La rencontre artistique et littéraire entre la doctorante en lettres et critique d’art Béatrice Dunoyer et l’artiste peintre tuniso-allemand Rachid Allagui ne peut être que fructueuse et une pierre à l’édifice dans l’univers enchanté des arts plastiques. Elle est à l’origine d’un livre qui retrace le parcours artistique et les thématiques abordées par l’artiste peintre dans son œuvre. Un livre éponyme intitulé Rachid Allagui.
Béatrice Dunoyer a pris soin de présenter le livre et le peintre lors d’une conférence de presse tenue au siège de librairie Al Kitab, à mutuelle ville, à Tunis. Béatrice Dunoyer, lors de la présentation de l’artistique a regretté que Rachid Allagui ne soit pas reconnu en Tunisie, contrairement à sa notoriété en Allemagne. D’ailleurs, elle indique que son travail s’inscrit dans le cadre de combler une lacune. « Je suis tombée sous le charme de ses toiles. C’est une peinture dont on a besoin aujourd’hui, dans un monde où les médias et la politique veulent nous faire croire à la guerre entre les civilisations ». Pour cette critique d’art, Rachid Allagui « représente l’espoir, la tolérance, la fraternité et l’humanisme. Et c’est cela qui constitue l’essentiel et l’essence de tous ses tableaux », lance-t-elle.
Dans le même sillage, elle estime que cet artiste est un pont entre l’Orient et l’Occident et entre sa Tunisie natale et l’Allemagne et plus précisément Cologne, la ville qu’il a adoptée et où il exerce sa profession de galeriste. « C’est un artiste qui hybride les mondes, qui a un lien fraternel qui lie tous les hommes, de par sa double culture présente dans tous ses tableaux. De par son style Rachid hybride les univers et les références dans une transe culturelle. Il peut mélanger les couleurs de son pays natal, couleur vives et claires, aux couleurs sombres de son pays d’adoption », poursuit-elle.
Les gens dans la peinture de Rachid Allagui
Notre artiste s’intéresse aux gens de tous les jours aux hommes simples. Lesquels pourraient tout aussi bien être des Tunisiens que des étrangers ou des hommes qui peuplent le monde entier. A travers ses toiles, il aime raconter des histoires. Ces histoires créent toujours des liens de par cette double culture. De ce fait « sa peinture essentielle c’est le quotidien et les petite gens. Il les rend sympathiques : les femmes en train d’étendre le linge, les hommes au marché, les prostituées, les clochards et les gens de la mine », relève-t-elle.
La critique d’art affirme qu’elle s’est permis de faire un parallèle entre Rachid Allagui et le poète français Jacques Prévert, vu plusieurs points de ressemblance. Elle affirme que Prévert était nul en français mais cela ne l’a pas empêché de devenir un grand poète et Rachid Bouallagui est daltonien; mais cela ne l’a pas empêché de devenir un artistique peintre notoire. Ainsi Prévert n’était pas destiné à devenir le grand poète qu’il est; Rachid Allagui n’était pas amené à devenir un grand peintre.
Autre ressemblance ,« Jacques Prévert était le chantre des petites gens de Paris et Rachid Allagui celui des petites gens de Tunis et de Cologne ». A savoir que le poète français et le peintre tuniso-allemand vouent un grand amour aux petites gens. La critique parle de « simplicité plurielle qui rejaillit dans les tableau de Rachid Allagui ». L’artiste n’a pas cessé de peindre les femmes dans ces tableaux où il braque la lumière sur la beauté intérieure. « La femme est toujours sujet dans ses toiles et non un objet », lance-t-elle. « Pour Rachid, la femme incarne le mouvement de la vie qui s’oppose à l’immobilisme de l’absurde. Elle est ni fragile, ni gracile ».
70 ans d’exposition et aucune ride
Rachid Allagui a derrière lui près de 70 ans d’exposition, de peinture, d’interview. « Je ne compte plus les galeries où j’ai exposé ou les journalistes qui m’ont interviewé ». Revenant sur le livre, il le considère comme un « livre colossal », réalisé par les soins d’une « grande critique d’art ». Il indique qu’il a ouvert sa galerie à Cologne depuis 15 ans où les artistes exposent. Par la même occasion, il ne manque pas d’étaler les spécificités de Cologne comme ville propice à l’art et la créativité. Quant à sa démarche artistique, l’intervenant affirme qu’il saisit le moment et l’immortalise dans ses toiles.
« Je raconte la vie, ce que j’ai vu, les monuments touristiques, les monuments culturels, les coutumes et les traditions que ce soit de ma ville que de la ville qui m’a adopté. J’ai trouvé un créneau entre l’Afrique et l’Europe ». L’artiste indique, également, qu’il ne s’intéresse pas aux sujets sombres comme les guerres et les massacre. « Je cherche la joie de vivre », confie-t-il.
Né en 1940 dans la Médina de Tunis, Rachid Allagui est rentré aux Beaux-arts de Tunis à l’âge de 15 ans. En 1961, il intègre les Beaux-arts de Cologne. En 1990, il ouvre sa propre galerie à Cologne. Ses œuvres ont été exposées dans le monde entier : en Europe (Paris, Londres, Prague, Vienne, Budapest, Stockholm, Copenhague), en Amérique, au Caire et à Istanbul; et bien sûr en Tunisie et en Allemagne.