Depuis la normalisation des relations entre le Maroc et l’Etat hébreu en décembre 2020, concrétisées en octobre 2021 par un accord de coopération militaire, Rabat a multiplié ses commandes en armement israélien. Selon La Tribune, la dernière en date consiste à l’acquisition d’un satellite espion israélien pour observation terrestre. Et ce, au nez et à la barbe de deux géants de l’aéronautique française, anciens fournisseurs attitrés du Royaume chérifien.
L’information fuitée par le quotidien économique français La Tribune est tombée au pire timing. Puisque le fait de révéler que Rabat a opté pour un choix stratégique en sélectionnant un groupe israélien pour la conception d’un nouveau satellite espion, et ce, en pleine guerre entre Israël et le Hamas, est considéré par plusieurs observateurs comme une manœuvre destinée à embarrasser les autorités marocaines auprès de sa population largement acquise à la cause palestinienne.
Des raisons politiques
D’autres y voient même la main de la France écartée de la course, dont les groupes aéronautiques ont été éconduits; malgré leur historique de coopération avec le Maroc. Pour insuffisances technologiques dans son offre ou à cause des relations tendues entre Paris et Rabat qui auraient pesé sur la décision marocaine et fait basculer la balance en faveur d’Israël? Pour preuve, Rabat aurait même refusé de recevoir des représentants de la Direction générale de l’armement (DGA), département du ministère français des Armées, qui souhaitait faire du lobbying au profit des offres des groupes français.
Le duo français sur la touche
Ainsi, selon le média français citant des sources « concordantes », le Maroc a sélectionné l’été dernier un groupe israélien, Israel Aerospace Industries (IAI); et ce, pour l’acquisition d’un nouveau satellite espion, l’Ofek-13. Un modèle d’observation doté de capacités avancées, notamment d’un radar à synthèse d’ouverture. Il devrait remplacer Mohammed-VI A, lancé en 2017 et fabriqué par le duo français composé d’Airbus Defence & Space (ADS) et de Thales Alenia Space (TAS). Ce choix intervient alors que les groupes français, anciens fournisseurs du Royaume en la matière, ont participé à l’appel d’offres pour la construction de ce satellite dernier cri.
Il va sans dire que le duo formé par Thales et Airbus, des entreprises françaises bien établies dans le domaine de la technologie spatiale, comptait bien remporter une nouvelle fois ce marché. Mais Rabat, à la surprise générale, opta pour la technologie israélienne dans le choix de son nouveau satellite.
Pour rappel, les deux satellites français baptisés Mohammed VI A-B ont été acquis par le Maroc en 2013 pour un contrat conséquent de plus de 500 millions d’euros. Il s’agit d’un système composé de deux satellites de reconnaissance et d’observation de la Terre (A et B) de type Pléiades. Le premier satellite a été lancé en novembre 2017, puis le second un an plus tard, en novembre 2018.
A savoir que Thales avait fourni la charge utile, comprenant l’instrument optique, le sous-système de transmission d’images et le segment sol pour le traitement et la production d’images. Tandis qu’Airbus était en charge de son intégration, ainsi que de la fourniture de la plateforme et du segment sol pour la planification des missions et le contrôle du satellite.
Copinage
Mais qui est l’heureux élu ayant supplanté les deux géants de l’aéronautique française? Il s’agit selon les informations fournies par La Tribune, du groupe israélien Israel Aerospace Industries actif dans les secteurs de la défense et de l’aérospatiale. Le groupe IAI fabrique des systèmes de pointe pour la cyber-sécurité, la sécurité aérienne, spatiale, maritime, terrestre et intérieure; ainsi que des avions militaires et des hélicoptères. Son expertise englobe des systèmes et des solutions dans des domaines aussi divers que les satellites de reconnaissance et les radars, s’étendant à tous les aspects de la commande, du contrôle, et des communications, y compris dans les sphères de l’informatique et de la cybernétique.
Toujours selon la même source, Amir Peretz, le PDG d’Israel Aerospace Industries, ancien ministre de la défense israélienne d’origine marocaine, aurait sans aucun doute joué un rôle déterminant dans cette préférence pour le contact avec Israël plutôt qu’avec la France.
« La réussite des industriels tricolores à l’export reste dépendante des relations bilatérales qu’entretiennent la France et son président vis-à-vis du pays qui lance un appel d’offres ». Telle est la situation que déplore à juste titre La Tribune.