En 2022, l’écart entre le PIB et son niveau potentiel estimé est passé en territoire positif. Ce n’est pas une bonne nouvelle et cela explique bien la faible croissance qui accable la Tunisie.
La croissance économique a progressé de 2,5 % (aux prix constants de 2015) sur l’ensemble de l’année 2022; après avoir évolué de 4,4 % en 2021. Pour la BCT, cette tendance s’explique par la bonne tenue des services marchands, grâce à la confirmation de la reprise du secteur touristique.
Economie en surchauffe, mais…
La croissance a également bénéficié de la bonne performance des industries exportatrices.
La croissance potentielle a évolué, durant l’année 2022, constamment en-dessous de la croissance effective. Au vu de ces évolutions, l’écart entre le PIB et son niveau potentiel estimé est passé en territoire positif
Du côté de la demande, l’évolution du PIB a dépassé, en 2022, celle de la production potentielle. Cela n’est pas tout à fait une bonne nouvelle. Car elle ne reflète pas l’amélioration de la valeur ajoutée; mais plutôt la détérioration des capacités de production dans plusieurs secteurs. C’est le résultat de plusieurs années marquées par la baisse de la productivité, la dégradation du climat des affaires, le désinvestissement et la persistance du chômage structurel.
Ainsi, la croissance potentielle a évolué, durant l’année 2022, constamment en-dessous de la croissance effective. Au vu de ces évolutions, l’écart entre le PIB et son niveau potentiel estimé est passé en territoire positif. Dénotant donc l’existence de pressions inflationnistes sur les capacités de production provenant de la demande.
Souci d’inflation
En effet, l’écart de production est un indicateur économique qui mesure la différence entre la production réelle d’une économie et sa production potentielle. C’est-à-dire le volume maximal de biens et de services qu’elle peut produire quand elle fonctionne à plein régime, en utilisant toutes ses capacités.
Un écart positif, soit la situation actuelle de la Tunisie, signifie que la production réelle est supérieure à la production de pleine capacité. C’est ce qui se passe lorsque la demande est si forte que, pour la satisfaire, les usines et les travailleurs sont obligés de mettre les bouchées doubles et de fonctionner bien au-delà de leur niveau d’efficience maximale.
En d’autres termes, il mesure la pression inflationniste dans l’économie. Toutes choses égales par ailleurs, si l’écart de production est positif sur longue période, de sorte que la production réelle est supérieure à la production potentielle, les prix vont commencer à monter sous l’effet de l’accroissement de la demande. C’est exactement ce qui se passe actuellement en Tunisie.
Les politiques monétaire et budgétaire peu efficaces
Notre situation rend le choix en matière de politique monétaire extrêmement compliqué. Théoriquement, nous sommes en période d’expansion puisque la production dépasse son niveau potentiel. Pour freiner les tensions inflationnistes, la BCT a donc relevé ses taux d’intérêt. Mais étant donné la raison réelle derrière cet écart, il est clair qu’il ne s’agit pas de la solution idéale.
Idéalement, il faut que la politique budgétaire soit adaptée, en étant restrictive pour réduire la demande et combattre l’inflation par une baisse des dépenses et/ou une hausse des impôts. Ce que nous voyons est que le budget de 2024 comprend une hausse des dépenses publiques de 6,6 % et une pression fiscale en hausse de 20 points de base à 25,1 %.
Idéalement, il faut que la politique budgétaire soit adaptée, en étant restrictive pour réduire la demande et combattre l’inflation par une baisse des dépenses et/ou une hausse des impôts
Nous avons donc l’impression que tout vise à combler les trous à court terme. Les contraintes se multiplient et ne laissent pas de possibilités pour agir efficacement. Le blocage risque de durer et de rendre une reprise extrêmement difficile.