Le principe d’un Etat palestinien est inscrit en 1947 dans la résolution 181 de l’Assemblée générale des Nations-Unies prévoyant un plan de partage de la Palestine. Si l’Etat juif est né, l’Etat arabe demeure quant à lui à l’état de projet. Pire, la nouvelle guerre à Gaza éloigne un peu plus la perspective d’un Etat palestinien. Pourtant, seule une solution politique et juste pourra mettre fin au conflit israélo-palestinien. Cette solution repose forcément sur le droit des Palestiniens à l’autodétermination. Ce qui pose immanquablement la question de la création de leur Etat.
Avec la Guerre des Six jours, l’armée israélienne prend possession notamment de la Cisjordanie – y compris Jérusalem-Est – et de Gaza. La résolution 242 du Conseil de sécurité (22 novembre 1967) évoque « le retrait des forces armées israéliennes de(s) Territoires occupés » dans le cadre de l’instauration d’une paix durable. Elle restera lettre morte.
La colonisation israélienne
Au contraire, au début des années 1970, les gouvernements israéliens successifs, dirigés par le parti travailliste ou le Likoud, ont développé une politique de colonisation dans les territoires occupés. L’argument de la sécurité d’Israël est alors invoqué (« Plan Allon »), les colonies faisant office de « défenses avancées ». À la fin des années 1970, le discours prend une tournure religieuse. Le mouvement « Goush Emounim » (« Bloc de la foi ») se trouve conforté par l’arrivée au pouvoir de la droite nationaliste incarnée par le Likoud. Laquelle accélère l’accaparement des terres arabes et la colonisation. Si les considérations sécuritaires demeurent, une lecture religieuse s’affirme avec force dans la volonté de judaïser les territoires occupés. Le mythe du « Grand Israël » incluant la Judée et la Samarie (et donc une grande partie de la Cisjordanie) renforce et nourrit la politique de colonisation israélienne.
La recherche de la continuité territoriale entre les colonies israéliennes conduit à l’extension des quartiers de colonisation et à la constitution de véritables villes, reliées par des routes dites « de contournement » accessibles aux seuls colons. La Cisjordanie devient un territoire mité. Les restrictions de circulation en son sein en accentuent le morcellement. Enfin, un plan de judaïsation de Jérusalem-Est est clairement à l’œuvre à travers l’installation de Juifs dans la vieille ville arabe et dans ses alentours par voie d’expropriation et peu de nouvelles constructions.
La stratégie diplomatique
Cette politique de colonisation est un obstacle à un Etat palestinien viable. L’Etat palestinien est impensable tant qu’Israël poursuivra sa politique coloniale et n’admettra pas de négocier les trois points fondamentaux suivants : le retour aux frontières de 1967 aménagé par des échanges de territoires; le partage de Jérusalem; et une solution négociée sur la question des réfugiés de 1948.
Notons malgré tout les avancées diplomatiques en la matière. Depuis 1988 et la proclamation de l’Etat palestinien, 85 pays étrangers l’ont reconnu : des pays arabo-musulmans, mais aussi la Chine, l’Inde, l’ensemble des pays de l’ex-URSS. Un second mouvement de reconnaissance a eu lieu à partir des années 2010, notamment en Amérique latine (Argentine, Brésil, Chili, Bolivie, Pérou…). Au total, 139 des 193 Etats membres de l’ONU reconnaissent aujourd’hui la Palestine comme un Etat souverain.
Les « Accords d’Oslo » ont donné naissance à l’Autorité palestinienne, mais il s’agit là d’une structure politico-administrative non souveraine, sous contrôle de fait d’une puissance étrangère, mais privée du droit de les exercer pleinement. Malgré ses limites, l’Autorité palestinienne a ouvert un front diplomatique tendant à la reconnaissance internationale de l’Etat palestinien.
Le Président Abbas a lancé en 2011 une offensive diplomatique pour sortir de l’impasse des négociations bilatérales – stériles car asymétriques – avec l’Etat israélien. Cette stratégie s’est traduite par un premier succès diplomatique : le 31 octobre 2011, les Palestiniens ont été admis à l’UNESCO comme Etat membre à part entière. Ce succès s’est rapidement concrétisé par l’inscription de la basilique de la Nativité de Bethléem, en Cisjordanie, au Patrimoine mondial de l’UNESCO.
Cette même stratégie a amené l’Autorité palestinienne à présenter au Secrétaire général Ban Ki-moon une demande d’adhésion de l’« Etat palestinien », comme membre à part entière des Nations-Unies « sur la base des lignes du 4 juin 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale ». Demande légitime mais irréaliste vu les conditions d’obtention d’un tel statut. Transmise au Conseil de sécurité, organe décisionnel en la matière, la demande palestinienne s’est heurtée à l’absence de la majorité requise et (surtout) à la menace de l’usage du veto américain. Pragmatique, le Président de l’Autorité palestinienne a reformulé sa demande dans une version moins ambitieuse : celle d’un simple statut d’Etat non-membre observateur aux Nations-Unies. Ce statut, issu de l’usage ou de la pratique institutionnelle – il n’existe pas formellement dans la Charte des Nations-unies – avec les droits de participation limités qui s’y attachent, requiert une majorité simple de l’Assemblée générale des Nations-Unies. L’Autorité palestinienne disposait jusqu’alors d’un statut d’« entité observatrice permanente », obtenu par l’OLP en 1974. Elle avait à ce titre une représentation permanente au Siège de l’ONU et le droit « d’assister à la plupart des réunions et de consulter la documentation » de l’organisation.
Ainsi, soixante cinq-ans après avoir adopté le plan de partage de la Palestine en deux Etats, l’Assemblée générale des Nations-Unies s’est prononcée le 29 novembre 2012 en faveur de la reconnaissance de ce statut d’« Etat non-membre observateur » des Nations-Unies (résolution votée par 138 voix, neuf contre et 41 abstentions).
La résolution de l’Assemblée générale des Nations-Unies ne crée pas un Etat souverain et indépendant palestinien, et l’obtention de la qualité d’Etat (non) membre des Nations unies ne vaut pas reconnaissance universelle de cet Etat. Il n’empêche, outre sa dimension politique et symbolique, ce changement de statut n’est pas négligeable pour exister dans le système international…