Le Conseil bancaire et financier (CBF) a clôturé, vendredi 24 novembre 2023, son projet intitulé « Développement des réseaux d’agent de paiement dans le nord-ouest Tunisien ». L’événement s’est tenu à la Maison du banquier à Tunis.
Le président du Conseil bancaire et financier, Néji Ghandri, a expliqué, lors de son intervention, qu’il s’agit d’une expérience pilote dans les régions de Jendouba, Bizerte et Béja pour la formation et l’accompagnement des agents de paiement.
Quatre établissements de paiement ont participé à ce projet avec la coopération allemande, la GIZ. Quant aux membres du CBF, ils ont travaillé pendant six mois sur le projet, un délai très réduit pour accompagner les agents de paiement, a assuré M. Ghandri.
Dans ce cadre, 100 agents de paiement ont été accompagnés et formés. 20 d’entre eux ont été équipés pour le travail. « On a détecté 4 000 agents potentiels qui veulent adhérer au système d’établissement de paiement, ce qui va créer des postes d’emploi », dit-il.
Toujours selon le président du CBF, cette action s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale de l’inclusion financière et de la digitalisation et devrait faciliter l’accessibilité aux systèmes de paiement. C’est une complémentarité entre le système de financement classique, à savoir les banques et les établissements de paiement.
L’intervenant a formulé le souhait de voir l’expérience se généraliser dans les autres régions, invitant à développer les réseaux d’agents de paiement dans les autres régions, ce qui permettra de réaliser l’objectif de l’accessibilité financière et intégrer l’informel « qui constitue une part importante dans notre réseau de paiement et la population à faible revenu ».
M. Ghandri annonce qu’il y aura prochainement un cycle de formation sur ce sujet.
De son côté, Bilal Yan Hagen, chef de projet « Inclusion financière en Tunisie », indique que la GIZ œuvre pour aider le gouvernement tunisien à mettre en place une stratégie en la matière. Il considère que le projet en question est l’un des projets clés au niveau du développement du secteur privé et le développement de la finance digitale inclusive où nous cherchons principalement l’ouverture et l’utilisation de des walets, le portefeuille électronique. Et le bon développement de l’Internet en Tunisie a permis une bonne pénétration du Smartphone, avec un taux d’utilisation similaire entre les hommes et les femmes. Par contre, au niveau du service financier, il existe une grande disparité entre les deux sexes de plus de 17%.
Des profils exclus
Le contenu et les recommandations du rapport de l’activité « Concertation et intelligence collective » autour du cadre réglementaire et fiscal et la veille technologiques ont été dévoilés.
Mariem Kraiem, expert-comptable au cabinet Twills Consulting, explique que parmi l’un des objectifs du rapport c’est de mettre le doigt sur les pistes d’amélioration du cadre réglementaire et fiscal des agents de paiement. Elle indique que plusieurs obstacles réglementaires freinent l’activité d’agent de paiement, et certaines dispositions rejettent des profils cibles de l’inclusion financière pour ce métier. « Aujourd’hui, il y a une exigence qui veut que l’agent de paiement doit être un commerçant alors qu’au nord-ouest tunisien, il existe des agriculteurs, des artisans et autres prestataire de services. Avec le cadre réglementaire actuel, ils ne peuvent pas être des agents de paiement », dit-elle.
Elle regrette qu’un agent de paiement n’ait pas d’agrément -donc pas reconnu- de la Banque centrale de Tunisie (BCT) bien qu’il ait signé une convention avec l’établissement de paiement, par conséquent il peut subir de problèmes avec la brigade financière ou douanière surtout qu’il travaille avec la liquidité.
Mohamed Ali Trabelsi (Partner Accompany Consulting) s’est focalisé sur la veille technologique. Pour lui, il s’agit de répondre à cette question, comment la technologie peut aider l’agent de paiement à jouer son rôle au niveau des canaux d’accès.
L’intervenant a indiqué qu’il a été constaté qu’il existe trois canaux d’accès dont deux sont utilisés en Tunisie, à savoir le mobile et l’Internet et l’USSD qui est fourni par les opérateur mais pas utilisé par les agents de paiement. « L’Importance de ce canal est dans la facilité et l’absence de prérequis, la disponibilité d’un Smartphone et une connexion internet. « Si on ouvre ce canal on va permettre à chaque citoyen tunisien d’offrir un service de paiement. Dans d’autres pays, la généralisation du USSD a permis la démocratisation des paiements et l’envolée des chiffres », argumente-t-il.
De la nécessité d’explorer le paiement en ligne
«La palette de services offerts par les établissements de paiement est de 30 à 40% du potentiel de ce que peut offrir un agent de paiement à travers la technologie. Le benchmarking a bel et bien montré que l’agent de paiement est devenu une vraie plateforme, une vraie agence bancaire qui offre des services financiers et non financier très larges ».
« En Tunisie, on doit passer aux bonnes pratiques et atteindre des taux de proposition de services financiers assez larges, soit 90% », dit-il.
Il existe des fournisseurs capables de fournir cette technologie, souligne-t-il. Pour cette raison, Si le marché tunisien se développe, avec un réseau d’agents de paiement, alors les éditeurs de logiciels vont considérer la Tunisie comme un marché intéressant, ce qui va permettre aux établissements de paiement de rentabiliser leurs investissements technologique qui existent, explique-t-il en substance .
Le rapport a émis quelques recommandations : mise en place d’un cadre réglementaire de l’USSD accessible avec des prix adéquat; l’agent de paiement peut se transformer en agent de recouvrement pour l’Etat; l’établissement de paiement doit équiper l’agent de paiement du matériel nécessaire (Internet et téléphone).