Peu de temps après son recul quelques mois auparavant, la masse de billets et monnaies en circulation (BMC) est repartie à la hausse, dépassant de nouveau le seuil de 20 milliards de dinars (Mds TND) encore une fois cette année.
Le premier dépassement a coïncidé avec les fêtes de l’aïd, suscitant des inquiétudes. Les accusations à la Banque centrale de recourir à la planche à billets étaient à leur pic.
Mouvements en dents de scie
Fin juin 2023, les BMC étaient de 20 377 MTND, l’un des records historiques à l’échelle nationale. A la date du 13 décembre, ils sont à 20 005 MTND. Par rapport à la fin de décembre 2022, il y a toujours une amplification de cette masse de 1 701 MTND.
La dynamique monétaire de la première moitié de l’année a été principalement alimentée par la réponse budgétaire liée au refinancement de la dette interne. Le Trésor a dopé le rythme des émissions de bons du Trésor et d’obligations souveraines. Et comme cela passe par le système bancaire, cette politique constitue le principal facteur de retrait de liquidité pour les établissements de crédit.
La détente observée aux mois d’octobre et de novembre provenait de l’accumulation des devises. Durant le premier semestre, les banques se sont adressées au marché de change dans le cadre d’opérations d’achat de devises contre dinars. Ces transactions avaient pour objectif de répondre aux besoins de paiement des importations énergétiques pour le compte des entreprises industrielles. Jusqu’à fin juin, lesdites opérations ont créé un besoin additionnel de liquidité de l’ordre de 855 MTND.
Avec l’excellente recette touristique et la bonne tenue de la balance commerciale, les banques n’avaient plus besoin de recourir au marché de change, ce qui leur a permis de générer des ressources en dinar. Au cours du 3ème trimestre, les banques ont vendu des devises contre dinars pour une enveloppe totale de 2 967 MTND. En même temps, un retour d’environ 2 388 MTND entre juillet et septembre aux caisses des banques a été enregistré. Le recours aux refinancements de la Banque centrale a mécaniquement baissé et les BMC ont suivi la même trajectoire.
Retour des tensions
Les tensions sont, toutefois, revenues en cette fin d’année. Les mêmes facteurs peuvent être cités. Le premier est l’insuffisance de mobilisation de sources de financement en devises par l’Etat. En même temps, la Tunisie a dû payer une échéance de 500 millions d’euros fin octobre, outre d’autres tranches d’emprunt de moindre taille. La saison touristique a pris fin et le flux financier a diminué, alors que les secteurs productifs cherchent à importer des matières premières et des produits semi-finis. Pour répondre à ces besoins, les banques vont naturellement chercher à avoir des devises sur le marché contre la vente de dinars.
Le second est la montée en flèche des besoins de financement de l’Etat sur le marché. Si nous prenons ce seul mois de décembre, nous constatons qu’il a collecté environ 1 215 MTND sous la forme d’obligations et 1 000 MTND sous forme de bons du Trésor à court terme. D’autres opérations de plus petites tailles sont en cours, mais c’est déjà beaucoup. Les banques manquent donc de dinars, ce qui justifie l’intervention de la Banque centrale et explique la hausse des BMC.
Dans ce contexte, et avec les fêtes de fin d’année, repasser sous les 20 Mds de dinars d’ici la fin de l’année serait difficile. Il y aura des retraits massifs par les Tunisiens auprès des guichets et des DAB, outre les besoins des entreprises et de l’appareil public. L’exercice budgétaire de la Tunisie a été réussi, mais il a laissé des séquelles dans le secteur financier.