Cela fait plus d’une semaine maintenant que Gaza et ses habitants sont bombardés 24 heures sur 24. Plus de trois mille morts, sans compter le nombre indéterminé sous les décombres. Quant aux blessés, leur nombre dépasse les 10 000 dont beaucoup mourront par manque de soins. Les rares hôpitaux et structures sanitaires étant détruits ou mis hors service par les bombes israéliennes.
Cela fait plus d’une semaine que les 2,3 millions de Gazaouis sont privés d’eau, d’électricité, de carburant, de nourriture et de médicaments. Les centaines de tonnes d’aides humanitaires, dont celles envoyées par la Tunisie, sont entassées dans l’aéroport égyptien d’El Arich, Israël refusant leur entrée à Gaza.
Netanyahu, qui a perdu la tête avant de perdre son poste, a appelé cette population affamée, assoiffée, blessée et endeuillée à quitter les lieux « si elle veut rester en vie ». Vers où? Vers l’Egypte… Un appel qui dévoile brutalement les plans secrets qu’Israël, dans sa folie des grandeurs, ne semble pas perdre l’espoir d’appliquer un jour : expulser les habitants de Gaza vers l’Egypte et ceux de Cisjordanie vers la Jordanie et réaliser son rêve fou d’ « Eretz Israël ». C’est-à-dire « le grand Israël de la Bible », de la Méditerranée au Jourdain…
Dans un article publié dimanche dernier, le célèbre journaliste américain, Seymour Hersh- l’homme qui a dévoilé dans son site (seymourhersh.substack.com) les crimes américains au Vietnam (My Lai) et en Irak (Abou Ghraib) et ailleurs- a donné d’importantes informations sur ce que prépare Israël dans les heures et les jours qui viennent.
Selon Seymour Hersh, qui cite une source israélienne sans la nommer, « Israël est en train de convaincre le Qatar de financer la construction d’une cité de tentes pour le million de réfugiés qui attendent de l’autre côté de la frontière de Rafah ».
La seconde information donnée par Seymour Hersh, citant toujours sa source israélienne, est que, en forçant plus d’un million de Palestiniens à quitter vers la frontière égyptienne, « Israël compte commencer à larguer des bombes de 5 000 livres de fabrication américaine, connues sous le nom de ‘’bunker busters’’ ou JDAM, dans les zones rasées où les combattants du Hamas sont connus pour vivre et fabriquer leurs missiles et autres armes sous terre. »
Pourquoi recourir à de telles bombes dévastatrices de 5000 livres? Parce que, selon Hersh, « le problème majeur pour les planificateurs de guerre israéliens est leur réticence, malgré la mobilisation de plus de 300 000 réservistes, à s’engager dans une bataille de rue porte-à-porte avec le Hamas dans la ville de Gaza. »
Pourquoi cette réticence? Seymour Hersh, citant sa source israélienne, précise que « les planificateurs israéliens ne font pas confiance à leur infanterie, ni à leur volonté de faire la guerre par un manque désastreux d’expérience au combat. »
Cette impréparation au combat de l’armée israélienne, le monde entier l’a vue grandeur nature le 7 octobre quand elle fut vaincue et humiliée par un groupe d’une centaine de militants palestiniens. Selon la source militaire de Seymour Hersh, « la moitié de l’armée israélienne était engagée depuis une décennie ou plus dans la protection du nombre croissant de petites colonies dispersées en Cisjordanie. » Ceci explique cela.
En d’autres termes, la moitié de l’armée israélienne ne peut combattre que des manifestants palestiniens désarmés et des gamins armés de pierres qu’ils descendent comme des lapins. Cette moitié de l’armée israélienne est aussi très « compétente » quand il s’agit d‘empêcher les fidèles palestiniens de prier à Al Aqsa ou de terroriser les Palestiniens qui répondent aux provocations des hordes de colons. N’oublions pas que la principale raison de l’attaque du 7 octobre est due précisément au ras-le-bol provoqué par les exactions sans fin de cette moitié de l’armée israélienne qui ne sait rien faire d’autre que violer les lieux saints musulmans, protéger les colons et tirer sur les Palestiniens désarmés.
Alors que Gaza est en train de subir le sort de Léningrad en 1942 et de Dresde en 1945, il y a comme une compétition malsaine entre Etats occidentaux à qui incite mieux Israël à se déchainer contre les Palestiniens; à qui aide le plus ce pays dans « son droit à se défendre »; à qui arrive le premier à Tel-Aviv pour consoler Netanyahu et sa bande gouvernementale fasciste. La palme de l’abjection revient peut-être à ce méprisable sénateur américain, Lindsay Graham, qui, sur Fox News, a imploré Israël de « raser Gaza ».
Mais, bien qu’ignorées par les grands médias, des voix en Occident se font de plus en plus entendre pour exprimer leur dégoût du cynisme, de l’hypocrisie et de l’effondrement moral des classes politiques qui tiennent les rênes à Washington, Paris, Bruxelles, Berlin et autres. L’une de ces voix révoltées est celle de l’ancien ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, dont nous reproduisons ici de larges extraits de sa réaction :
« Ceux qui s’efforcent d’obtenir de gens comme moi une condamnation de l’attaque des militants du Hamas n’y parviendront jamais. Et ils ne l’obtiendront jamais pour une raison très simple. Ceux qui se soucient des humains sans aucune discrimination, ceux qui se soucient équitablement des Juifs et des Arabes, doivent se poser une question très simple : quelle est exactement leur idée de la cessation des hostilités? Que les Palestiniens vont déposer les armes et retourner dans la plus grande prison à ciel ouvert du monde où ils sont constamment étouffés par un Etat d’apartheid?
[…] L’apartheid, hier en Afrique du Sud et aujourd’hui en Israël, génère toujours de la violence, car c’est un système misanthrope violent.
Tout être humain vivant sous l’apartheid mourra à un moment donné d’une mort terrible et silencieuse, ou se rebellera et entraînera des innocents avec lui. Le criminel ici n’est pas le Hamas, ni même les colons qui tuent des Palestiniens. Les criminels sont les Européens, nous. Chaque membre de notre société allemande, de notre société française, de notre société grecque, de notre société américaine aura participé à ce crime contre l’humanité au fil des décennies, en gardant la bouche fermée, tant que ce sont les Palestiniens qui meurent et non les occupants.
Cette incroyable tragédie doit donc être transformée pour nous, Européens, en une opportunité de nous réveiller et de nous racheter en exigeant que nous fassions collectivement le premier pas décisif vers la paix, à savoir la destruction de l’état d’apartheid. Tout comme nous l’avons fait en Afrique du Sud. »