« La solution à deux Etats, qu’on a enterrée, est plus que jamais, aujourd’hui, la seule pour venir à bout du conflit israélo-palestinien ». C’est ce qu’a toujours plaidé l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin. Il aura souvent rappelé, à juste titre, que « les peuples n’ont jamais oublié que la cause palestinienne et l’injustice faite aux Palestiniens étaient une source de mobilisation considérable. La question palestinienne reste pour les peuples arabes la mère des batailles ».
Soupçonné d’hostilité envers Israël et même taxé d’antisémitisme par une bonne partie des médias français- à l’instar des chaînes de télévision d’information en continu (LCI, Cnew, BFMTV, sans oublier France 2 et TF1), lesquelles se sont alignées sans vergogne sur les positions israéliennes, notamment depuis l’assaut de Hamas contre l’Etat hébreu le 7 octobre dernier- l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin, l’homme qui osa dire non aux Américains lors d’un discours historique devant l’ONU en février 2003, alors qu’ils s’apprêtaient à envahir l’Irak, vient de rappeler une évidence : critiquer Israël n’est pas synonyme de haine vis-à-vis des juifs.
« Tous les chemins mènent à Rome, mais tous les chemins de la critique ne mènent pas à l’antisémitisme. On peut critiquer les Etats-Unis sans être forcément antisémite. On peut critiquer le sionisme messianique d’une partie du gouvernement israélien sans être antisémite. On peut soutenir l’idée de justice pour le peuple palestinien sans être antisémite », martelait-il dimanche 26 novembre sur LCI.
Pour une solution à deux Etats
En effet, l’ancien Premier Ministre de Jacques Chirac a toujours plaidé pour une solution à deux Etats pour résoudre le conflit israélo-palestinien. Un mois pile après les attaques menées par le Hamas qui ont fait des centaines de morts et déclenché une violente riposte de Tsahal, notamment dans la bande de Gaza, il déclara avec lucidité, le 7 novembre au micro de France Info : « Tous les Israéliens l’ont compris : ils ne peuvent plus vivre avec les Palestiniens. Il faut donc une politique de séparation qui doit être digne : c’est-à-dire conférer aux Palestiniens un Etat viable et véritable, qui pourra se construire et être d’autant plus en paix. »
« Une politique de vengeance »
« Il faut arrêter cet engrenage de la force et de la vengeance. Il faut travailler pour apporter une réponse de justice […] A certains moments, il faut du courage. La direction qu’il faut suivre, c’est d’empêcher Benyamin Netanyahou de continuer sa logique suicidaire qui fera d’Israël un Etat assiégé ». Ainsi a-t-il exhorté, alors que l’armée israélienne poursuit son offensive terrestre dans la Bande de Gaza.
Cette riposte, a estimé De Villepin, n’est « ni ciblée ni proportionnée ». Tout en ajoutant que « ces dommages collatéraux ne sont pas accidentels, mais ils sont prévisibles et parfaitement assumés ».
Et de poursuivre : « Nous sommes essentiellement dans une politique de vengeance. Israël a le droit à la légitime défense, mais la légitime défense n’est pas un droit indiscriminé à tuer des populations civiles ». Et de conclure, prophétique : « Cette guerre menée aujourd’hui est l’illusion d’une paix possible. Cela n’arrivera pas, car ni la force, ni la vengeance n’assureront la paix et la sécurité. C’est la justice qui le fera».
Mais, pourra-t-on parler d’un « Etat viable » en présence de plus 450 000 colons israéliens en Cisjordanie occupée? Dominique de Villepin n’hésite pas à faire la comparaison avec la fin de la Guerre d’Algérie qui a vu le départ d’un million de Français d’Algérie. C’est « le prix de la sécurité pour Israël », a-t-il asséné.
En attendant d’en arriver éventuellement à une solution à deux Etats, « il faudra une nouvelle administration sous la protection des Nations Unies dans la bande de Gaza. Sinon on va se retrouver avec un territoire de Gaza détruit, sans aucune forme d’administration civile. Je pense que la meilleure stratégie, c’est d’avoir une administration internationale, qui peut-être en partie arabe, sous l’égide de l’ONU ».
« La paix est toujours utopique, mais il y a une raison d’y croire : c’est que tant que nous n’aurons pas fait cela, Israël ne vivra pas en sécurité et nous non plus », argue celui qui fut ministre des Affaires étrangères en 2002 et 2003.
L’autisme de Netanyahou
Toutefois, la paix est-elle possible avec un gouvernement imbibé de « sionisme messianique »? L’homme d’Etat français a souligné le 7 novembre sur les colonnes du Figaro « l’incapacité de Benjamin Netanyahou à tirer les leçons de l’histoire ». Et ce, après que ce dernier a affirmé qu’Israël assurerait pour une durée indéterminée, la responsabilité générale de la sécurité dans la bande de Gaza après la guerre.
« Le gouvernement de Netanyahou doit ouvrir les yeux. Ce dernier a échoué doublement le 7 octobre. Et dans sa capacité à assurer la protection du peuple israélien et en ayant encouragé une politique d’occupation et de colonisation qui continue en Cisjordanie. Laquelle constitue une autre menace pour Israël si un deuxième front venait à s’ouvrir », prévient-il enfin.
Il fallait de la lucidité et surtout une bonne dose de courage pour annoncer ces vérités qui fâchent!