Dans la tradition scolaire devenue il est vrai obsolète, le directeur d’école sifflait avec autorité la fin de la récréation et ramenait ainsi les élèves au labeur dans leur classe. On aurait aimé que cette tradition perdure, notamment en ce début d’année administrative. On aurait aimé trouver l’équivalent d’un directeur d’école, dont l’autorité serait incontestable, pour siffler la fin de l’année 2023 avec tous ses échecs, ses dérives et ses absurdités et ramener tout le monde à la classe pour que les choses sérieuses reprennent, dans l’espoir de réussir cette nouvelle année 2024.
Pour le décor, et en respectant l’analogie, il y a bien un directeur élu qui, d’ailleurs, n’arrête pas de siffler la fin de la récréation pour tous les corrompus et les comploteurs de la place. Il y a aussi une classe dirigeante, un peu plus âgée, il faut le dire, que les élèves du primaire. Elle est plus âgée au vu de l’état civil, mais il n’y a aucun moyen de savoir pour ce qui est du reste. En tout état de cause, l’ambiance générale, faite de criailleries et de bousculades, y est. Il suffit à chaque fois de tirer au sort une des transformations de la nouvelle République pour voir se déchainer les incontournables de la cour de récré. La dernière de ces transformations est la question de la formation du Conseil national des régions et des districts, la deuxième chambre du Parlement.
Avec un taux d’abstention record de plus de 88% et pour faire court, le peuple a conclu qu’il n’y avait rien à dire. Mais qu’importe, après tout, les élections ne sont qu’un concours, ensuite, il va falloir remettre les pieds sur terre. Les festoyeurs expérimentés du 31 décembre savent que les lendemains de fête sont souvent difficiles, surtout quand on a abusé des boissons fortes. Mais qu’à cela ne tienne, n’importe comment, il est urgent de retrouver ses esprits et, par exemple, de payer les injonctions juridiques au sujet de l’ardoise de la BFT. Les responsables actuels ne sont pas responsables, mais il est toujours utile de rappeler, quels que soient les résultats de toutes les élections à tous les étages, que les créanciers ne se transforment jamais en généreux philanthropes. Il ne faut pas être un expert pour s’en rendre compte.
Il faut dire que le pays, manifestement plein d’experts de toutes sortes, est en panne d’expertise pour trouver des solutions politiques, économiques, sociales, sanitaires, éducatives, et quelques autres broutilles. Le Président, qui assure l’intérim de tout l’Etat, en sait quelque chose. Lui qui doit tout faire, doit faire le tour des usines, de la sidérurgie à la fabrication de jus, en passant par les dépôts de bus ou municipaux. C’est dire qu’on ne chôme pas du côté de la direction suprême, faut-il maintenant que les élèves savent faire l’alternance entre l’amusement et l’apprentissage.
A moins que, comme nous le rappelle un de nos chroniqueurs radio, parmi les experts que le monde nous envie, ce sont les services occultes qui sèment la discorde dans l’école et font que les élèves refusent de regagner leur classe. Des récalcitrants qui ont osé injurier leurs aînés et qu’on a dû punir devant les camarades, histoire de donner l’exemple. On parle de Zied El Heni, dont les images menottes aux poignets ont fait le tour de la toile. Zied El Heni qui, pour un mot malheureux prononcé durant la matinale de la radio IFM, est incarcéré en attendant que jugement soit rendu sur la base du décret 54 depuis jeudi 28 décembre. Un cas d’école…
Mot de la fin est disponible dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 885 du 3 au 17 janvier 2024