Question à plusieurs centaines de millions d’euros : quel point commun existe entre l’UE et la Turquie d’un côté, et l’UE et la Mauritanie de l’autre ?
Vous le saurez en continuant à lire cet article. Jeudi 8 février 2024, la Mauritanie et l’Union européenne ont officiellement signé un accord visant à développer les relations économiques entre les deux parties.
Jusque-là, rien de méchant, disons-nous. Sauf que – mais l’accord ne le dit pas formellement – celui-ci vise un autre objectif : « bloquer les migrants », action pour laquelle Nouakchott va donc recevoir de l’argent européen.
« Officiellement, c’est un accord sur les relations économiques entre la Mauritanie et l’Union européenne, écrit Ouest France. Mais le déplacement de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, du chef du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, et d’Hans Leitjens, le directeur de l’agence de contrôle des frontières européennes “Frontex“, dit autre chose. C’est bien un accord migratoire que les Européens sont allés chercher à Nouakchott ».
Le site rappelle que la Mauritanie est un des pays du Sahel les plus stables dans cette région gangrenée par les attaques djihadistes et avait déjà signé avec l’Espagne un accord bilatéral (2003) de rapatriement des clandestins.
Aujourd’hui, il accueillerait 150 000 réfugiés ayant fui l’insécurité régnant au Mali et est devenu un pays de transit pour rejoindre l’Europe…
Tout compte fait, Mohamed Ould el-Ghazouani, ancien général d’armée et président de la République depuis 2019, va obtenir pour son pays plusieurs fonds européens dont il a grandement besoin. Il s’agit entre autres de 22 millions d’euros de plus pour l’armée mauritanienne, le financement d’un grand projet routier le long de la côte entre Nouakchott et Nouâdhibou (la deuxième ville du pays) ainsi que celui d’une ligne à haute tension de 1 400 km, allant de la capitale à Néma dans l’est, avec une centrale solaire à Kifa.
Mais l’enveloppe la plus importante, en l’occurrence 210 millions de d’euros, lui sera versée « pour la gestion de la migration ».
A la question de savoir le point commun entre la Mauritanie et la Turquie dans ce cas d’espèce, c’est que l’UE a signé avec la Turquie un accord en ce sens, en 2016. Le deal entre les deux parties était le suivant : le président turc Erdogan devait à tout prix empêcher les migrants de partir contre de l’argent et reprendre ceux non éligibles à l’asile. Pour ce faire, il avait reçu six milliards d’euros. Et en 2021, il a obtenu une rallonge de trois milliards d’euros.
Cela étant, force est de constater que ledit accord a certes limité considérablement le nombre de réfugiés arrivant illégalement en Europe en provenance du sud-est de l’Europe, mais ce n’est pas le cas des autres routes migratoires, notamment vers l’Italie et l’Espagne. En effet, Frontex dit avoir « enregistré 380 000 franchissements irréguliers des frontières en 2023, le chiffre le plus élevé depuis 2016 ».
Alors, est-ce que la Mauritanie peut, à elle seule, jouer au gendarme contre des milliers de migrants venus pratiquement de tous les pays d’Afrique subsaharienne ?
Vous connaissez la réponse.