Quel crédit accorder à la version de Tsahal, selon laquelle un tir de roquette du Jihad islamique est à l’origine de l’explosion dans l’enceinte de l’hôpital Al-Ahli de Gaza?Alors que tous les indices pointent du doigt un bombardement de l’aviation israélienne, le président américain Joe Biden, en visite à Tel-Aviv, n’hésite pas à disculper son allié de toujours, contre vents et marées.
Qui est responsable de la frappe sur l’hôpital Al-Ahli de Gaza, qui a fait des centaines de morts? Alors que les deux belligérants se renvoient la responsabilité de ce crime de guerre. Un bombardement israélien comme accusent les Palestiniens ou un tir de roquette du Jihad islamique qui a provoqué l’explosion, comme l’affirme Israël?
Dans les deux cas de figure, ce massacre contre les civils dans la soirée du mardi 17 octobre (471 martyrs, 314 blessés, dont 28 dans un état critique, selon le décompte macabre du ministre de la Santé à Gaza), aura par son impact majeur embrasé la rue arabe et ébranlé le soutien inconditionnel des Occidentaux à l’Etat hébreu. Un pays perçu par certains comme victime d’attaques terroristes aveugles perpétrées par des « animaux », selon « l’élégante » expression du ministre israélien de la défense, Yoav Gallant. Ce dernier, en signe de représailles, a coupé l’eau, l’électricité et le gaz à 2,3 millions de Gazaouis.
Désormais, c’est aux autorités de l’occupation de prouver qu’elles n’ont pas pris délibérément pour cible ces centaines de familles palestiniennes qui se sont refugiées avec femmes et enfants dans l’enceinte de l’hôpital Al-Ahli pour fuir les bombardements incessants, dans une zone urbaine au cœur de l’enclave palestinienne. En vain.
Tissu de mensonges
Le hic, c’est qu’il n’y a aucun journaliste étranger, aucune source indépendante pour corroborer la version israélienne selon laquelle une roquette du Jihad islamique aura provoqué l’explosion. Et paradoxalement, l’absence de témoins se retourne contre Israël.
En effet, pour réfuter les accusations de Hamas lui amputant la responsabilité d’une frappe d’aviation contre l’hôpital à Gaza, l’armée israélienne- qui a toujours assuré ne jamais prendre pour cible des infrastructures de santé, pourtant l’OMS avait déjà recensé lundi « 111 infrastructures médicales visées, 12 cadres soignants tués et 60 ambulances visées »- a réfuté cette accusation. Tout en affirmant que « d’après des informations des services de renseignements, le Jihad islamique est responsable du tir de roquette raté ».
« Les preuves, que nous partageons avec vous tous, confirment que l’explosion dans un hôpital de Gaza a été causée par le tir d’une roquette du Jihad islamique ayant échoué ». Ainsi affirmait pour sa part le porte-parole militaire Daniel Hagari, lors d’une conférence de presse, mercredi 17 octobre. « Cette analyse professionnelle est basée sur des renseignements, des systèmes opérationnels et des images aériennes, qui ont tous été recoupés », poursuivait-il.
Selon ses dires, « il n’y a pas eu de tirs de l’armée depuis la terre, la mer ou les airs qui ont touché l’hôpital. Nos systèmes radar ont localisé les missiles tirés par les terroristes de Gaza au moment de l’explosion et l’analyse de la trajectoire montre que les roquettes ont été tirées près de l’hôpital », a-t-il encore ajouté.
Sauf que les « preuves » brandies par l’armée israélienne rappellent curieusement celles avancées par le Premier ministre israélien de l’époque, Naftali Bennett. Celui-ci assurait que la mort de la journaliste d’Al-Jezira Shireen Abu Akleh, tuée en 2022 lors d’une opération israélienne, avait été provoquée par des tirs palestiniens et non israéliens. Mais quelques mois plus tard, il reconnut piteusement qu’il y avait « une forte probabilité » pour que ce soit l’Etat hébreu le responsable de sa mort!
La naïveté de Biden
A savoir que le président américain, Joe Biden, arrivé mercredi à Tel Aviv, a déclaré aux côtés du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu que des « données » qui lui ont été apportées par le département américain de la défense « disculpaient » Israël. Ah bon!
Ainsi, Biden a-t-il pris connaissance des déclarations attribuées à Hananya Naftali, ancien membre de l’équipe de communication du premier ministre Netanyahou? Déclarations dans lesquelles il évoquait, mardi 16 octobre, la frappe israélienne justifiée selon lui « par la nécessité de tuer des terroristes réfugiés dans l’hôpital » ? Sachant qu’il a curieusement effacé son tweet, qu’il a remplacé par la version officielle de l’armée israélienne.
L’actuel locataire de la Maison Blanche a-t-il également lu, avant son déplacement en Israël, le journal américain Wall Street Journal. Lequel vient de révéler que la bombe avec laquelle l’hôpital Al-Moamdani à Gaza a été attaqué, était la bombe MK-84. Une bombe à souffle et à fragmentation fabriquée par les Américains, qui pèse environ une tonne et possède un pouvoir destructeur très élevé?
Alors, cynisme, naïveté du renseignement de l’Oncle Sam, réputé l’un des meilleurs au monde? Ou complicité coupable avec l’auteur avéré de ce crime abject? Aux victimes de la frappe israélienne, dotée d’une bombe de fabrication américaine d’en juger.