Le premier panel de cette rencontre, organisée par « Association des Anciens de l’ISCAE – Alumni ISCAE et Grant Thornton Tunisie en partenariat avec AMI Assurances, le 13 janvier 2024 au siège social de AMI Assurances, s’est penché sur les perspectives et les enjeux de relance économique suite à l’adoption de la loi de loi de finances 2024. Pour sa part, le second panel, intitulé « Répercussions sociales, sociétales et managériales », avec des interventions très pointues qui collent à la réalité, à savoir celles de El Moez Ben Amor, Partner Grant Thornton, Alma Hafsi, psychologue et enseignante universitaire, et de Tatiana Marchand, coordinatrice RSE pays et directrice communication et bien-être à Téléperformance.
Innovation et entrepreneuriat
El Moez Ben Amor, Partner Grant Thornton, remarque que malgré les efforts déployés et la panoplie des textes de loi publiés, le climat des affaires ne cesse de se dégrader d’une année à une autre. Les problèmes administratifs dus principalement au manque de coopération, à la bureaucratie et à l’insuffisance de digitalisation persistent à ce jour et constituent une des principales causes pour lesquelles l’investissement tarde à se relancer.
Il précise que dans ce cadre et pour assurer une reprise économique, la loi de finances 2024 a prévu certaines mesures fiscales dont notamment celle prévue par l’article 33 visant à encourager la création des entreprises et l’initiative privée.
Ainsi les entreprises créées et ayant obtenu une attestation de dépôt de déclaration d’investissement auprès des services concernés par le secteur d’activité au cours des années 2024 et 2025 bénéficient de l’exonération de l’IS ou de l’IRPP pendant une période de 4 ans à compter de la date d’entrée en activité effective.
Il y a lieu de noter que cette mesure n’est pas applicable à toutes les entreprises constituées. Sont exclues, les entreprises exerçant dans le secteur financier, les secteurs de l’énergie (à l’exception des énergies renouvelables), des mines, de la promotion immobilière, de la consommation sur place, du commerce et des opérateurs de télécommunication.
Par ailleurs, il est important de souligner que ne sont pas éligibles audit avantage les entreprises créées dans le cadre d’opérations de transmission ou suite à la cessation d’activité ou suite à la modification de la forme juridique de l’entreprise, et ce pour l’exercice de la même activité relative au même produit ou au même service, ainsi que les entreprises créées entre personnes exerçant une activité de même nature que l’activité de l’entreprise créée concernée par l’exonération ayant la qualité des gérants, des associés ou ayant un lien de parenté de premier degré.
Il convient de rappeler que cette mesure a déjà été appliqué dans le passé dans le cadre des lois des finances 2018 et 2019.
Les questions qu’on se pose concernant la teneur de cette mesure sont les suivantes : est-ce qu’il y a eu une évaluation de l’impact de cette mesure sur l’investissement ? Est-ce qu’elle a permis de relancer le climat des affaires ? Quel est le nombre d’emplois créés ? Quelles régions ont tiré profit des nouveaux investissements ? Est-ce que les sociétés créées sont viables ? Autant de questions pour lesquelles on n’a pas de réponses.
Loi des finances et répercussions sur la santé mentale du citoyen
Alma Hafsi, psychologue et enseignante universitaire, précise que « parler de l’impact émotionnel et psychologique des changements financiers sur les individus et le citoyen de manière générale nous conduit directement à parler des liens entre la santé globale, physique et psychologique, et les conditions sociales d’existence, qui servent d’appui à la description des relations entretenues entre les individus et leur environnement social ».
Pour de nombreux Tunisiens, les soucis d’argent constituent la plus grande source de stress, plus que la santé personnelle. Le stress financier, la tension et l’anxiété sont les résultats de préoccupations liées à l’argent et aux ressources financières insuffisantes pour répondre aux besoins de la vie quotidienne.
