La politique budgétaire européenne est revenue sur le devant de la scène avec la hausse des rendements obligataires – et donc des coûts d’emprunt – et la révision à la hausse des objectifs de déficit italien, selon un rapport de Goldman Sachs publie ce weekend. À cet égard, l’incertitude quant au retour des règles budgétaires en 2024 constitue un autre facteur qui assombrit les perspectives budgétaires. Les négociations visant à réformer les règles actuelles sont au point mort au niveau politique et les chances d’un accord d’ici la fin de l’année se « rétrécissent ».
La réforme des règles budgétaires a commencé en 2019 et leur suspension pendant la pandémie de Covid a été considérée comme une opportunité de mettre en place un nouveau cadre de gouvernance budgétaire, note Goldman. Cependant, la proposition de compromis initiale et ultérieure de la Commission ont été rejetées par l’Allemagne au début de cette année, conduisant à une impasse politique. Cette impasse est une conséquence de l’exigence d’une réduction annuelle des taux d’endettement : la France s’y est opposée.
L’impasse actuelle sur le fond de la réforme fait désormais également de son calendrier un défi majeur, souligne Goldman Sachs. La suspension des règles budgétaires actuelles expirera le 31 décembre. Cependant, pour commencer l’année prochaine avec de nouvelles règles, il faudrait un vote en plénière au Parlement européen après une majorité au Conseil.
« On peut soutenir que 2024 restera une année de transition en termes de gouvernance budgétaire et les dirigeants politiques pourraient attendre mars ou avril de l’année prochaine pour parvenir à un accord, avant que la Commission ne publie ses directives aux États membres pour 2025 », indique le rapport.
Toutefois, les élections européennes du 6 juin 2024 sont probables pour accélérer le délai pour parvenir à un accord, car il s’avère souvent difficile pour le Parlement européen de se réunir en plénière alors que la plupart de ses membres font campagne pour leur réélection. Goldman voit donc une possibilité importante que les négociations sur les règles budgétaires soient reportées au second semestre de l’année prochaine.
Une alternative possible à un accord sur les nouvelles règles avant le printemps serait que la Commission publie des lignes directrices basées sur les règles actuelles. Elle pourrait, par exemple, s’engager à ne pas imposer la règle du 1/20 de la dette et à se concentrer sur les soldes structurels des États membres, comme elle l’a fait à la fin des années 2010. La Commission pourrait alors chercher à accélérer le processus de réforme une fois que la nouvelle législature aura est en place, probablement d’ici juillet.
L’impact sur le marché
L’agence a affirmé également qu’il est peu probable que la politique budgétaire européenne en 2024 soit affectée par l’évolution des négociations sur les règles budgétaires, car les budgets ont été élaborés sur la base des orientations de la Commission, qui appelait à une année de transition vers les nouvelles règles.
L’Italie pourrait faire l’objet d’une surveillance accrue en raison d’une révision à la hausse de ses objectifs de déficit, mais Goldman ne s’attend pas à ce que le retour aux règles actuelles accroisse à lui seul l’ajustement budgétaire susceptible d’être exigé par la Commission.
La banque américaine estime pareillement que les conséquences d’un échec de réforme des règles au-delà de l’année prochaine seront limitées. La raison en est que les deux options – réforme ou statu quo – ne semblent plus très différentes, selon elle.
D’une part, les nouvelles règles seront accompagnées de garde-fous qui rendront les voies de résolution requises plus rigides que prévu initialement, et le récent compromis de l’Espagne va plus loin dans cette direction. D’un autre côté, les règles existantes étaient déjà mises en œuvre dans une large mesure.
Bien que les règles actuelles ne se concentrent pas explicitement sur la viabilité de la dette à moyen terme et accordent peu d’attention à l’incertitude économique, la Commission a fait preuve à plusieurs reprises de créativité dans l’interprétation des règles et continuera probablement à le faire afin de maintenir un cadre de gouvernance budgétaire flexible.
Le rapport a conclu que le problème le plus important pour les investisseurs est que le fort ralentissement de la croissance, conjugué à la hausse des taux d’intérêt, constitue désormais un contexte macroéconomique défavorable aux trajectoires budgétaires. Par conséquent, la crédibilité de tout futur cadre de gouvernance budgétaire – les règles et leur interprétation ensemble – est ce qui, selon Goldman, façonnera la consolidation budgétaire requise à travers l’Europe.