Le plafonnement des prix du pétrole russe introduit par le G7 et l’UE à la fin de l’année dernière dans le but de réduire les revenus énergétiques de Moscou s’est révélé de moins en moins efficace. C’est ce qu’a rapporté dimanche dernier le Wall Street Journal (WSJ).
L’UE et les pays du G7 se sont mis d’accord sur un plafond de 60 dollars le baril pour les exportations de pétrole russe par voie maritime en décembre 2022. Et en février dernier, ils ont imposé des restrictions similaires sur les exportations de produits pétroliers russes. Le mécanisme fonctionne en permettant aux entreprises occidentales de transporter, d’échanger ou d’assurer le pétrole russe uniquement s’il est vendu à 60 dollars ou moins le baril.
Alors que les revenus de Moscou provenant des ventes de pétrole et de gaz ont chuté de 46 % sur un an en janvier, à 426 milliards de roubles (4,6 milliards de dollars), après l’entrée en vigueur du plafonnement des prix; ils ont depuis augmenté de façon spectaculaire. Selon les dernières données du ministère russe des Finances, les revenus pétroliers et gaziers du pays se sont élevés à 1 635 milliards de roubles (17,6 milliards de dollars) en octobre. Soit plus du double d’un mois à l’autre et une hausse de plus d’un quart par rapport à octobre 2022.
Selon le WSJ, ce revirement a été provoqué par les actions réussies de Moscou pour contourner les prix plafonds, qui, selon lui, violaient à plusieurs reprises les règles du marché mondial. La Russie aurait transféré ses exportations de brut sur une flotte de pétroliers vieillissants, ou flotte fantôme, sur laquelle les prix plafonds ont limité l’influence.
Les recettes d’exportation de brut du pays ont plus que doublé le mois dernier, malgré les sanctions
Un rapport récent de l’École d’économie de Kiev affirmait que la flotte fantôme de pétroliers russes comptait 180 navires en septembre. Selon les analystes interrogés par le WSJ, la taille même de la flotte garantit que la plupart des exportations russes ne sont pas soumises au plafonnement des prix.
En outre, les plus grands acheteurs de pétrole de la Russie – la Chine, l’Inde et la Turquie – n’ont pas adhéré au plafonnement des prix occidental. Ainsi, la Russie a redirigé vers ces pays une plus grande partie de son pétrole auparavant destiné à l’Occident. Les acheteurs étant désormais assurés, la Russie a progressivement réduit les réductions sur ses exportations introduites plus tôt cette année.
Selon des données récentes de S&P Global, plus de la moitié des exportations pétrolières russes sont désormais expédiées avec une assurance hors G7, contre environ 35 % en janvier. Ce qui montre également que le mécanisme de plafonnement des prix devient de moins en moins pertinent.
« Le plafonnement des prix a fonctionné comme prévu, mais il est désormais obsolète ». C’est ce qu’a déclaré Natasha Kaneva, responsable de la stratégie des matières premières chez JPMorgan Chase, aux médias. D’autres analystes notent que le mécanisme pourrait toujours être appliqué; mais cela nécessiterait davantage de contrôle de la part du G7 et de l’UE. Et notamment des sanctions strictes en cas de violation, des exigences de documentation plus détaillées pour prévenir la fraude aux attestations et des enquêtes sur les coûts d’expédition et d’assurance gonflés.