Les dispositions de la LF 2024 ne font que renforcer encore plus la vulnérabilité du citoyen, qui est absorbé par des inquiétudes sur la manière de :
- gérer les dépenses du ménage au quotidien
- subvenir aux demandes de la famille et des enfants
- payer les factures
- assurer une stabilité financière
- vouloir épargner pour atteindre ses objectifs à court et à long terme mais en vain,
- faire face aux dépenses imprévues.
La pression constante de l’inflation et les difficultés croissantes à faire face aux dépenses essentielles impactent fortement la santé mentale et physique des individus dont les conséquences sont graves et variées sur le bien-être. Cette situation de stress financier affecte non seulement la santé mentale et physique du citoyen mais aussi les relations interpersonnelles, familiales et de surcroit la qualité du travail.
Les conséquences sur la santé
- anxiété,
- fatigue physique,
- difficultés respiratoires,
- dépression et troubles du sommeil,
- irritabilité et sautes d’humeur
- baisse de l’attention et de la concentration
- puisement émotionnel et burnout.
Les conséquences sur la santé physique
- maladies cardiovasculaires,
- hypertension artérielle,
- maux de tête chroniques
- affaiblissement du système immunitaire.
Conséquences sur la qualité de vie au travail et la performance globale de l’entreprise
- productivité,
- perte d’engagement et d’implication,
- insatisfaction
- démotivation.
Les préoccupations liées à l’argent peuvent :
- distraire les employés,
- les empêcher de se concentrer sur leurs tâches
- réduire leur efficacité.
Les tensions financières peuvent créer à la maison des conflits et des problèmes relationnels avec les proches. Les employés stressés financièrement ont souvent du mal à gérer leur stress et leurs émotions, créant ainsi un cercle vicieux de stress.
Dans la vie quotidienne du citoyen tunisien, l’irrégularité de l’approvisionnement des produits de base, notamment le pain et le lait, engendre un sentiment d’humiliation, de colère, de dégoût, d’insécurité, de peur, et déception vis-à-vis des choix politiques et stratégiques du pays.
Cette situation engendre la frustration de ne pas être capable d’être à la hauteur de ce que le pays mérite, sachant qu’on n’a jamais atteint cette situation de précarité.
Cette peur de se projeter dans l’avenir, le climat d’incertitude et de flou engendre un état d’angoisse chez les parents qui se trouvent dans une situation d’impuissance pour nourrir leurs enfants et que dire de leur garantir un avenir sûr. Leur espoir est malheureusement brisé.
La RSE, un levier de performance
Tatiana Marchand, coordinatrice RSE pays et directrice communication et bien-être à Téléperformance, a mis à profit son expérience et son expertise sur le volet RSE afin d’expliciter la façon dont il est nécessaire d’opérer dans les entreprises quelle que soit leur taille afin d’offrir une expérience collaborateur à la hauteur des attentes et des enjeux, puis aussi de collaborer avec l’ensemble des parties prenantes pour assurer la pérennité de la démarche de responsabilité sociale/sociétale et être en capacité aussi de redistribuer d’une certaine façon ce qu’on réalise au sein des organisations et aussi d’inciter les parties prenantes à opérer de la même manière dans l’éco système pour être valeur d’exemple et grandir ensemble pour un meilleur avenir, plus durable et plus juste.
Elle a ajouté que la clé de voûte du fonctionnement optimal de l’entreprise est la manière dont on valorise et on prend soin de ses employés, meilleurs ambassadeurs de l’organisation ! Ce sont eux qui feront briller (ou pas…) la marque employeur, ce sont eux qui recommanderont l’entreprise auprès de leur famille et de leurs amis et puis ce sont eux qui génèreront les performances permettant de générer les bénéfices !
Ces mêmes bénéfices permettront aux organisations d’investir pour le confort, le bien-être, la sécurité et l’innovation afin de permettre aux équipes de travailler dans les meilleures dispositions et là on est en plein dans le cercle vertueux.
“J’entends souvent que la RSE c’est un coût et que seules les grandes les entreprises qui peuvent se le permettre… Certes il y a des coûts mais surtout il y a des retours sur investissement, le fameux ROI qui se mesure sur les indicateurs sociaux et financiers c’est donc la garantie que la RSE fonctionne !”
Source : communiqué