L’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, l’UNRWA, est accusée par Israël et ses alliés d’avoir parmi ses employés des acteurs de l’attaque du Hamas du 7 octobre contre l’Etat juif. En réaction, les Etats-Unis et autres puissances occidentales ont décidé suspendre leur aide à l’’UNRWA. Une série de décision qui va à l’encontre de la décision de la Cour internationale de justice (CIJ), puisqu’elle risque de renforcer la catastrophe humanitaire et le risque de génocide à Gaza.
On peut aussi souligner deux points. D’une part, le timing de cette « affaire UNRWA » n’est pas anodin : elle a été sortie pour tenter d’étouffer l’onde de choc de la décision de la CIJ qui souligne le risque de génocide à Gaza. D’autre part, il y a un contraste saisissant entre l’absence de réaction-sanction occidentale contre Israël suite à la décision de la CIJ et la rapidité de leur réaction-sanction contre l’UNRWA. Cela illustre la politique à géométrie variable qui décrédibilise plus que jamais les Occidentaux. Quoi qu’il en soit, derrière la mise en cause de l’UNRWA c’est le sort des réfugiés Palestiniens qui est mis en lumière.
L’origine des réfugiés
Le peuple palestinien est en partie un peuple de réfugiés et d’exilés. Avant même la défaite des armées arabes et la proclamation officielle de l’État d’Israël, le déplacement et l’expulsion des Palestiniens sont largement entamés, mais la « Nakba » de 1948 est le principal exode palestinien (750 000 personnes). Les attaques des différentes milices juives- dont la Haganah- ont entraîné l’exode massif de Palestiniens vers la Cisjordanie (alors jordanienne), la bande de Gaza (qui relevait alors de l’autorité égyptienne), le Liban, la Syrie et la Jordanie. Avec la proclamation de l’État d’Israël, les Palestiniens « déplacés » sont désormais considérés comme des « réfugiés » des zones conquises par l’armée israélienne. En 1967, la « Guerre des Six jours » provoque un nouvel exode pour près de 250 000 Palestiniens; avant que la politique de colonisation des terres arabes force régulièrement au départ les Palestiniens.
Le « droit au retour »
Depuis la « Nakba » de 1948, le « droit au retour » est une pierre angulaire du mouvement national palestinien. Ce droit est exclu par Israël, qui en fait une question existentielle : compte tenu de la fragilité des équilibres démographiques, le retour des réfugiés en Israël risquerait selon les sionistes de détruire l’identité juive d’Israël. Pourtant, ce dernier avait admis, lors de la Conférence de paix de Lausanne en 1949, le contenu de la résolution 194. Israël justifie son reniement par le fait d’avoir été contraint d’accepter ce texte en échange de son admission à l’ONU.
À l’occasion du plan de partage de la conférence de Lausanne de 1949, les jeunes États arabes se montrent disposés à accueillir les réfugiés palestiniens, mais s’avèrent bientôt incapables de répondre à leurs besoins (logement, soins médicaux, alimentation, services sociaux de santé ou d’éducation) et font appel à des aides extérieures, notamment venant de l’ONU. L’espoir d’un retour immédiat des réfugiés ayant disparu, l’Assemblée générale crée en décembre 1949 l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), afin de coordonner les activités liées aux réfugiés, avec les gouvernements locaux.
La résolution 194 ne donne aucune définition du « réfugié Palestinien ». Bien que la majorité des réfugiés soit des palestiniens; on trouve également parmi eux, certes en nombre plus réduit, des Turcs, des Grecs, des Palestiniens juifs et d’autres nationalités présentes de part et d’autre de la ligne d’armistice de 1949. Ceci explique le choix de l’appellation « réfugié de Palestine » par l’UNRWA (contrairement à réfugié palestinien), catégorie qui couvre également les descendants des Palestiniens qui sont devenus réfugiés en 1948-1949.
Responsable de l’éducation, de l’action sociale et médicale et de l’aide alimentaire auprès des 3,8 millions de réfugiés palestiniens de 1948 et de leurs descendants, répartis au Liban, en Syrie, en Jordanie et dans les territoires palestiniens, l’UNRWA dispense ses services dans des dizaines de camps au total. Pour autant, l’existence de l’UNRWA n’éteint pas la question du droit au retour; la dépendance des réfugiés vis-à-vis d’elle contribue au contraire à la nourrir.
Des réfugiés palestiniens dans les pays arabes
Par ailleurs, avec la présence physique de réfugiés palestiniens dans les pays arabes voisins, la question palestinienne revêt pour les régimes concernés une dimension politique et sociale aigue. Du reste, les réfugiés ne jouissent pas du même statut ou traitement juridique, politique et social dans ces différents pays arabes. Si en Jordanie, la majeure partie des réfugiés palestiniens a obtenu la nationalité du royaume, la Syrie et le Liban leur refusent ce droit comme l’ensemble des droits politiques. Les réfugiés du Liban pâtissent du statut civil le plus discriminant (exclusion du droit de propriété et du droit d’accès à certaines professions) et des conditions de vie les plus difficiles dans des camps souvent insalubres.
Le maintien des réfugiés palestiniens dans une situation d’apatridie a constitué la principale mesure recommandée par la Ligue arabe afin de prévenir toute implantation durable des réfugiés dans les pays hôtes et de maintenir ainsi leur droit au retour. Pour leur laisser une certaine liberté de mouvement, les pays hôtes ont été appelés à leur délivrer des documents de voyage avec pour simple mention « réfugié palestinien ».
Qu’ils se trouvent en Cisjordanie, à Gaza, dans les camps de réfugiés des pays arabes voisins ou ailleurs dans le monde, les Palestiniens ont le fort sentiment d’appartenir à un même peuple.