvoie à l’avènement d’une nouvelle version de la mondialisation.
Béligh Nabli, auteur de « Relations internationales. Droit, théorie, pratique » (Pedone, 2023, 408 p.)