Contrairement à l’atermoiement de certains régimes arabes ayant normalisé avec l’Etat hébreu tout en gardant un œil vigilant sur leurs propres populations largement acquises à la cause palestinienne, la Tunisie a décidé d’accueillir un certain nombre de patients palestiniens dans les hôpitaux publics et privés du pays. Et ce, en dépit de ses modestes moyens.
Comment expliquer le silence assourdissants des « frères arabes » à propos des massacres perpétués à Gaza, une prison à ciel ouvert où s’entassent 2 millions de personnes coincées dans 360 km²? Et où pas moins de 15 000 personnes, dont plus de 6 150 enfants et plus 4000 femmes sont mortes sous les bombardements israéliens, sans compter les blessés qui se comptent par milliers?
Le monde arabe déchiré
C’est que chaque pays arabe balaie devant sa propre porte : le régime égyptien ne cache pas son hostilité aux Frères Musulmans, donc au Hamas devenu par défaut le porte-étendard de la résistance palestinienne; certains pays du Golfe préfèrent s’abriter sous le parapluie israélien contre la menace iranienne; alors que la Jordanie est partagée entre son engagement dans les accords d’Abraham et sa population à moitié d’origine palestinienne.
Reste l’Algérie, l’Irak, la Syrie, le Yémen qui affichent les seuls soutiens sans faille à la cause palestinienne. Sans oublier, il va sans dire, la Tunisie, dont la position officielle au diapason avec la rue depuis Bourguiba, en passant par Ben Ali, était et reste constante, massive et sans atermoiement. Et cela par sa posture à l’international ou son refus de normalisation avec Israël et pas que dans les paroles. « En effet, la solidarité n’est pas simplement une solidarité de “communiqués”, mais une solidarité effective », souligna le chef de l’Etat, mercredi dernier.
« Un devoir sacré »
En effet, à l’issue d’une réunion tenue mercredi 29 novembre au palais de Carthage- en présence du chef du gouvernement, Ahmed Hachani, du ministre de la Défense nationale, Imed Memmich, du ministre des Affaires étrangères, Nabil Amar, du ministre des Affaires sociales, Malek Ezzahi, du ministre de la Santé, Ali Mrabet, du ministre-conseiller auprès du président de la République, Mustapha Ferjani, et du président du Croissant Rouge, Abdellatif Chabbou, le président de la République, Kaïs Saïed donna des consignes pour continuer le pont aérien des aides fournies par le peuple tunisien aux Palestiniens par l’intermédiaire du Croissant-Rouge. Ainsi que la fourniture de médicaments et des instruments chirurgicaux, tout en appelant aux dons du sang.
De plus, un communiqué émanant de la présidence de la République annonça qu’outre la possibilité d’envoyer des cadres médicaux et paramédicaux tunisiens spécialisés à Gaza, la Tunisie accueillera « prochainement » un certain nombre de patients palestiniens dans les hôpitaux publics et privés du pays. Ceci se fera en coordination entre les différents services concernés du ministère de la Défense nationale, des Affaires étrangères, de la Santé, du Transport, et du Croissant-Rouge tunisien.
« Les frères palestiniens seront accueillis dans les établissements hospitaliers publics ainsi que dans les établissements hospitaliers privés qui ont exprimé leur volonté de participer à cette mission sacrée, tout comme les pharmaciens et les médecins”, peut-on lire dans le texte du communiqué présidentiel.
Ceci est « un devoir sacré », conclut la même source. Sans toutefois en préciser le nombre.
A savoir que déjà au début du mois de novembre, le ministre de la Santé annonçait qu’un hôpital de campagne d’une capacité de 120 lits avait été créé pour les Palestiniens à Ben Arous. Est-ce suffisant?
Un acte bénévole?
La nouveauté c’est que certaines cliniques privées se sont dites prêtes à les prendre en charge. Ainsi, le président de la Chambre nationale des cliniques privées, Boubaker Zakhama, a renouvelé « la disponibilité du secteur privé et des cliniques à soutenir les efforts de l’Etat tunisien dans l’accueil des blessés palestiniens pour recevoir les soins nécessaires en Tunisie ».
Lors d’une intervention téléphonique dans La Matinale de Shems Fm, hier jeudi 30 novembre 2023, il a également précisé que « le secteur médical privé en Tunisie dispose toutes les compétences et est prêt à accueillir les blessés palestiniens et à contribuer à leur hébergement et leur suivi».
Bénévolement, à titre gracieux, ou en contrepartie de la contribution de l’Etat? Apparemment, M. Khezama a préféré rester dans le vague!