Les chiffres de l’économie mondiale sont très inquiétants. La dette globale a atteint le niveau record de 307 400 milliards de dollars au troisième trimestre 2023 et le ratio dette/production dans les marchés émergents s’est établi lui aussi à un pic, selon l’Institute of International Finance (IIF).
Le fournisseur de services financiers a estimé que la dette mondiale serait de 310 000 milliards de dollars d’ici la fin de l’année, soit une augmentation de plus de 25% en cinq ans. Il a averti qu’une évolution vers le populisme politique pourrait faire grimper encore ce volume l’année prochaine.
50 élections en 2024
La particularité de l’année 2024 est le nombre élevé d’élections qui sont de plus de 50, avec des rendez-vous phares aux États-Unis, en Inde, en Afrique du Sud, en Turquie et au Pakistan. Elles vont se dérouler dans un contexte de montée de polarisation politique croissante et de tensions géopolitiques accrues. Tous les indices convergent vers l’ouverture des voies à davantage de politiques populistes qui pourraient accroître les emprunts et les dépenses de l’État, et relâcher la discipline budgétaire. Cela pourrait créer davantage de volatilité sur les marchés.
L’IIF a également mis en garde contre le fait que le service de la dette absorbait une part croissante des revenus dans le monde entier. Il avait atteint des niveaux alarmants au Pakistan et en Égypte. Aux États-Unis, les charges d’intérêt du gouvernement devraient accaparer 15% des recettes d’ici 2026, contre moins de 10% actuellement.
Les deux tiers de l’augmentation de la dette au cours du dernier trimestre proviennent des marchés développés, avec en tête les États-Unis, le Japon, la France et le Royaume-Uni. Les marchés émergents de la Chine, de l’Inde, du Brésil et du Mexique ont également enregistré de fortes évolutions.
Les deux tiers de l’augmentation de la dette au cours du dernier trimestre proviennent des marchés développés, avec en tête les États-Unis, le Japon, la France et le Royaume-Uni
Alors que le ratio mondial de la dette au PIB n’a guère changé (333%), il est désormais à 255% dans les marchés émergents, soit 32% de plus qu’au cours de la même période il y a cinq ans. Les principaux contributeurs sont la Russie, la Chine, l’Arabie saoudite et la Malaisie. Le Chili, la Colombie et le Ghana ont enregistré les plus fortes baisses de ce ratio.
L’IIF indique que la dette publique a connu la plus forte augmentation au troisième trimestre 2023, ajoutant que les déficits budgétaires restent bien supérieurs aux niveaux d’avant la pandémie dans de nombreux pays. Le rapport note également que la dette souveraine en défaut a atteint un record de plus de 554 milliards de dollars jusqu’à la fin de 2022, dont environ la moitié est une dette obligataire.
L’IIF indique que la dette publique a connu la plus forte augmentation au troisième trimestre 2023… Le rapport note que la dette souveraine en défaut a atteint un record de plus de 554 milliards de dollars jusqu’à la fin de 2022
L’endettement des entreprises privées décélère
L’institut a averti que le fardeau de la dette des ménages et des entreprises continue de s’alourdir dans les grandes économies, notamment en Chine et aux États-Unis, ce qui a des répercussions sur tout, des élections à la transition vers l’énergie propre.
Néanmoins, l’appétit des entreprises pour l’emprunt est à son plus bas niveau depuis plusieurs années, impacté par un contexte de resserrement des conditions de financement et de fragmentation géoéconomique accrue. Les perspectives de financement de la lutte contre le changement climatique semblent de plus en plus menacées comme le prouve le ralentissement marqué des émissions de dette ESG.
La solution passe par la réduction de la dette des pays à faible et moyen revenu qui peuvent causer des perturbations sur les marchés et freiner le parcours vers une économie plus verte.
Une seule chose nous paraît sûre : cette dette mondiale a été prêtée pour ne jamais être remboursée.
Pour cela, il faudra mettre en place un cadre juridique multilatéral pour la restructuration et l’allègement de la dette souveraine de ces pays. Ce cadre devrait permettre des moratoires temporaires, des suspensions de litiges et des prêts en arriérés afin de protéger la capacité des pays débiteurs à respecter leurs obligations économiques et sociales. Une telle mesure renforcera la gestion de la dette, réduira le risque de surendettement et contribuera à l’expansion du financement environnemental, social et de la gouvernance.
Enfin, il faut être convaincu qu’en tout, une seule chose nous paraît sûre : cette dette mondiale a été prêtée pour ne jamais être remboursée.