La Stratégie de dépistage de l’infection à VIH en Tunisie souligne une prévalence faible et stable, avec une transmission hétérosexuelle prédominante. Tel est en grande partie ce qui ressort de la conférence nationale intitulée “Le VIH/SIDA et les droits des populations vulnérables en Tunisie” qui se déroule les 14 et 15 décembre en Tunisie.
Ainsi cet événement vise à réunir des acteurs et actrices clés de la société civile, des décideurs, des professionnels de santé, des universitaires et les toutes parties prenantes. Et ce, afin de discuter de la place des droits humains dans la riposte au VIH en Tunisie. L’accent est mis sur les droits des populations vulnérables, notamment les personnes vivant avec le VIH (PVVIH), les travailleurs du sexe, les usagers de drogues injectables, les personnes LGBTQI++, les migrants et d’autres groupes marginalisés.
Aujourd’hui, les défis sont de taille. Où en sommes-nous vis-à-vis des campagnes de sensibilisation? Quel est l’état des lieux? A l’heure actuelle, on se demande si, au fil des années, le nombre de personnes vivant avec le VIH a baissé ou s’il est encore en augmentation.
Insaf Bouhafs, la responsable du programme d’accès à la justice au sein de l’ONG ASF Avocats sans frontières en Tunisie, souligne plusieurs objectifs sur les droits des populations vulnérables en Tunisie. Le premier consiste à réunir les acteurs de la société civile, les scientifiques et les professionnels de la santé pour évaluer les actions passées. Le deuxième objectif est de mettre en avant les droits humains, car les inégalités entravent la riposte. Enfin, elle aborde les priorités du plaidoyer pour éradiquer le sida d’ici 2030.
Pour corriger la situation, il est nécessaire d’améliorer la sensibilisation des acteurs en contact direct avec les personnes vivant avec le VIH. Mais aussi renforcer les compétences du personnel de santé et des universitaires; tout en luttant contre les préjugés dans le domaine de l’emploi. Il reste beaucoup à faire pour atteindre l’égalité parfaite.
En ce qui concerne l’état des lieux, Insaf Bouhafs souligne que la sensibilisation de proximité, par le biais d’institutions publiques ou d’associations, s’avère plus efficace que les campagnes médiatiques traditionnelles. Ces sessions permettent aux individus de dissiper leurs doutes, de poser des questions et de recevoir des informations de manière directe.
En marge de cet événement, Arnaud Péral, coordinateur Résident des Nations unies, dévoile qu’un programme conjoint sera mis en place pour la Tunisie et l’Algérie. Il rappelle notamment qu’un cadre a été signé avec le gouvernement tunisien pour la période 2021-2025, incluant la riposte au VIH/SIDA à travers une série d’actions. Ainsi, il déclare : « C’est au cœur de nos priorités en tant que système. Malheureusement, seuls 26 % ont accès au traitement et la stigmatisation et l’accès aux soins restent d’importants défis pour les communautés. »
Il souligne également que la stigmatisation, le conservatisme et le recul observés dans le monde actuel font régresser les droits acquis, mettant ainsi en péril la réponse au VIH. L’objectif ambitieux pour 2030 nécessite une accélération conjointe.
ONUSIDA : 70 % des nouvelles infections chez les populations clés
Par ailleurs, le rapport de l’ONUSIDA met en avant les inégalités comme barrières à la riposte, avec 70 % des nouvelles infections chez les populations clés.
En Tunisie, des obstacles législatifs et sociaux entravent l’accès des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) et des populations clés aux soins et aux droits. La Conférence Nationale vise à rassembler divers acteurs pour promouvoir une riposte inclusive, renforcer le leadership communautaire et identifier des axes prioritaires de plaidoyer.
Ramy Khouili, médecin et militant des droits de l’Homme en Tunisie et Directeur de l’ONG Avocats sans frontières indique que le nombre de nouvelles infections chez les porteurs du VIH diminue chaque année dans le monde, mais reste élevé dans les pays de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, notamment en Tunisie. Ce paradoxe suscite l’attention des spécialistes et des organisations de la société civile.
Il fait également savoir que, selon les statistiques du ministère de la Santé et de l’ONUSIDA pour l’année 2022, le nombre d’infections en Tunisie s’élevait à 7 100 personnes vivant avec le VIH. Mais le taux de traitement ne dépasse pas 26 %. Soulignant ainsi l’urgence d’une intervention pour éduquer toutes les personnes vivant avec le virus.
En somme, beaucoup reste à faire. Au-delà des chiffres, les résultats attendus incluent la reconnaissance des défis, une collaboration renforcée, le renforcement des communautés et l’identification d’axes prioritaires de plaidoyer.
Rappelons que le VIH reste l’un des défis de santé publique les plus importants au monde, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
D’après les dernières données de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), grâce aux progrès réalisés dans l’accès au traitement antirétroviral (TAR), les personnes séropositives pour le VIH vivent désormais plus longtemps et en meilleure santé. En outre, il a été confirmé que le TAR permet d’éviter une transmission ultérieure du VIH.
Selon les estimations, 29,8 millions de personnes recevaient un traitement contre le VIH en 2022. A l’échelle mondiale, 76 % des 39,0 millions de personnes vivant avec le VIH en 2022 recevaient un traitement antirétroviral.
Des progrès ont également été accomplis dans la prévention et l’élimination de la transmission mère-enfant et dans la survie des mères. En 2022, 82 % de l’ensemble des femmes enceintes vivant avec le VIH, soit 1,2 million de femmes, ont reçu des antirétroviraux.
Enfin, l’OMS a publié un ensemble de lignes directrices normatives et aide les pays à formuler. De même qu’elle aide à mettre en œuvre des politiques et des programmes visant à améliorer et à intensifier la prévention, le dépistage, le traitement, le suivi, les soins et les services de soutien en matière de VIH pour toutes les personnes qui en ont besoin.